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Le kétoprofène et l'ibuprofène sont utiles mais "il faut les utiliser à bon escient", estime un médecin

Les deux médicaments anti-inflammatoires pourraient favoriser des complications infectieuses graves, selon l'Agence nationale de sécurité du médicament. La prise de ces médicaments va "retarder le diagnostic" si le patient a déjà une infection bactérienne, a réagi le docteur Philippe Vella sur franceinfo. 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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L'Ibuprofrène pourrait favoriser des complications infectieuses graves.  (SOIZIC BOUR / RADIO FRANCE)

Kétoprofène et ibuprofène, les deux médicaments anti-inflammatoires les plus vendus, pourraient favoriser des complications infectieuses graves, selon l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) du médicament qui appelle ce jeudi à la "vigilance". Selon les résultats d'une enquête, en 18 ans, de 2000 à 2018, 32 décès ont été répertoriés pour l'ibuprofène et 46 cas dont dix décès avec le kétoprofène. 

"Ces deux médicaments sont des médicaments efficaces, utiles, largement utilisés, mais ça reste des médicaments qu'il faut utiliser à bon escient", a expliqué jeudi 18 avril sur franceinfo le docteur Philippe Vella, directeur des médicaments antalgiques à l'ANSM. Le médecin souligne que "la prise de ces médicaments va retarder l'apparition des symptômes" dans le cas d'une "infection sous-jacente bactérienne qui ne s'est pas encore exprimée".

franceinfo : Qu'est-ce qui vous conduit à appeler à la vigilance autour de ces deux médicaments ?

Philippe Vella : C'est une enquête que nous avions demandé de réaliser aux centres régionaux de pharmacovigilance de Tours et de Marseille. Le résultat de cette enquête met en évidence une relation possible entre la prise de ces médicaments et l'apparition de complications infectieuses graves. Ces complications sont essentiellement pulmonaires, cutanées, neurologiques graves, qui peuvent aller jusqu'au décès. L'enquête porte sur les années 2000 à 2018. Sur l'ensemble des deux médicaments, ibuprofène et kétoprofène, on a recensé 386 cas d'infections graves, de complications infectieuses graves, qui pourraient être liées justement à la prise de ces médicaments.

Qui sont les personnes qui sont touchées par ces complications ? Est-ce qu'il y a un public plus vulnérable ?

Les cas qui ont été retenus dans l'enquête de pharmacovigilance étaient des signalements qui ont été observés chez des patients qui ne présentaient pas d'autres pathologies qui auraient pu favoriser ces infections. Et donc c'étaient des personnes saines qui avaient des infections banales - une otite, une angine, une plaie cutanée, une lésion cutanée - qui, après, avoir pris des anti-inflammatoires, se sont aggravées et ont évolué de façon grave.

Est ce qu'on peut avoir des complications dans tous les cas, ou est ce qu'il s'agit de traitements de longue durée ?

Non, il s'agit de complications qui sont observées dans certaines situations. En fait ce sont des situations qui peuvent être banales mais qui sont rencontrées chez des patients qui présentent une infection sous-jacente bactérienne qui ne s'est pas encore exprimée. La prise de ces médicaments va retarder l'apparition des symptômes, va retarder le diagnostic et va faire en sorte que la prise en charge adéquate sera retardée. On s'inquiète quand les symptômes pour lesquels on a pris le médicament se majorent, par exemple, si on les a pris pour la toux ou pour une plaie cutanée. Si on voit que la toux se majore, qu'il y a d'autres symptômes qui apparaissent, à ce moment-là, on arrête le traitement par ces anti-inflammatoires et on va consulter son médecin.

Est-ce qu'il ne faut plus utiliser les médicaments de ces deux familles ?

Non absolument pas. Ces deux médicaments sont des médicaments efficaces, utiles, largement utilisés, mais ça reste des médicaments qu'il faut utiliser à bon escient. Pour des patients qui présenteraient des symptômes banals, une fièvre ou des douleurs modérées, le premier conseil c'est de dire qu'il faut commencer par se traiter par du paracétamol. Si on doit avoir recours à ces anti-inflammatoires, il faut en parler à son pharmacien. C'est le pharmacien qui va orienter et qui va dire s'il est légitime de les prendre ou non. Et si on prend ces médicaments, il y a des règles à respecter : commencer par la dose la plus faible, ne pas les prendre plus de trois jours si on avait de la fièvre, plus de cinq jours si on avait des douleurs. Et si les symptômes s'aggravent ou si les symptômes persistent, il faut arrêter ces traitements.

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