Covid-19 : ce que l'on sait des "clusters" recensés par Santé publique France
Ces foyers épidémiques repérés par les autorités sanitaires représentent moins de 10% des cas diagnostiqués, souligne SPF.
Où attrape-t-on le coronavirus, et comment ? A cette question lancinante, il n'y a pas à ce jour de réponse satisfaisante en France, faute de données fines et d'enquêtes de terrain de grande ampleur. "Une étude épidémiologique va être lancée avec l'Institut Pasteur pour investiguer les conditions de contamination", a indiqué Santé publique France (SPF) lors d'un point presse, vendredi 16 octobre.
Il y a, en revanche, un recensement, par type de collectivités, des "clusters", ces foyers épidémiques où la maladie s'est répandue. Voici ce que l'on en sait pour l'instant.
Les "clusters" recensés ne recouvrent pas toutes les contaminations
Ces foyers sont la (petite) partie émergée de l'iceberg : moins d'un dixième des cas de Covid-19 diagnostiqués, reconnaît SPF dans son bulletin épidémiologique hebdomadaire du jeudi 15 octobre.
"L'ensemble des clusters inclut 50 550 cas (moins de 10% des cas diagnostiqués)."
Santé publique Francedans son bulletin épidémiologique du 15 octobre
Ce n'est d'ailleurs pas la vocation de ces données. Ces "clusters" ("définis par au moins trois cas, sur sept jours, appartenant à une même communauté ou ayant participé à un même rassemblement") sont "investigués depuis le début du confinement" pour servir d'"alerte", a expliqué l'agence sanitaire lors d'un point presse, vendredi 16 octobre. "Ce sont des petits feux sur lesquels il faut avoir une vigilance extrême. Il s'agit d'un dispositif d'alerte pour prioriser les actions vers les publics les plus vulnérables."
Mais ce recensement a des lacunes. Les contaminations intrafamiliales, par exemple, "sont sous-représentées", de l'aveu même de SPF. Et surtout, ces informations ne rendent que très partiellement compte des modes de contamination en France. Cette absence de données fines sur la transmission du virus est d'ailleurs régulièrement déplorée par les spécialistes. "Il faut faire des enquêtes de terrain. De l'épidémiologie d'intervention pour casser les chaînes de transmission", souligne dans Le Monde (article abonnés) l'épidémiologiste suisse Didier Pittet, qui a rendu au président Emmanuel Macron un rapport sur la gestion de la crise sanitaire par l'exécutif. "Ce qui manque le plus, ce sont des analyses plus fines des clusters", souligne, dans le même journal, Pierre Parneix, médecin de santé publique au CHU de Bordeaux et membre de la mission.
La fréquence des foyers ne permet pas de déduire les principaux lieux de transmission
Dans son dernier bulletin épidémiologique, Santé publique France publie le tableau ci-dessous. La première colonne recense l'ensemble des "clusters" (actifs ou terminés) depuis le 9 mai 2020. La seconde, ceux qui sont toujours "en cours d'investigation" (donc actifs). Les différentes collectivités y sont classées par ordre de "criticité" (plus cet indicateur est élevé, plus il est inquiétant "en termes de risque de transmission au sein de la collectivité considérée").
Le plus alarmant reste donc la situation dans les Ehpad, ces établissements accueillant des personnes âgées, et dont la "criticité est jugée élevée" : 304 "clusters" y sont "en cours d'investigation", donc actifs. Certes, en valeur absolue, le chiffre est supérieur pour le milieu scolaire et universitaire, avec 376 établissements concernés, ainsi que pour les entreprises privées et publiques (348), mais les risques liés à la transmission y sont jugés moins élevés.
Santé publique France prévient aussi que si le nombre de "clusters" en entreprise ou en milieu scolaire apparaît important en termes bruts, il ne représente qu'une "part très faible de l'ensemble de ces structures. On ne peut pas déduire de la fréquence des types de 'clusters' identifiés les modes de transmission actuels du Sars-CoV-2 dans la population". Une étude doit d'ailleurs être lancée par SPF et l'Institut Pasteur pour déterminer les principaux lieux de contamination. Interrogé par franceinfo, l'institut répond n'avoir "pour le moment pas plus d'informations à communiquer à ce sujet". "C'est encore en projet", indique de son côté SPF.
Depuis le 9 mai, "les six collectivités pour lesquelles la proportion de 'clusters' à criticité élevée est la plus importante sont les Ehpad (73%), les communautés vulnérables (58%), les établissements médico-sociaux de personnes handicapées (51%), les établissements de santé (46%), les établissements pénitentiaires (39%) et les établissements sociaux d'hébergement et d'insertion (39%)", précise encore Santé publique France.
Les données ne permettent donc pas de dire si cafés et restos sont des lieux à risques
Se contamine-t-on particulièrement dans les cafés et les restaurants, qui subissent de plein fouet les récentes restrictions décidées par le gouvernement ? Les données sur les "clusters" ne le disent pas.
Mais, dans son bulletin épidémiologique du 24 septembre, Santé publique France fait apparaître en troisième place la restauration dans les secteurs d'entreprises "présentant plus de 10 'clusters'" classés par ordre de "criticité". Encore faut-il préciser que la population diagnostiquée est bien celle des salariés, et non celle des clients.
Selon cette étude, estime encore Santé publique France, "les cinq secteurs des entreprises les plus à risque sont l'industrie alimentaire (57%), les transports terrestres et transport par conduites (27%), la restauration (20%), les activités sportives, récréatives et de loisirs (17%), et l'administration publique et défense (19%). Concernant l'industrie alimentaire, il s'agit plus particulièrement des activités de transformation et conservation de la viande (...). Pour la restauration, cela concerne pour l'essentiel des restaurants et des services de restauration mobile."
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