Mobilisation contre le pass sanitaire en Guadeloupe : "La situation est quasiment insurrectionnelle", selon un député
Olivier Serva, député LREM de Guadeloupe, a alerté sur la situation de l'île qu'il a qualifié de "grave", vendredi sur franceinfo. La Guadeloupe est secouée des blocages et des manifestations contre le pass sanitaire et l'obligation vaccinale.
"Il faut tenir compte de la réalité et des spécificités" de la Guadeloupe, a plaidé sur franceinfo vendredi 19 novembre le député LREM de Guadeloupe Olivia Serva, après que le préfet a annoncé la mise en place d'un couvre-feu de 18 heures à 5 heures jusqu'au 23 novembre. Depuis cinq jours, l'île d'Outre-mer est en proie à des manifestations et des violences liées à une grève illimitée pour protester contre le pass sanitaire et l'obligation vaccinale des soignants. Olivier Serva appelle le Premier ministre Jean Castex à "échanger pour des solutions différenciées, adaptées, intelligentes et concertées".
franceinfo : Ce couvre-feu est-il nécessaire en Guadeloupe ?
Olivier Serva : Il est nécessaire que l'État, au plus haut niveau, entende la souffrance et l'inquiétude des Guadeloupéens. La situation est grave. (...) En août, j'avais voté contre cette loi sur le pass sanitaire et l'obligation vaccinale parce que, pour la Guadeloupe, le taux de vaccination conduit à l'idée que nous ne pouvons appliquer en l'état cette obligation vaccinale pour les soignants. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a fait la sourde oreille jusqu'à maintenant. Il faut que l'État entende cette problématique parce que la situation est quasiment insurrectionnelle. C'est pour cela que je viens, avec les six autres parlementaires de l'île, d'écrire au Premier ministre pour lui demander une rencontre. Pourquoi existe-t-il une médiation en Martinique et pas en Guadeloupe ? Pourquoi laissons nous pourrir cette situation ? Pourquoi ne pas demander aux soignants de faire un test PCR toutes les 72 heures pour s'assurer qu'ils soient négatifs ? Aujourd'hui, nous avons des barrages, des hommes et des femmes qui perdent leur outil de travail, qui risquent leur vie, qui ne peuvent pas se faire soigner. Ceci se fait sur le dos de la santé des Guadeloupéens. (...)
Pourquoi cette loi est-elle inapplicable ?
Tout simplement parce qu'aujourd'hui, la quantité de personnes vaccinées est insuffisante. En Guadeloupe, il y a des gens qui ne sont pas vaccinés et qui sont des soignants. Le système de santé ne peut pas fonctionner sans eux. Que la vaccination soit la meilleure solution, d'accord, mais on ne va pas appliquer bêtement et méchamment une situation qui ne fonctionne pas en Guadeloupe. Aujourd'hui, notre pays est à feu et à sang. Il faut à un moment donné tenir compte de la réalité et des spécificités. Nous sommes sur une île, nous avons une histoire et un vécu ainsi que des réactions différentes. C'est un fait et personne ne pourra contraindre plutôt que convaincre.
Comment expliquez-vous ces réticences face aux vaccins en Guadeloupe ?
Il y a plusieurs raisons. Tout d'abord, il y a l'affaiblissement de la parole publique et de l'autorité publique de l'État. Pourquoi ? Nous avons vécu le scandale du chlordécone avec l'État qui, il y a une vingtaine d'années, nous a dit que cet insecticide ne poserait aucun problème. Finalement, cette molécule a empoisonné nos terres, nos mères et donné des cancers. Cela a créé des malformations pour 600 ans. C'est une expérience qui conduit à une méfiance de la parole de l'État. Ensuite, nous avons subi pour la plupart d'entre-nous l'esclavage colonial. Moi, je suis vacciné et j'ai toujours appelé ceux que j'aime à se faire vacciner. Pourtant, le fait est qu'il y a certaines personnes qui ne veulent pas se vacciner. Ce sont des maillons essentiels en Guadeloupe pour le système de santé. Nous demandons donc au Premier ministre qu'il puisse échanger avec nous, que nous envisagions des solutions différenciées, adaptées, intelligentes et concertées.
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