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Couvre-feu : entre résignation, colère et inquiétudes, les maires des neuf grandes villes concernées réagissent

Un couvre-feu pour enrayer la progression du Covid-19 est mis en place entre 21 heures et 6 heures du matin dans huit métropoles et dans toute la région Île-de-France.

Article rédigé par franceinfo
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Le Vieux-Port, à Marseille, dans la nuit du 14 octobre 2020. (VALLAURI NICOLAS / MAXPPP)

Emmanuel Macron a annoncé mercredi 14 octobre que des couvre-feux seraient imposés dès samedi pour un mois, voire jusqu'au 1er décembre, en Ile-de-France et dans huit métropoles de 21h00 à 06h00 pour faire face à la situation sanitaire "préoccupante". Ce couvre-feu s'appliquera pour au moins quatre semaines à Paris et dans sa région, "où le virus circule très activement" ainsi que dans les métropoles d'Aix-Marseille, Grenoble, Lille, Lyon, Montpellier, Rouen, Toulouse et Saint-Etienne.

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Aix-Marseille : Michèle Rubirola est "en colère" et réclame "des moyens"

"Je suis en colère", réagit Michèle Rubirola, maire de Marseille, jeudi sur France Bleu Provence. Elle estime que le couvre-feu n'est pas la bonne solution aujourd'hui, pour lutter contre l'épidémie. Pour elle, ce "confinement nocturne" va peser trop lourd au niveau économique. "Les Marseillais vont payer, par la suppression de leurs plaisirs, de leur liberté, par une précarisation économique, un manque de moyens hospitaliers", ajoute-t-elle. "On met les pansements peut-être pas forcément au bon endroit parce qu'on sait où ça s'infecte: dans les entreprises, la restauration collective, les universités, le milieu familial, dans tous les lieux de précarité, dans les transports en commun et qu'est-ce qu'on va faire ? On va taper exclusivement à partir de 21 heures sur les endroits où les gens peuvent trouver un peu de plaisir et aussi dans les restaurants, les milieux associatifs", s'est-elle indigné. Pour Michèle Rubirola, il faut d'urgence investir dans les hôpitaux. Mercredi soir, la maire de Marseille, avait réagi sur Twitter. "Marseille restera efficace contre la Covid, mais insiste pour que le gouvernement renforce réellement les tests rapides et les moyens aux hôpitaux et aux soignants." 

Grenoble : "Emmanuel Macron navigue à vue", estime Eric Piolle

Éric Piolle, maire EELV de Grenoble, estime que le président de la République "navigue à vue" depuis le début de la crise sanitaire. "Le président de la République dit lui-même qu'il n'a pas perdu le contrôle, mais qu'il faut reprendre le contrôle. Il navigue à vue. Il y a une mesure qui vient cibler l'espace privé, là où manifestement se passent les contaminations. Il y aura peut-être moins d'effets pervers que dans les mesures précédentes." Le maire écologiste fait part de ses "inquiétudes" pour les restaurateurs 'et tous les secteurs qui vont sombrer" après l'annonce de ce couvre-feu.

"Quand on a perdu le contrôle, quand on a épuisé l'hôpital par des mesures ultralibérales depuis 15 ans, on en arrive à des mesures drastiques qui impactent notre vie sociale et notre santé mentale massivement", dénonce Eric Piolle.

Lille : "Des mesures particulièrement difficiles", déplore Martine Aubry

"Nous devons appliquer les mesures annoncées par le Président de la République, même si nous aurions préféré un couvre-feu plus tard le soir", a regretté jeudi matin sur Twitter la maire PS de Lille Martine Aubry. "Ces mesures sont particulièrement difficiles pour le monde de la culture et les restaurateurs, qui à Lille ont tous respecté les protocoles sanitaires. Nous continuerons à les aider et demandons au gouvernement d’amplifier leur soutien", peut-on lire dans un deuxième tweet.

Lyon : Grégory Doucet réclame "un soutien à la hauteur de l'épreuve imposée"

Le maire de Lyon Grégory Doucet, appelle sur Twitter à "rester unis". "La lisibilité des mesures annoncées par le Président de la République est essentielle pour faire adhérer nos concitoyens aux bonnes pratiques permettant d’endiguer l’épidémie." Pour lui, "plusieurs secteurs dont la culture et l’économie s’inquiètent. Leurs demandes doivent trouver des réponses et un soutien à la hauteur de l’épreuve imposée." Le maire de Lyon met en avant que "la ville de Lyon a pris sa part dès le mois de juillet"  et va présenter "un plan pour le commerce". "L’intervention de l’Etat doit être rapide, déterminée et parfaitement ciblée pour permettre aux secteurs menacés de surmonter les effets des mesures sanitaires qui entrent en vigueur."

