Vaccination contre le Covid-19 : pourquoi la campagne pour la dose de rappel n'est pas aussi rapide qu'espéré
"Moins d'une personne éligible sur deux a reçu sa dose de rappel", a déclaré vendredi le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal.
Des chiffres qui semblent bas, au premier abord. "Parmi les 65 ans et plus, 19,8% avaient reçu une dose de rappel" de vaccin contre le Covid-19 au 2 novembre, constate Santé publique France dans son point épidémiologique, publié jeudi 4 novembre. Soit à peine une personne sur cinq. Une proportion qui avoisine les 50% si l'on prend en compte le délai de six mois à respecter entre la vaccinaton complète et la dose de rappel.
Si le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a salué, vendredi, une "progression encourageante" de la campagne de rappel vaccinal, l'exécutif la juge encore insuffisante. A tel point qu'Emmanuel Macron, qui doit s'adresser aux Français mardi à 20 heures, pourrait faire des annonces à ce sujet. Sont notamment concernées les personnes âgées de plus de 65 ans et celles atteintes de comorbidités à risque de formes graves, comme l'a recommandé la Haute Autorité de santé le 24 août. Qu'est-ce qui explique ce démarrage un peu lent de la dose de rappel ? Eléments de réponse.
Parce qu'il faut attendre six mois après la deuxième dose (sauf exceptions)
Première explication : bon nombre de personnes concernées par cette dose de rappel n'y ont pas encore droit, tout simplement parce que c'est trop tôt. Elles doivent en effet attendre que six mois se soient écoulés après la deuxième injection de vaccin pour pouvoir bénéficier de la dose de rappel, qui est souvent une troisième dose (sauf dans les cas particuliers des personnes immunodéprimées, des patients vaccinés avec le vaccin unidose Janssen ou des personnes considérées comme vaccinées avec une seule dose parce qu'elles avaient contracté le Covid-19 auparavant).
Or il faut rappeler que la campagne de vaccination ne s'est réellement accélérée qu'à partir de mai-juin. Certes, les personnes âgées étaient prioritaires, mais elles n'ont pas pu toutes être complétement vaccinées au printemps.
A la date du 1er mai 2021, seuls 37% des 65 ans et plus, soit 5 millions de personnes, bénéficiaient, en effet, d'une vaccination complète. C'est cette tranche de la population, à laquelle il faut ajouter les patients atteints de comorbidités à risques graves, qui est désormais concernée par la dose de rappel. Selon la Direction générale de la santé, "à la date du 3 novembre, 3,4 millions de personnes ont fait leur rappel, soit 48% de la population éligible à sept mois".
En ce qui concerne les résidents des Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) ou d'unités de soins de longue durée, ils étaient 51,4% à avoir reçu une dose de rappel le 2 novembre, selon Santé publique France.
Parce que la population est encore attentiste
Autre facteur qui joue : bien que le nombre de contaminations remonte en flèche dans plusieurs pays d'Europe, à commencer par l'Allemagne ou la Belgique, voisines de la France, les citoyens vaccinés ne sont pas, ou pas encore, inquiets de la reprise de l'épidémie. "Une partie non négligeable des personnes âgées ou à risque ont déjà fait leur troisième dose mais d'autres attendent encore", déclare à franceinfo le médecin généraliste Jacques Battistoni, également président du syndicat de généralistes MG France.
"Certains patients vaccinés estiment qu'ils n'ont pas trop besoin pour l'instant de la dose de rappel. Ils attendent le jour où il y aura une remontée significative des contaminations, un taux d'incidence plus élevé, et à ce moment-là, ils reviendront vite."
Jacques Battistoni, président du syndicat de médecins généralistes MG Franceà franceinfo
Le médecin généraliste souligne que ces patients n'ont pas, a priori, de réticence forte contre une dose de rappel, puisqu'ils se sont déjà fait vacciner. Mais rappelle aussi qu'il existe toujours des gens âgés qui n'ont reçu aucune dose de vaccin. Paradoxalement, souligne-t-il, "les plus de 80 ans sont moins vaccinés que la tranche d'âge précédente. Ils s'estiment à l'abri du danger car ils s'autoconfinent." Près de 93% des 65-74 ans sont totalement vaccinés, contre 89% des 75 ans et plus. "Ils me disent : 'Mais moi, je ne cours aucun risque, je ne vois personne', ce qui serre le cœur. Et ce raisonnement-là, c'est dur à changer."
Parce que l'information n'est pas toujours bien passée
Enfin, comme toujours, l'information ne passe que partiellement, malgré les campagnes de communication. "Les gens s'interrogent sur le fait de savoir s'ils doivent faire la troisième dose. Mais ils s'interrogent aussi sur le délai entre la deuxième et la troisième dose. Ils n'ont pas forcément retenu et compris l'histoire des six mois", rapporte encore Jacques Battistoni.
Pour que les généralistes puissent conseiller au mieux leur patientèle, la Sécurité sociale va fournir aux praticiens la liste de leurs patients avec la date de leur vaccination et la date où devient possible la dose de rappel. "C'est un service d'Ameli aux médecins généralistes, qui est en phase de test, en voie de finalisation, explique Jacques Battistoni. Cette liste nous permettra d'appeler nos patients lorsqu'ils sont éligibles à la troisième dose, et d'en parler avec eux". Alors que le nombre de centres de vaccination diminue, les médecins généralistes constituent en effet l'un des principaux pivots de cette campagne de rappel.
La Sécurité sociale a confirmé à franceinfo qu'elle travaillait à ce fichier, qui sera mis à disposition des médecins. Elle affirme également avoir envoyé à "8,2 millions de personnes âgées de 65 ans et plus, vaccinées ou non, un courrier ou un e-mail courant septembre", pour les informer de cette dose de rappel à effectuer, ou pour les inciter à se faire vacciner si ce n'est pas encore fait.
Par ailleurs, écrit-elle à franceinfo, "plus de 15 millions de bons de vaccination contre la grippe" ont été envoyés "aux personnes concernées, notamment les plus de 65 ans". A ces bons est joint un courrier rappelant qu'il est "tout à fait possible" de recevoir le vaccin contre la grippe en même temps que la dose de rappel contre le Covid-19, conformément aux recommandations de la Haute Autorité de santé.
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