Covid-19 : peut-on se fier à l'étude américaine qui donne les principaux lieux où circule le virus ?
Une étude américaine mettrait en évidence les principaux lieux où l'on serait le plus susceptible d'attraper le Covid-19. Peut-on s'y fier?
Quelle est cette étude citée par Marine Le Pen ou encore Olivier Véran, sur les lieux où l’on risque le plus d’attraper le Covid-19 ? La présidente du Rassemblement national déclarait dimanche 15 novembre sur BFMTV qu’une étude américaine "a conclu que le risque de contamination dans les petits commerces était très faible". Autre interprétation de cette même étude du ministre de la Santé, ce mardi 17 octobre, sur BFMTV, pour cette fois énumérer les principaux lieux où l’on est susceptible d’attraper le virus : "les restaurants, les salles de sports, les bars, les offices religieux." Alors de quoi parle cette étude et ses résultats sont-ils valables en France ? On vous répond.
Une étude scientifique pour déterminer les principaux lieux de diffusion du Covid-19
Oui cette étude existe, elle a été publiée le 10 novembre sur la revue scientifique Nature, mais les données collectées ne sont pas récentes, elles datent de mars à mai dernier. Son objectif annoncé est de créer un modèle qui peut prédire comment le Covid-19 se propage dans les villes. Pour réaliser cette étude, des chercheurs de l’Université de Stanford, Cambridge et Northwerstern ont utilisé les données de localisation des téléphones portable de 98 millions d’Américains, à partir des données de SafeGraph, dans les 10 plus grandes métropoles des États-Unis : Atlanta, Chicago, Dallas, Houston, Los Angeles, Miami, New York City, Philadelphie, San Francisco et Washington DC.
Nous avons construit un modèle informatique pour analyser comment des personnes de différents milieux démographiques et de différents quartiers visitent différents types d'endroits plus ou moins surpeuplés. Sur la base de tout cela, nous pourrions prédire la probabilité de nouvelles infections à un endroit ou à un moment donné
Jure Leskovec, l'un des auteurs de l'étude et professeur agrégé d'informatique à l'Université de Stanfordau site news Standford
A partir des données que l’on retrouve dans l’étude, on constate que la majorité des contaminations au Covid-19 se concentrent dans un petit nombre de lieux : les restaurants en service à table, les hôtels, les salles de sport, les cafés et bars, les rassemblements religieux et centres médicaux. Pour déterminer ces lieux à risque, les chercheurs ont examiné le nombre de cas de Covid-19 pour chaque ville et ils ont examiné la fréquence à laquelle les gens se rendent à certains endroits dits non résidentiels (aussi appelés par les chercheurs "points d’intérêt".)
On constate qu’environ 10% des points d’intérêt représentent 80% des infections au virus.
Jure Leskoveclors d'un point presse
Le modèle développé par l’équipe de chercheurs met aussi en évidence une variable en fonction de ses revenus et du lieu où l’on habite. En résumé, une personne qui habite dans un quartier pauvre, où les épiceries sont petites avec d’importantes concentrations de gens, sera plus susceptible d’être contaminée qu’une personne qui vit dans un quartier riche.
Peut-on transposer les résultats de cette étude à la France ?
Pas complètement, car l’étude a été réalisée aux États-Unis, il y a plusieurs mois et dans un contexte différent. À cette époque le masque n’était pas obligatoire, les contraintes de déplacements n’étaient pas les mêmes qu’en France et enfin la façon de consommer des Américains n’est pas la même que celle des Français. Par exemple, quand Marine Le Pen déclare que l’étude "a conclu que le risque de contamination dans les petits commerces était très faible", c'est impossible à vérifier. En effet la notion de petit commerce comme on l’entend en France, n’est pas la même aux États-Unis. Dans l’étude il est essentiellement question "d’épiceries" avec des tendances qui varient selon les métropoles.
De plus, le modèle qui résulte de cette étude est une simulation et non une expérience réelle et les données sont basées sur 10 métropoles seulement qui ne représentent pas tous les endroits qu’une personne pourrait fréquenter. On constate d’ailleurs que l’étude ne prend pas en compte d’autres lieux potentiels de contamination comme les écoles, les prisons ou encore les maisons de retraite.
Néanmoins certaines prédictions qui résultent de la modélisation proposée par les chercheurs pourraient être transposables n'importe où. Jure Leskovec, l'un des auteurs de l'étude, explique que le modèle estime que "plafonner le taux d'occupation des points d'intérêt à 20% peut réduire les infections de plus de 80%".
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