Quarantaine à Wuhan, contrôles aux frontières, masques... Comment s'organise la lutte contre le coronavirus en France et dans le monde
L'OMS se réunit dans la matinée pour déterminer s'il convient de déclarer une "urgence de santé publique de portée internationale" face à l'épidémie.
Etat d'alerte contre l'épidémie. Le nouveau coronavirus, apparu en Chine le mois dernier, a fait 17 morts dans le pays, selon le dernier bilan communiqué par les autorités chinoises. Alors que le virus a gagné plusieurs pays d'Asie et même les Etats-Unis, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) doit déterminer, jeudi 23 janvier, s'il convient de déclarer une "urgence de santé publique de portée internationale".
Lors d'un coup de fil avec Emmanuel Macron, le président chinois Xi Jinping a assuré à son homologue français que la Chine avait adopté "des mesures de prévention et de contrôle stricts", selon des propos rapportés par l'agence Chine nouvelle. Comment la Chine, la France et les autres pays luttent-ils concrètement contre la propagation du virus ? Franceinfo fait le point.
En mettant la ville de Wuhan en quarantaine
Pékin a mis sous quarantaine Wuhan, huitième pplus grande ville de Chine avec 11 millions d'habitants, considérée comme le berceau de la mystérieuse épidémie. Les 17 personnes qui ont succombé à l'épidémie sont mortes à Wuhan ou dans la région.
"Les habitants ne doivent pas quitter Wuhan sans raison spécifique", ont annoncé les autorités. Cette décision est prise afin "d'enrayer efficacement la propagation du virus", a-t-il expliqué, alors que la Chine s'apprête à entrer vendredi dans son long congé du Nouvel An, qui occasionne chaque année des centaines de millions de voyages. La décision ayant été annoncée pendant la nuit, les habitants de Wuhan n'ont pas pu planifier un éventuel départ.
Depuis 10 heures (heure locale), plus aucun train ni avion ne doit en principe quitter cette cité du centre de la Chine. Aux sorties autoroutières de la ville, des policiers stoppent certains véhicules afin de prendre la température corporelle des occupants, selon le site The Paper. Plusieurs stations services sont déjà à cours de carburant. A l'intérieur même de Wuhan, les transports publics étaient à l'arrêt et les festivités du Nouvel An ont été annulées.
En isolant les patients infectés ou suspects
Depuis l'annonce par un expert chinois, lundi, de la transmissibilité du virus entre humains, de nombreux gouvernements ont mis en place des mesures pour isoler les patients dès qu'ils présentent des symptômes. Contrairement au virus de la grippe, qui est déjà contagieux avant que les symptômes apparaissent, "en général, avec le coronavirus, on est contagieux à partir du jour où on a des symptômes, explique à franceinfo le professeur Yazdan Yazdanpanah, chef du service maladies infectieuses à l'hôpital Bichat, à Paris. Pour l'arrêter, il faut donc détecter les cas très rapidement et isoler."
C'était le cas d'un citoyen français, soupçonné pendant un temps d'avoir contracté la maladie après un séjour à Wuhan, a expliqué Jérôme Salomon, directeur général de la Santé, qui dépend du ministère.
Il a été pris en charge en isolement dans un établissement de référence. Il va bien, est rentré chez lui, tous les examens virologiques réalisés au Centre national de référence de l'Institut Pasteur sont négatifs.
Jérôme Salomon, directeur général de la Santé
Dans les vols directs en direction et en provenance de Wuhan, des messages de précaution sont désormais diffusés, affirme le professeur Jérôme Salomon. Des affiches rappelant la conduite à tenir en cas de symptômes sont par ailleurs affichées dans les aéroports internationaux, comme à Roissy-Charles de Gaulle. En cas de doute, les personnes sont invitées à ne pas se rendre chez leur médecin ou à l'hôpital pour éviter les contacts, mais à rester chez elles et à appeler le Samu, indique Santé publique France dans un communiqué sur les conduites à tenir en cas de soupçons.
