Crise en Guadeloupe : ce que l'on sait de l'instance de dialogue annoncée par Jean Castex pour "accompagner" et "convaincre" les soignants
Une partie des soignants guadeloupéens refuse toujours l'obligation vaccinale. Le gouvernement doit déployer une mission sur place dès mardi.
L'obligation vaccinale ne sera pas remise en cause. Après une semaine de contestations ponctuées de violences urbaines et de pillages, le gouvernement a entamé le dialogue avec les élus de Guadeloupe. L'exécutif veut apaiser les tensions, d'autant que la discorde monte aussi en Martinique, où a été lancée une grève illimitée.
Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a prévenu, mardi 23 novembre sur France Inter, "que le rétablissement de l'ordre public est le préalable à toute discussion", en précisant que des gendarmes avaient été la cible de tirs à balles réelles. Pour sortir de l'impasse, le Premier ministre Jean Castex a annoncé lundi soir, à l'issue d'une réunion avec des élus, la création d'une "instance de dialogue" afin de "convaincre et d'accompagner individuellement, humainement", les professionnels concernés par l'obligation vaccinale. Par ailleurs, une mission de médiation à destination des sapeurs-pompiers, qui font partie des forces vives de la contestation, doit également être mise en œuvre dans le but d'augmenter le taux de vaccinés qui n'est que de "43%", selon le ministre des Outre-mer.
Franceinfo fait le point sur ce que l'on sait de cette instance de dialogue.
Une instance pour "convaincre et accompagner" les soignants
Accompagné du ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, et du ministre de la Santé, Olivier Véran, le Premier ministre, Jean Castex, contraint à l'isolement après avoir été testé positif au Covid-19, a tenu par visioconférence une réunion de crise lundi soir. Autour de la table se trouvaient notamment, en visioconférence depuis la Guadeloupe, le préfet Alexandre Rochatte et le président de région, Ary Chalus. Côté élus, étaient notamment présents, à Matignon, les parlementaires Victorin Lurel, Max Mathiasin, Olivier Serva, ainsi que le maire de Capesterre-Belle-Eau Jean-Philippe Courtois.
Afin de créer les conditions pour répondre aux craintes des soignants qui n'ont pas encore respecté l'obligation vaccinale, Jean Castex a annoncé la création d'une "instance de dialogue" afin de "poursuivre et intensifier" le travail de pédagogie effectué par la communauté médicale guadeloupéenne depuis des semaines. L'objectif affiché de cette instance est de "convaincre et d'accompagner individuellement, humainement" les professionnels concernés "en prenant le temps nécessaire". Concrètement, "cette instance de dialogue est une instance de gestion individuelle des 1 400 personnes qui sont suspendues", a détaillé le ministre des Outre-mer, invité dans "les 4 Vérités" sur France 2 mardi matin.
Depuis l'été, le taux de vaccination du personnel soignant a progressé en Guadeloupe. L'Agence régionale de santé rapporte qu'à la date du 17 novembre près de 86% des soignants libéraux sont vaccinés et entre 85 et 100% du personnel des établissements publics de soins. Quant à la population, 46,43% des plus de 18 ans ont déja reçu au moins une dose.
Les pistes avancées : dialogue social et reconversion professionnelle
Avec les soignants, "nous sommes aussi sur un dialogue social entre l'employeur, le ministère de la Santé et des Solidarités, et ses employés pour trouver les solutions", assure le ministre des Outre-mer.
Présent hier soir soir à Matignon, le député La République en marche (LREM) de Guadeloupe, Olivier Serva, a précisé les pistes avancées à l'attention du personnel soignant et plus précisément "les 200 personnes qui sont concernées par des suspensions pour la paye de fin novembre" ainsi que les "1 000 autres qui ne sont pas vaccinées et qui pourraient être concernées". Il a été rappelé lors de cette réunion que "les élus ne souhaitent pas qu'il y ait des dégressivités de rémunérations".
Selon le député, "des instances et des médiations par catégorie : médecins, infirmiers, aides-soignants..." seront prévues, sachant que "ces médiateurs doivent être des personnes qui sont au contact de la situation afin de trouver des solutions individualisées".
Quant à la défiance vis-à-vis des vaccins à ARM messager, "le Premier ministre a indiqué qu'il était d'accord pour envisager le fait que celles et ceux qui ne veulent pas ce vaccin puissent prendre une dose d'AstraZeneca ou de Janssen", souligne l'élu. Avec une première dose, ils pourront ainsi entrer dans un début de schéma vaccinal qui leur permettrait de ne plus être suspendus. Jusqu'à présent, les vaccins disponibles en Guadeloupe étaient "essentiellement" des vaccins Pfizer/BioNtech, a précisé le ministère des Outre-mer.
Pour ceux refusant tout vaccin, "le gouvernement propose de mettre en place, avec le conseil régional guadeloupéen, un accompagnement de reconversion professionnelle" assure le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu.
Les élus attentifs et les grévistes sceptiques
Les réactions des élus présents ne se sont pas fait attendre. Mardi matin sur franceinfo, le président LREM de la région Guadeloupe, Ary Chalus, a estimé qu'ils avaient été "entendus mais pas écoutés". "Nous avons demandé des adaptations, des assouplissements, ça n'a pas été le cas, précise-t-il. Si l'Etat ne prend pas ses responsabilités pour apaiser les tensions, les choses ne vont pas s’arranger."
Si les élus ne sont "pas forcément satisfaits sur tous les points", souligne le président du conseil départemental de la Guadeloupe, Jean-Philippe Courtois, interrogé sur RCI Guadeloupe, il salue le fait d'"avoir été écouté et qu'il y ait eu quelque peu une volonté d'atténuer le point de vue du gouvernement sur certains aspects qui aujourd'hui sont crispants ou bloquants sur le territoire".
Sur le terrain, les propositions de Jean Castex n'ont pas convaincu les grévistes et le Collectif d'organisations en lutte contre l'obligation vaccinale et le pass sanitaire atteste toujours attendre une rencontre avec les élus de Guadeloupe et les parlementaires.
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