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Coronavirus : à quel moment une épidémie devient-elle une pandémie ?

Une pandémie est une épidémie qui s'est répandue sur plusieurs pays ou continents. Pourtant, l'Organisation mondiale de la santé n'emploie pas (encore) ce terme pour qualifier la propagation du nouveau coronavirus, désormais présent dans plus de trente pays du monde.  

Article rédigé par franceinfo
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Des passants portent des masques pour se protéger du coronavirus, mardi 25 février 2020.  (PHILIP FONG / AFP)

L'épidémie du nouveau coronavirus s'est accélérée. Lundi 24 février, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'en est inquiétée à l'occasion de son point presse quotidien, faisant cette fois usage d'une expression qu'elle évitait jusqu'alors : "risque de pandémie".  "Nous devons nous concentrer sur l'endiguement [de l'épidémie du nouveau coronavirus], tout en faisant tout notre possible pour nous préparer à une éventuelle pandémie", a déclaré son directeur général, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

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Si elle a observé un déclin du nombre de cas en Chine, berceau et principal foyer de la maladie, depuis début février, l'OMS a notamment jugé "très préoccupante (...) l'augmentation soudaine" de nouveaux cas en Italie, en Corée du Sud et en Iran. De quoi alimenter les craintes des experts de l'OMS. Pourtant, l'ambiguïté persiste, mardi 25 février, sur le terme adéquat. Alors, épidémie ou pandémie ? Ni l'un ni l'autre ? Franceinfo s'est penché sur la question. 

Un terme hérité d'un ancien système 

"Notre décision d'utiliser ou non le mot pandémie pour qualifier une épidémie est fondée sur une évaluation continue de la propagation géographique du virus, de la sévérité de la maladie qu'il provoque et de l'impact qu'il a sur l'ensemble de la société", a expliqué Tedros Adhanom Ghebreyesus, lundi. Sur son site internet, l'OMS fournit pourtant une définition plus sommaire : "On parle de pandémie en cas de propagation mondiale d'une nouvelle maladie." Quant au Larousse, il évoque simplement une "épidémie étendue à toute la population d'un continent, voire au monde entier".  C'est donc traditionnellement l'extension à plusieurs régions du monde, avec des foyers distincts, plutôt que des critères de sévérité ou la capacité de nuisance d'un virus, qui décident du basculement d'un terme à l'autre. 

 

Or, plus d'une trentaine de pays sont désormais touchés par le nouveau coronavirus. En Chine, près de 2 700 personnes ont succombé au Covid-19, sur 77 000 cas de contamination. En Europe, l'Italie, qui compte désormais sept morts, est devenue le premier pays du continent à mettre en place un cordon sanitaire autour d'une dizaine de villes du Nord. Deux mois après l'apparition du nouveau coronavirus, l'Afghanistan, le Bahrein, le Koweit, l'Irak et Oman ont également annoncé des premiers cas de contamination. La Corée du Sud et l'Iran se retrouvent, eux, en première ligne, avec respectivement le plus grand nombre de cas de contamination et de morts en dehors de Chine (15 morts sur une soixantaine de cas en Iran, 9 morts sur près de 900 cas en Corée du Sud).

Pourquoi l'OMS se refuse-t-elle donc toujours à parler de pandémie ? Pour repondre à cette question, il faut faire un bond dans le passé et explorer une autre crise sanitaire : celle du virus de la grippe A (H1N1), en 2009. A l'époque – et puisque l'épidémie est également mondiale –, l'OMS considère que le virus est entré dans une phase pandémique. Les groupes pharmaceutiques se mettent en branle et se pressent de commercialiser de grandes quantités de vaccins. En France, Roselyne Bachelot, ministre de la Santé à l'époque, commande 94 millions de doses, auprès de trois laboratoires. Mais finalement, le virus s'avère moins grave que prévu et le système de catégorisation de l'OMS fait l'objet de vives critiques. Avant d'être abandonné. 

Une urgence de santé publique internationale 

Aujourd'hui, "il n'y a pas de catégorie officielle [pour une pandémie]", a ainsi expliqué à Reuters lundi le porte-parole de l'OMS, Tarik Jasarevic. "L'OMS n'utilise plus l'ancien système de catégorisation avec lequel certaines personnes étaient familières depuis 2009. D'après le règlement sanitaire international, l'OMS a déclaré une urgence de santé publique de portée internationale". Dans le jargon, une "USPPI". 

>> Six questions sur l'urgence de "portée internationale" déclarée par l'OMS

"On entend par 'urgence de santé publique de portée internationale' un événement extraordinaire dont il est déterminé qu'il constitue un risque pour la santé publique dans d'autres Etats en raison du risque de propagation internationale de maladies et qu'il peut requérir une action internationale coordonnée'", résume ainsi l'OMS (lien en pdf). "Cette définition suppose une situation : grave, soudaine, inhabituelle ou inattendue ; qui a des répercussions pour la santé publique au-delà des frontières nationales de l'Etat touché ; et qui peut exiger une action internationale immédiate."

Si le terme "pandémie" n'a pas disparu – il est encore utilisé par l'OMS lors de communications officielles, dans le langage courant ou dans les travaux des divers instituts, comme Pasteur – "le système de classement par stades a été arrêté pour éviter les confusions”, précise simplement l'OMS, sollicitée par le Huffington Post

Le directeur de l'OMS estime pour sa part que la propagation du virus n'a pas encore échappé à tout contrôle, notamment grâce aux confinements et aux mises en quarantaine : "Pour le moment, nous n'assistons pas à une propagation mondiale débridée du virus et nous ne voyons pas une maladie grave ou des décès à grande échelle. Est-ce que ce virus possède un potentiel pandémique ? Absolument, il l'a. En sommes-nous là ? D'après notre évaluation, pas encore."

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