[#Coronavirus] Le Pr Jérôme Salomon rappelle les mesures d’information mises en place à l’aéroport Roissy- Charles-de-Gaulle, ainsi que les recommandations faites aux professionnels de santé, sur la prise en charge d’éventuels cas. pic.twitter.com/9J9Y9ouyMM
— Ministère des Solidarités et de la Santé (@MinSoliSante) January 21, 2020
La plupart des autres pays touchés ou potentiellement touchés ont pris des dispositifs similaires pour isoler les patients infectés. Aux Etats-Unis, un homme d'une trentaine d'années revenant d'un voyage à Wuhan, dont il est originaire, a contracté le virus. Il est arrivé le 15 janvier sans fièvre à l'aéroport de Seattle, et a lui-même contacté les services de santé locaux, dimanche, après avoir constaté des symptômes. Il a été hospitalisé par précaution et va bien. Il restera à l'isolement pendant encore au moins 48 heures, ont affirmé les Centres de prévention et de contrôle des maladies (CDC) américains.
Quant à la Chine, principal pays touché par l'épidémie avec près de 300 cas confirmés, elle procède aussi à des mesures de quarantaine. Selon les autorités chinoises, 922 patients sont en ce moment placés en observation dans des hôpitaux.
En instaurant des contrôles aux frontières
Les passagers au départ de Wuhan et de Shanghai font l'objet d'une détection au moment de leur départ. "Il y a une sorte de porte et automatiquement la température est mesurée", raconte à France 2 un passager d'un vol Shanghai-Paris.
Pour l'heure, la France n'a pas mis en place de contrôle systématique de la température des voyageurs en provenance de Chine. Selon le directeur général de la Santé, cette mesure, "pas recommandée par l'Organisation mondiale de la santé", est "complexe à mettre en place" et "pas très efficace". "Tout le monde n'est pas d'accord sur l'efficacité", abonde le professeur Yazdan Yazdanpanah, notant qu'un patient "peut prendre aussi un Efferalgan pour ne pas avoir de la fièvre" au moment du contrôle.
Pourtant, un très grand nombre de pays ont mis en place des contrôles aux frontières. C'est notamment le cas de l'Australie, de la Corée du Sud, de la Russie, du Népal, de Singapour, de la Malaisie, du Vietnam, du Bangladesh et de l'Inde. En Thaïlande, qui accueille à elle seule un quart des vols internationaux au départ de Wuhan, les autorités ont mis en place des détections thermiques obligatoires dans les aéroports de Bangkok, Chiang Mai, Phuket et Krabi, pour les passagers en provenance des zones chinoises à risques. En cas de fièvre, une quarantaine de 24 heures est imposée au passager.
A Hong Kong, les autorités se disent en "alerte maximale". L'aéroport de la ville, l'un des plus fréquentés au monde, procède déjà en temps normal au contrôle thermique de tous les passagers, mais les passagers qui arrivent de Wuhan doivent désormais remplir un formulaire supplémentaire. En cas de mensonge, ils s'exposent à des sanctions pouvant aller jusqu'à six mois de prison. Il en est de même aux Etats-Unis, où les passagers arrivant de Wuhan sont désormais soumis à un questionnaire et à une prise de température.
En respectant des règles d'hygiène strictes
"D'abord, il faut porter le masque, surtout dans les gares et les trains", a affirmé à franceinfo le docteur Cheng de l'hôpital Tiangong, au sud de Pékin, relayant les consignes officielles du gouvernement. Après une relative indifférence au début de l'épidémie, le mois dernier, l'inquiétude s'empare du pays et beaucoup de Chinois portent désormais des masques respiratoires dans les grandes villes.
Dans une pharmacie de Pékin, mercredi, une employée était obligée d'expliquer aux clients qu'elle n'avait plus de masques ni de produits désinfectants à vendre. "Les stocks sont à zéro à cause de ce qui se passe à Wuhan. Quand le nombre de cas s'est rapproché des 300, les gens ont réalisé que c'était grave", a-t-elle expliqué à l'AFP.
Pour les ressortissants français qui se trouvent en Chine, le Quai d'Orsay a communiqué une série de mesures. Le ministère des Affaires étrangères recommande notamment "d'éviter tout contact avec des animaux vivants ou morts", avec "des personnes souffrant d’infection respiratoire aiguë" et de se laver régulièrement les mains avec de l’eau savonneuse ou avec une solution hydro-alcoolique. Près de la moitié des provinces du pays sont touchées, y compris des mégapoles comme Shanghai et Pékin, où le lycée français a diffusé des consignes de prévention et distribué du gel désinfectant aux élèves.
En France, aucune trace du virus n'a été détectée et le "risque d'introduction est faible", a indiqué Agnès Buzyn lors d'une conférence de presse. Il n'y a donc pas de consigne d'hygiène particulière à observer en dehors de celles déjà conseillées pour les autres maladies de saison.
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