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Pass sanitaire, obligation vaccinale : l'avocat Patrice Spinosi "ne voit pas" le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel "chambouler" le dispositif gouvernemental

L'avocat reconnaît qu'il y a "certainement une atteinte à nos libertés individuelles" mais les plus hautes juridictions du pays pourraient y trouver des "raisons suffisantes", selon lui. 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
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Patrice Spinosi, en décembre 2017.  (ERIC PIERMONT / AFP)

Alors qu'environ 20 000 Français ont défilé mercredi 14 juillet contre l'extension du  pass sanitaire et l'obligation vaccinale pour le personnel en contact avec des personne vulnérables, Maître Patrice Spinosi, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, spécialiste des libertés individuelles, "ne voit pas" le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel, "chambouler les propositions qui ont été faites par le gouvernement". L'avant-projet de loi a été dévoilé mercredi et il contient plusieurs dispositions, notamment l'obligation d'isolement si vous êtes testé positif au Covid-19

franceinfo : les mesures décidées par le gouvernement sont-elles vraiment une atteinte aux libertés ?

Patrice Spinosi : On est certainement face à une atteinte à nos libertés individuelles. Il n'y a pas de doute. Atteinte aux libertés de la personne, le droit sur son propre corps de décider de ne pas se faire vacciner, atteinte potentiellement future à notre liberté d'aller et de venir. D'autres invoquent l'idée d'une rupture d'égalité entre les vaccinés, les non-vaccinés. Que l'atteinte soit là, elle est certaine. Mais la question qui va se poser devant les juridictions, qu'il s'agisse du Conseil constitutionnel ou du Conseil d'État, c'est : est-ce que cette atteinte est justifiée ? Est-ce qu'il y a des raisons suffisantes et suffisamment importantes pour que collectivement, nous devions subir cette atteinte ? Et c'est ça la question qui s'est posée pendant tout le temps de l'état sanitaire. Et c'est la question qui va se poser aux juges lorsqu'ils seront saisis.

Est-ce que cette atteinte est proportionnée ?

Malgré toutes les mesures qui ont pu être prises pendant tout le temps de l'état d'urgence sanitaire, le Conseil d'État ou Conseil constitutionnel, quand ils ont été saisis, n'ont jamais remis en cause le principe même des choix du gouvernement. Je ne vois pas le Conseil d'État dans son avis ni le Conseil constitutionnel lorsqu'il devra connaître cette loi nouvelle, chambouler les propositions qui ont été faites par le gouvernement. Que l'on ait des précisions qui puissent être apportées, des réserves d'interprétation à la marge des dispositifs, peut-être. Que derrière, il y ait une grande décision qui vienne censurer le principe même de l'obligation de se vacciner pour les soignants et de l'extension du pass sanitaire pour l'ensemble de la population, à titre personnel, je n'y crois pas du tout.

La vaccination obligatoire pour tout le monde est-elle une mesure réaliste ?

Je ne le crois pas. Mais surtout, il faut bien comprendre que cela n'est pas le cas. Il faut bien distinguer l'obligation vaccinale pour les soignants qui est une véritable obligation de se vacciner, mais qui existe d'abord pour d'autres vaccins. L'obligation vaccinale existe pour les soignants depuis fort longtemps. Elle existe pour les enfants, de la même manière, depuis assez longtemps. Elle a été validée par les différentes juridictions françaises, mais aussi par la Cour européenne des droits de l'homme dernièrement dans une décision importante.

Il faut bien distinguer cette obligation de l'extension du pass sanitaire. L'extension du pass sanitaire, ce n'est pas l'obligation de se faire vacciner et c'est ce qui semble assez entretenu par les personnes qui y sont hostiles. Il faut bien comprendre que pour bénéficier d'un pass sanitaire, soit on est vacciné, soit on a un test négatif qui peut être un test PCR, mais aussi un test antigénique de moins de 48 heures. Et on a vu aujourd'hui qu'il était quand même assez simple de faire un test antigénique. Vous avez un résultat au bout de cinq minutes et à partir de ce moment-là, vous avez la possibilité d'aller au restaurant ou d'aller dans le train que vous souhaitiez prendre.

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