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Coronavirus : "Si tout le monde porte un masque en tissu, alors ça sera aussi efficace que de porter un masque FFP2", affirme un pneumologue

Deux personnes qui se parlent et portent chacune un masque, c'est "90%" d'efficacité dans le filtrage des postillons qui contiennent potentiellement le coronavirus soit l'équivalent des "masques les plus performants", explique le professeur Bertrand Dautzenberg.

Article rédigé par franceinfo
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Le professeur Bertrand Dautzenberg, pneumologue, le 1er janvier 2016 lors d'un symposium à la Rochelle (Charente-Maritime). (XAVIER LEOTY / AFP)

Après le confinement, la population est appelée à se couvrir le visage avec des masques 'grand public' alternatifs. Les tutoriels pour les fabriquer soi-même fleurissent sur Internet. Sur le site de l'Afnor, le patron pour faire un masque en tissu a été téléchargé plus de 500 000 fois. Une excellente chose pour Bertrand Dautzenberg, pneumologue et fondateur de montissumasque.com. Invité sur franceinfo vendredi 17 avril, il affirme que "si tout le monde porte un masque en tissu, alors ça sera aussi efficace que de porter un masque FFP2".

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franceinfo : Ce modèle qui a été téléchargé, pouvez-vous nous le décrire ?

Bertrand Dautzenberg : C'est le modèle de l'Afnor. C'est un modèle simple qui est un masque à plis, donc c'est un carré qui est plié et qui fait un masque qui s'applique bien sur le nez, sur le menton. C'est un masque qui n'a pas de couture centrale. Il y a beaucoup de tutos qui ont des coutures sagittales, juste sur le nez, la bouche... qui sont maintenant clairement décommandées par l'Agence nationale de sécurité sanitaire des médicaments, l'ANSM, et les autorités. C'est un masque qui est facile à faire pour soi-même. C'est un masque sur lequel il y a des conseils pour l'entretenir, des conseils pour le mettre.

Si on veut le faire, quel tissu doit-on utiliser ?

Il y a des tests qui sont faits et on aura la semaine prochaine par l'Afnor des données sur certains tissus que chacun a chez soi pour faire son masque. Pour l'instant, on se contente des recommandations générales. Donc il faut un tissu qui ne soit pas trop serré-serré et un tissu imperméable. Quand vous le mettez devant la fenêtre, si vous ne voyez pas du tout à travers, ça ne va pas laisser passer l'air et ça va vous étouffer. À l'inverse, si vous vous mettez devant la fenêtre, et qu'il y a des gros trous partout, ça ne va pas aller non plus parce que ça ne va pas filtrer, donc il faut un genre de coton ou des mailles serrées, ou ce genre de tissu qui est un petit peu serré. Quand vous fabriquez le masque, vous devez avoir, quand vous inspirez, le masque qui s'écrase un petit peu, on voit qu'il y a une dépression. Et quand vous soufflez, ça doit être quelque chose d'agréable, avec un masque on doit pouvoir au repos ne pas du tout être gêné. En revanche, dès qu'on fait un effort et qu'on va monter trois étages, on doit être un peu gêné par le masque. Et dans ces conditions, on pense que le masque est suffisamment respirable, c'est-à-dire qui ne gêne pas trop pour respirer et suffisamment filtrant.

L'idéal, c'est que tous les gens portent leur masques dès qu'ils sortent, dès qu'ils sont avec quelqu'un.

Bertrand Dautzenberg, pneumologue

à franceinfo

Dans quelles conditions le porter ?

C'est ce qu'il va se passer bientôt. En effet, les masques tissus doivent protéger au moins 70% des gouttelettes. Si la personne qui a le Covid-19 a ce masque avec les gouttelettes au lieu d'émettre 100 postillons, il va en émettre que 30. Et si l'autre personne en face de lui a aussi ce masque-là, alors il va rester seulement moins d'un tiers des postillons. Donc il va avoir 8 à 9 postillons sur les 100 du départ. Donc une efficacité globale des deux masques de 90% qui est équivalente aux masques les plus performants. Si tout le monde porte un masque en tissu, alors ça sera aussi efficace que de porter un masque FFP2 en face de quelqu'un qui n'a pas de masque.

Le gouvernement a changé de communication par rapport à ces masques. Ils étaient inutiles au début de la crise, ils sont ensuite devenus complètement indispensables. Vous, vous pensez qu'il vaut mieux porter un masque, même fait maison ?

Premièrement, la communication a changé, mais l'épidémie a changé. Jusqu'au début mars, il y avait très peu de virus dans la société. C'était vraiment inutile de porter un masque. Maintenant, il y a beaucoup de virus qui circulent. Il y a plus de gens contaminés.

Maintenant on sait aussi clairement que la moitié des gens contaminés n'ont aucun symptôme, que les gens qui vont avoir le coronavirus sont malades un ou deux jours avant, donc, toute personne doit faire comme si était elle-même contaminée asymptomatique et porter un masque en permanence.

Bertrand Dautzenberg

Alors après, il y a un manque de masques. L'OMS avait le même discours : il faut réserver les masques pour les soignants, donc, ne mettez pas de masques dans la rue. Maintenant on s'amuse avec montissumasque.com à compter les gens qui passent dans la rue avec des masques. On voit que 30% des gens en portent, 70% n'en n'ont pas. Mais ceux qui ont des masques, ont des masques médicaux ou chirurgicaux qui seraient beaucoup mieux dans les hôpitaux. Il faudrait beaucoup mieux qu'ils aient des masques ordinaires, mais qui marchent quasiment aussi bien que les masques chirurgicaux au point de vue filtration. En revanche, il faut les entretenir, laver, etc. Ce qui est facile à la maison : mettre à la machine à laver, passer un coup de fer à repasser après.

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