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Vidéo Covid-19 : "S'il n'y a pas de reprise sur la deuxième quinzaine de novembre, on va assister à des fermetures d'usines automobiles", affirme Luc Chatel

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Article rédigé par franceinfo
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L'ancien ministre aujourd'hui président de la Plateforme automobile (PFA) plaide pour une réouverture des concessions. 60 000 emplois sont menacés par ce nouveau confinement, selon lui.

"S'il n'y a pas de reprise sur la deuxième quinzaine du mois de novembre, on va assister progressivement - comme au printemps - à des fermetures d'usines automobiles", s'inquiète lundi 9 novembre sur franceinfo ministre Luc Chatel, ministre sous Nicolas Sarkozy, aujourd'hui président de la Plateforme automobile (PFA) qui regroupe plusieurs acteurs du secteur qui demandent la réouverture des concessions pour éviter l'effondrement du marché ou la fermeture d'usines. "Je rappelle qu'il y a 400 000 emplois dans l'automobile en France. Nous avons fait une projection avec l'Union des métiers de l'industrie et il ressort que les emplois menacés à cause de cette crise sont de l'ordre de 60 000. C'est considérable."

franceinfo : Lors du premier confinement, l'automobile avait plongé dans le monde et en France, avec des ventes en baisse de 90%. Depuis, le secteur avait commencé à sortir la tête de l'eau. Est-ce que vous êtes en train de replonger aujourd'hui ?

Luc Chatel : Nous avons connu une année 2020 avec d'abord un effondrement au printemps, puis un rebond cet été, notamment grâce aux primes qui ont été votées et qui ont permis un électrochoc de reprise de l'activité. Nous avions une certaine stabilisation du marché automobile en septembre et en octobre, c'est-à-dire à un niveau qui était comparable à ce qu'il était depuis une dizaine d'années. Assez correct. Des carnets de commandes qui étaient assez corrects. Là-dessus arrive le deuxième confinement, qui entraîne un nouvel effondrement du marché.

C'est la fermeture des concessionnaires qui vous plombe aujourd'hui ?

Oui, c'est ça. Si l'on regarde depuis dix jours, c'est-à-dire depuis l'annonce du nouveau confinement, nous avons un effondrement des prises de commandes de l'ordre de 70%. Et cela a deux conséquences qui sont extrêmement préjudiciables : la première est sur l'activité des points de vente, des réseaux de vente, qui ne pourront pas durer très longtemps comme cela. La seconde, c'est une conséquence sur l'industrie, c'est à dire qu'on ne peut pas maintenir longtemps des points de vente fermés et des usines automobiles ouvertes. L'automobile travaille en ce qu'on appelle "juste à temps" avec un niveau de stocks limité et il est clair que s'il n'y a pas de reprise sur la deuxième quinzaine du mois de novembre, on va assister progressivement - de nouveau comme au printemps - à des fermetures d'usines automobiles.

L'usine PSA de Rennes, par exemple, vient de supprimer 500 postes d'intérimaires. C'est le premier d'une longue série ?

Le premier niveau de réduction de production, c'est effectivement la suppression des équipes. Avec un niveau d'activité tel que je le décrivais à l'instant, vous ne pouvez pas longtemps maintenir certaines usines en activité. PSA ou Renault devront - si les points de vente restent fermés - mettre à l'arrêt des usines automobiles, comme ils l'ont fait au printemps. Ce n'est pas facile d'arrêter une usine automobile pour quelques temps et c'est encore plus difficile de la redémarrer parce qu'il y a toute la chaîne de sous-traitants, toute la coordination à gérer. Si on ferme des usines dans la deuxième quinzaine du mois de novembre, elles pourraient ne pas rouvrir avant la mi-janvier. Donc ça a des conséquences dévastatrices sur notre industrie. Je rappelle qu'il y a 400 000 emplois dans l'automobile en France […] Nous avons fait une projection avec l'Union des métiers de l'industrie et il ressort que les emplois menacés à cause de cette crise sont de l'ordre de 60 000. C'est considérable. Au-delà de ça, il y a des savoir-faire dans l'industrie automobile. Il y a des PME, de la forge, de la fonderie, de la mécanique qui sont aujourd'hui en danger. Donc, effectivement, ce deuxième confinement nous prend complètement de face.

Vous avez vu plusieurs ministres vendredi dernier, parmi lesquels Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie. Vous lui avez, je suppose, demandé la réouverture des concessionnaires. Que vous a-t-il répondu ?

D'abord, je veux dire que nous ne sommes pas dans une opposition frontale. Le gouvernement a accompagné la filière automobile avec - entre autres - des mesures d'avenir, c'est-à-dire l'accompagnement de projets structurants pour le véhicule électrique, pour les batteries et donc une aide à l'innovation pour localiser en France des investissements du futur. Ce qui est important, c'est de comprendre que si on laisse fermer nos concessions, si on ne peut pas vendre de véhicules, on va devoir à nouveau arrêter les usines et donc stopper l'activité. Nous voulons également mettre en avant le fait que les points de vente automobiles sont particulièrement sécurisés en matière sanitaire. Nous n'opposons pas l'activité commerciale au risque sanitaire. D'abord, nous avons prouvé depuis six mois dans toutes nos usines dans le monde, que nous avions des protocoles extrêmement élevés. Il n'y a eu aucun cluster qui s'est déclenché aussi bien dans les usines que dans les points de vente automobiles. Dans une concession, il y a à peu près 40 à 50 mètres carrés par client, alors que la jauge actuelle dans les commerces qui sont ouverts, c'est 4 mètres carrés. Nous avons donc une sécurisation qui est bien plus élevée.

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