Outils numériques, quarantaine individuelle, rôle des masques... Que retenir de l'expérience asiatique pour la lutte contre le Covid-19 ?
L'Institut Montaigne divulgue six enseignements à tirer des méthodes des pays asiatiques pour lutter contre le Covid-19.
Outils numériques, quarantaine individuelle, rôle des masques... L'Institut Montaigne a analysé les méthodes des pays asiatiques pour lutter contre le Covid-19 et en retient "six enseignements pour nourrir les débats sur le déconfinement en France et en Europe". Le think tank publie jeudi 16 avril cette "boîte à outils de gestion de crise et de l’après-confinement" dans une note intitulée "L'Asie orientale face à la pandémie".
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L'Institut Montaigne est parti d'un constat : "Le nombre de cas recensés dans cette région du monde reste bien inférieur aux centaines de milliers de cas constatés en Europe et aux États-Unis. Les mesures qui ont permis d’éviter le confinement en Asie du Nord-Est et à Singapour, comme la gestion chinoise de la fermeture de Wuhan avant de rouvrir la mégapole, ont une forte pertinence pour une réflexion sur la sortie du confinement en Europe (…) Les recettes magiques n’existent pas, mais certains ingrédients, combinés, ont permis d’éviter le confinement."
Anticipation, mesures strictes et bonne gestion du matériel
Parmi les enseignements à retenir, les trois rédacteurs de cette note, spécialistes de l'Asie, citent "une mise en application stricte de la quarantaine comme alternative au confinement", "l’enjeu d’une maîtrise de l’approvisionnement en matériel médical stratégique pour la gestion de la crise", et "le rôle des masques comme première ligne de défense contre les maladies respiratoires infectieuses". Les rédacteurs citent également "l’importance d’une activation précoce de procédures standardisées, afin d’acquérir une intelligence précise de la contagion, d’évaluer la menace et de mobiliser les ressources nationales" et "la nécessité de penser stratégiquement l’après-crise pour minimiser les séquelles économiques de cette pandémie."
Des outils numériques plus ou moins intrusifs
Sixième enseignement à retenir, d'après l'Institut Montaigne, "les opportunités offertes par des outils numériques adossés à des garde-fous démocratiques". "D'un État à l'autre, ces outils servent des objectifs variés et présentent des fonctionnalités différentes. Trois utilisations principales ont émergé : le traçage numérique (tracing), qui sert à identifier les chaînes de transmission passées ; le suivi numérique (tracking), qui permet une surveillance en temps réel des individus placés en quarantaine et un contrôle des autres formes d'isolement forcé ; et la cartographie de la contamination".
Ces fonctionnalités sont utilisées avec différents niveaux "d'intrusion dans l'accès aux données". Dans la "fourchette basse" du niveau d’intrusion, on trouve des services rendus aux individus qui peuvent être intégrés dans des applications de messagerie gratuite, comme Line au Japon et à Taïwan. Les utilisateurs interagissent alors avec un serveur pour évaluer la nature de leurs symptômes et sont informés de la situation pandémique. Taïwan a utilisé une plateforme numérique pour mettre en place un système nationalisé de distribution de masques.
Niveau supérieur de l'intrusion, en Chine, les utilisateurs de la messagerie Wechat peuvent accéder à une plateforme de "détecteur de contact étroit" qui permet de consulter les interactions sociales d'un maximum de trois personnes (par numéro de téléphone portable). Ce "contact tracing" interagit avec une base de données qui compile des informations fournies par différentes administrations. L’objectif est double : offrir au gouvernement une vue d'ensemble précise afin d'optimiser les réponses politiques mais aussi cibler les efforts sur les patients individuels et les personnes contacts.
Une lutte contre l'épidémie hautement technologique
Plusieurs pays d'Asie orientale s’appuient sur des outils numériques pour faire appliquer les quarantaines de 14 jours. L'État taiwanais fournit des smartphones aux individus placés en quarantaine tandis qu'Hong Kong impose un bracelet électronique connecté à tous les voyageurs entrants.
L'Institut Montaigne souligne que les débats sur la protection de la vie privée et des données personnelles se cristallisent autour de la divulgation publique de ces informations personnelles. Le gouvernement coréen qui publiait des informations anonymisées sur les cas confirmés, a dû mettre en place des directives empêchant la divulgation (par les autorités locales ou des initiatives privées) d'informations privées comme le nom de l’employeur ou l’adresse postale des malades. Le "tableau de bord interactif" conçu à Hong Kong, recense par exemple tous les cas confirmés sur une carte, il fournit des informations statistiques sur l'épidémie mais diffuse également des informations sur la chronologie et les lieux visités par les individus contaminés.
De son côté, Singapour a développé l'application TraceTogether. Fonctionnant sur la base du consentement des utilisateurs, elle utilise la technologie Bluetooth pour identifier et enregistrer les téléphones situés à proximité. Si un cas de Covid-19 est confirmé, le téléchargement des données vers un serveur devient obligatoire.
Le Japon, pays le plus vigilant au respect de la vie privée
Parmi tous les cas étudiés par l'Institut Montaigne, c'est le Japon qui présente l'approche la plus stricte de protection de la vie privée, adossée à des principes contraignants qui agissent comme des gardes-fous légaux. Les fonctionnalités de la messagerie Line ne collectent des données que sur la base du volontariat et il n'y a pas d'accès à la liste des contacts enregistrés. Mais fin mars, une étape a été franchie par le gouvernement qui a demandé aux opérateurs de téléphonie mobile et aux plateformes internet de lui fournir des données anonymisées, en vue de l'identification précoce des foyers de contagion.
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