Montpellier : du jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale, selon Michaël Delafosse

Dans la métropole de Montpellier, l'ensemble des maires comprennent la mesure, mais s'inquiètent évidemment des conséquences économiques et psychologiques. "Jamais depuis la Seconde Guerre mondiale, il nous a été donné de vivre pareille situation", a commenté Michaël Delafosse, maire de Montpellier et président de la Métropole, à France Bleu Hérault. "J'étais au téléphone à l'instant avec un restaurateur qui était en larmes. On va avoir une responsabilité, c'est d'être aux côtés de ces professionnels", ajoute l'élu.

Paris : "Une nouvelle épreuve", estime Anne Hidalgo 

"C'est une nouvelle épreuve, et nous y ferons face, ensemble et solidaires des soignants", a réagi la maire de Paris, mercredi sur Twitter, après l'annonce de la mise en place d'un couvre-feu à partir de samedi dans la capitale et en Ile-de-France. "Devant la forte circulation du Covid-19 en France et à Paris, nous devons rester unis et appliquer les mesures annoncées par le président de la République, même si elles sont dures." Anne Hidalgo assure que "Paris continuera de soutenir toutes celles et tous ceux qui la font vivre : les commerçants, les restaurateurs et l'ensemble du monde de la culture". La maire de Paris a "aussi une pensée pour les plus fragiles, les personnes isolées et notre jeunesse, déjà rudement éprouvés par cette crise".

La maire de Paris souhaite discuter de dérogations pour le spectacle vivant avec Roselyne Bacheleot, ministre de la Culture. Elle suggère ainsi que les billets de spectacle servent d'attestation pour les déplacements après les spectacles, dont bon nombre terminent après 21 heures.. 

Rouen : "Un désastre pour le territoire", redoute Nicolas Mayer-Rossignol

Le maire socialiste de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol, invité de France Bleu Normandie jeudi, "prend acte" de ce "désastre pour le territoire". Le maire de Rouen en appelle à la "responsabilité et au sens civique" de chacun. Il estime qu'il n'est pas temps de tirer un bilan critique de l'action du gouvernement. "Je ne serai pas le dernier à y contribuer quand il aura lieu", ajoute-t-il, "mais aujourd'hui c'est l'heure de l'action, de l'action républicaine et de la solidarité".

Saint-Etienne : "Un aveu de faiblesse", constate Gaël Perdriau

"La décision qui a été prise est un aveu de faiblesse, réagit sur France Inter le maire LR de Saint-Etienne, Gaël Perdriau. Cela montre l'inefficacité des mesures prises depuis le mois d'août." Le maire de Saint-Etienne pointe le temps perdu, selon lui. "La situation dans les hôpitaux est catastrophique. Je ne suis pas certain du tout que le président de la République ait mis à profit les six mois qui nous ont séparés de la première vague pour adapter le système hospitalier à cette deuxième vague."

"J'ai le sentiment que le président navigue à vue, insiste Gaël Perdriau. On réagit dans l'urgence. Le gouvernement court en permanence après l'actualité, alors qu'il est là pour anticiper, pour protéger les Français." Le président de Saint-Etienne Métropole ajoute que le virus ne circule pas par "intermittence" : "Avant 21 heures, vous allez à l'école, vous allez au travail, vous allez dans les transports en commun, vous allez rencontrer des gens".

Toulouse : "le coup de grâce" pour certains secteurs, redoute Jean-Luc Moudenc

Le maire LR de Toulouse Jean-Luc Moudenc se dit inquiet "des conséquences économiques et sociales de ces mesures".  "Il faut se mettre à la place des professionnels concernés, souligne Jean-Luc Moudenc. Ils ont considérablement souffert pendant la période du confinement. Ils se remettent à peu près cahin-caha depuis quelques mois." Il craint que le couvre-feu soit "le coup de grâce et que ces quatre semaines soient fatales à beaucoup d'entre elles". Il souhaite que soit "mis en œuvre rapidement une accentuation du soutien de l'Etat à ces professionnels. Sinon, c'est simple, ils vont mourir et détruire des dizaines et des dizaines de milliers d'emplois".

"Notre devoir républicain d'être aux côtés de l'Etat, ajoute Jean-Luc Moudenc, de le seconder dans cette période particulièrement difficile." Il précise qu'il va "se coordonner" avec la préfecture pour examiner les modalités d'application du couvre-feu. Et décider de la mobilisation de la police municipale au côté de la police nationale.

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