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Déconfinement : "On espère que les cafés vont reprendre leur place, ce ne sont pas des commerces ordinaires", souligne un écrivain

Symboles de liberté et de fraternité, ce sont aussi les bistrots qui accueillent les musiciens "qui n'ont pas un public suffisant pour accéder à l'Olympia", rappelle l'auteur de "Bistroscope - L’histoire de France racontée de cafés en bistrots".

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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L'auteur Pierrick Bourgault, au Salon du livre, quinconces des Jacobins, en 2017. (OLIVIER BLIN / MAXPPP)

"On espère que les cafés vont reprendre leur place, parce que ce ne sont pas des commerces ordinaires", a déclaré mardi 2 juin sur franceinfo Pierrick Bourgault, écrivain spécialiste des bistrots, alors que les cafés ont le droit de rouvrir en France. "C'est une façon de vivre ensemble, un lieu qui rend possible des rencontres entre des personnes qui ne se connaissent pas", souligne-t-il. À l'image de ce qui s'est passé après les attentats de Paris en 2015, les cafés et leurs terrasses sont "un symbole d'une liberté d'être là", estime l'écrivain. Son dernier livre s'intitule Bistroscope - L’histoire de France racontée de cafés en bistrots et est publié chez Chronique Éditions

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franceinfo : Est-ce que pour vous la réouverture des cafés et des terrasses ce mardi, c'est quelque chose qui va redonner vie dans les villes et villages ?

On l'espère. On espère que les cafés vont reprendre leur place, parce que ce ne sont pas des commerces ordinaires, on n'y va pas juste acheter un café ou une boisson. On y va aussi passer du temps, regarder, écouter. Quand vous êtes en voyage, par exemple, aller dans un café, dans un bistrot et écouter ce que racontent les gens de la ville, du village, c'est important, c'est un lieu où on fait la pause. On était très embêtés pendant les 80 jours que les cafés ont fermé, par exemple, pour donner un rendez-vous ou tout simplement attendre, passer du temps avant un autre rendez-vous. C'est un lieu très précieux. C'est aussi lié au comptoir, le comptoir est important. On est super contents que les terrasses réouvrent, c'est un très bon signe. Mais le comptoir, qui est vraiment le lieu de convivialité par excellence, n'est pas encore ouvert puisqu'il y a interdiction sur toute la France de consommer debout. Cette espèce de Formica ou de zinc qui est un peu le lieu où se retrouvent des gens qui ne se connaissent pas et qui écoutent, c'est le lieu de discussions, c'est vraiment le cœur du bistrot. Mais ça va ouvrir bientôt, on est sur la bonne voie.

Avec l'ouverture des cafés, on est dans un vrai symbole de la France qui rouvre ?

Le bistrot est une porte ouverte sur le monde, c'est aussi un lieu qui rend possible des rencontres entre des personnes qui ne se connaissent pas. On peut rencontrer, par exemple, des vins de vignerons pour les bars à vins, rencontrer des artistes, avec les concerts ou les expositions. Les bistrots sont importants aussi parce qu'ils accueillent des concerts, ce qui n'est pas encore possible pour l'instant. Il y a à peu près 250 bistrots à Paris qui accueillent plus ou moins régulièrement des musiciens et musiciennes de talent qui n'ont pas un public suffisant pour accéder à l'Olympia ou d'autres salles. C'est aussi une façon de rencontrer le public et d'apprendre le lien au public. Ces petites salles sont très importantes pour la vie culturelle, ce sont des tremplins.

Votre dernier livre s'intitule 'L'histoire de France des cafés et bistrots', en quoi ces lieux racontent d'une partie de l'histoire de France ?

Il s'est passé beaucoup de choses importants dans les bistrots comme l'assassinat de Jean Jaurès. L'arrivée des nouvelles boissons comme le café et le thé ça a changé la convivialité, le mode de relations entre les gens. Ce n'était plus seulement des lieux où boire du vin, mais aussi des lieux où discuter.

C'était des salons en fait, où on n'a pas besoin d'être invité par le marquis ou la marquise, c'est votre charisme et votre éloquence qui fait que vous prenez la parole. 

Pierrick Bourgault, écrivain spécialiste des bistrots

à franceinfo

Comme le faisait Voltaire, c'est un lieu d'expression, qu'elle soit publique, qu'elle soit intime, qu'elle soit artistique aussi.

Et dans l'histoire plus récente, on se souvient des terrasses mitraillées le 13 novembre 2015, là aussi on a vu à quel point c'était un symbole d'une façon de vivre à la française ?

Tout à fait, un symbole d'une liberté d'être là. Ce sont souvent des petits lieux autour d'une personne, autour d'une famille. Il y a un bistrot sur lequel j'ai écrit un livre, la mère Lapipe au Mans, qui est un lieu où se retrouvent aussi bien des policiers retraités que des brocanteurs, que des gens du voyage, que des cuisiniers, des gens de tous horizons. C'est une façon de vivre ensemble, une façon de s'apprivoiser et de connaître un milieu social qu'on ne fréquenterait absolument pas dans notre univers familial et professionnel.

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