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"Tout le monde se fiche de nous" : en Grèce, les migrants du camp de Lesbos se disent abandonnés après l'incendie qui a détruit leurs habitations

Le feu a entièrement détruit le camp de Moria où vivaient 12 000 personnes. La plupart des réfugiés ont fui. Ceux qui restent cherchent de quoi survivre dans les cendres malgré l'hostilité grandissante des villageois.

Article rédigé par franceinfo - Marie-Pierre Vérot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un groupe de réfugiés somaliens, rares occupants du camp de Moria à ne pas avoir encore fui, le jeudi 10 septembre 2020. (MARIE PIERRE VEROT / RADIO FRANCE)

Une immense scène de désolation en noir et gris, comme un paysage de fin du monde. Rien ne reste du camp de Moria, sauf les barbelés, deux jours après l'incendie qui a détruit le site où vivait 12 000 personnes. Tous les migrants ont fui à part un groupe de Somaliens qui a trouvé refuge sous quelques arbres. Mohamed se souvient de cette terrible nuit : "C'était un feu énorme qui a pris dans chaque coin du camp. Les gens criaient, ils fuyaient leurs tentes."

Ce que l'on a vu, c'est le feu de l'enfer. On ne pouvait même pas apercevoir le ciel.

Mohammed, réfugié du camp de Moria

à franceinfo

Les containers où pouvaient s'abriter les migrants, les tentes, les cahutes où les migrants avaient improvisé des écoles ou des salons de thé, tout est calciné. Les squelettes noircis des oliviers maudissent le ciel et cette odeur de cendre. Le feu couve encore là où des milliers de réfugiés s'entassaient dans la plus grande promiscuité. Seul le vrombissement incessant des hélicoptères qui vient éteindre les derniers feux brise le silence.

Le camp de réfugiés de Lesbos (Grèce), détruit par un incendie le mercredi 9 septembre. (MARIE PIERRE VEROT / RADIO FRANCE)

Certains, comme Hussein, ont pu sauver leurs papiers d'identité, le bien le plus précieux, mais rien pour s'abriter. Rien non plus à se mettre sous la dent. "Tout le monde se fiche de nous. Nous sommes ici depuis deux jours".

Il n'y a rien à manger, aucune organisation n'est là. Même la police se fiche de nous.

Hussein, réfugié de Moria

à franceinfo

"Vous voyez, on essaie d'aller dans les ruines chercher des choses qui n'auraient pas brûlé, nous lance Hussein. Et on essaie de cuisiner quelque chose parce qu'il n'y a rien, pas de nourriture, pas d'eau, rien." Il a pu récupérer un vague réchaud calciné, trouver quelques paquets de riz dans un container miraculeusement préservé. À peine commence-t-il à faire chauffer un peu d'eau que deux grecs en colère lui crient d'arrêter. "Pas de cuisine, pas de réchaud !"

L'exode des migrants du camps de Moria sur l'île grecque de Lesbos, le jeudi 10 septembre 2020. (MARIE PIERRE VEROT / RADIO FRANCE)

Les autres réfugiés ont entamé, par milliers, un grand exode. Sur les routes s'étirent des lignes sans fin de femmes avec leurs bébés, d'hommes serrant un maigre baluchon ou poussant des charrettes d'enfants portant des citernes d'eau plus grandes qu'eux. Il y a aussi des vieillards, comme cette vieille dame, le visage émacié, courbée, qui ne peut plus avancer et que son fils tente d'installer sur une bicyclette. Des images de misère de notre temps. 

L'appel à l'aide et l’exode des réfugiés de Lesbos : le reportage de Marie Pierre Vérot en Grèce

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