Mort d'une fillette atteinte de la tuberculose en Bretagne : "C'est un cas extrêmement rare"
Franceinfo a interrogé Hector Aranda Grau, médecin du service Veille et sécurité sanitaire au sein de l'Agence régionale de santé (ARS) de Bretagne, pour comprendre comment une enfant de 4 ans a pu succomber à la tuberculose.
Ce fut un fléau pendant de nombreuses années. La tuberculose refait parler d'elle, ces derniers jours. Une fillette de 4 ans, habitant près de Dinan (Côtes-d'Armor), a succombé à la forme méningée de la maladie, relate Ouest-France dans un article publié mardi 14 février. Une campagne de dépistage a immédiatement été lancée dans son école maternelle pour éviter toute contamination.
Pour comprendre ce qui a pu se produire, franceinfo a interrogé le Dr Hector Aranda Grau, médecin du service Veille et sécurité sanitaires au sein de l'Agence régionale de santé (ARS) de Bretagne, qui a suivi le dossier de l'enfant.
Franceinfo : Pour commencer, qu'est-ce qu'une méningite tuberculeuse et comment l'attrape-t-on ?
Dr Hector Aranda Grau : C'est une localisation méningée du bacille tuberculeux. Généralement, la tuberculose est une maladie pulmonaire, mais parfois, elle se localise dans d'autres organes. Cela peut donner lieu à des tuberculoses osseuses, méningées ou ganglionnaires. La tuberculose se transmet par l'air, via la toux et la projection de petites gouttelettes de salive contaminée. La contagion se produit dans le proche environnement. Les tuberculoses pulmonaires sont les seules transmissibles.
Comment détecte-t-on cette maladie et comment fonctionne-t-elle ?
Les signes généralement associés à la tuberculose consistent essentiellement en une fièvre, qui se poursuit pendant des semaines, sans cause définie, avec des atteintes respiratoires. Une personne qui tousse pendant plus d'un mois avec une forte fièvre, surtout nocturne, passe par un dépistage.
Vous pouvez être infecté par le bacille de Koch [la bactérie responsable de la maladie], mais cette infection peut rester latente pendant de nombreuses années. Et elle se réactive en fonction d'une déficience immunitaire. C'est pour cela qu'elle est liée aux patients atteints du VIH, lorsqu'il n'est pas contrôlé.
Il y a 2 000 millions de personnes infectées dans le monde, mais la maladie ne représente que 1% de toutes les infections. C'est ce qu'on appelle une infection tuberculeuse latente. Ce qu'on voit en France, ce sont donc surtout des personnes âgées, qui ont connu une infection quand elles étaient jeunes, entre les années 1940 et 1960, à un moment où il y avait beaucoup de personnes "bacillifères".
Comment la fillette a-t-elle pu succomber à cette maladie sachant qu'il existe des traitements connus ?
Ça a été un enchaînement de malchance. Le diagnostic a été très tardif. Généralement, on le pose quand il y a une forte suspicion par la clinique ou des antécédents épidémiologiques. Mais là, on a assisté à un recours spontané aux soins de la part des parents. Elle présentait des signes pas du tout orientatifs et plutôt neurologiques. La recherche s'est fait tard. Du coup, il y avait une atteinte méningée importante, qui a provoqué la mort.
Un tel résultat d'infection tuberculeuse est extrêmement rare. D'abord parce qu'en France, seulement 7% des tuberculoses que nous voyons touchent les enfants de moins de 15 ans. Et puis, parmi les formes cliniques, la tuberculose méningée est très peu fréquente : elle ne représente que 5 à 7% des formes extra-pulmonaires. Normalement, il s'agit plutôt d'une atteinte pulmonaire avec des signes bien identifiables. Et on n'est pas censé en mourir. Il y a très peu de décès par tuberculose en France.
Qu'en est-il du vaccin BCG ? Il est censé protéger les enfants de la tuberculose...
Alors : oui et non. En fait, les enfants étaient systématiquement vaccinés en France jusque dans les années 1990. Mais depuis, on ne l'a gardé que dans des régions à haute incidence, comme l'Ile-de-France ou la zone autour de Marseille. Il n'est plus systématique ailleurs car c'est un vaccin qui n'est efficace qu'à 60% et qui, comme tous les vaccins à organisme vivant non atténué, peut engendrer des effets non désirés, comme des allergies.
Une fois que le diagnostic est posé, quels sont les traitements disponibles ?
On met en place des actions individuelles, à l'échelle du patient, et collectives. On cherche à bloquer la transmission dans l'entourage immédiat du patient. Par exemple, dans le cas de la fillette, une centaine de personnes vont être dépistées, dont les enfants et le personnel de son école, sa famille, son assistante maternelle. On regarde s'il y a des symptômes et on fait aussi une radio du thorax. Après, le traitement est assez classique, à base d'antibiotiques. Mais il est assez long car le bacille de Koch est difficile à éradiquer. Le traitement dure au minimum un mois, parfois plus longtemps.
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