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Perturbateurs endocriniens : pourquoi la Commission européenne rechigne à les définir ?

Le flou qui entoure la définition des perturbateurs endocriniens à la Commission européenne bloque la réglementation autour des produits qui en contiennent. Pourtant, pour les scientifiques, les choses sont claires. Dans un article, sept d’entre eux condamnent l’immobilisme des autorités européennes.
Article rédigé par La rédaction d'Allodocteurs.fr
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Définir un perturbateur endocrinien n’est pas si compliqué, à en croire un groupe de sept scientifiques internationaux, auteurs d’un article critique publié le 25 avril dans la revue scientifique spécialisée Environmental Health Perspectives. Un vrai consensus scientifique existe autour de ces substances. L’OMS les définit d'ailleurs depuis 2002 comme des substances (ou mélange de substances) qui modifie les fonctions du système hormonal et qui ont, en conséquence, des effets nocifs sur la santé, ou la descendance des individus, des populations ou de sous-groupes de population.

La Commission européenne, pourtant, n’en finit pas de tergiverser et ne se prononce toujours pas sur une définition officielle. Résultat : la réglementation et les décisions qui devraient en découler sont entravées. "La Commission, en ne respectant pas ses obligations légales, retarde l'application de deux lois votées par le Parlement européen sur les pesticides (insecticides, herbicides, fongicides) et les biocides (désinfectants industriels, produits contre les nuisibles ou de protection du bois ou du cuir...) contenant des perturbateurs endocriniens", explique Rémy Slama, épidémiologiste environnemental à l’Inserm et coauteur de l’article.

La Commission a été condamnée en décembre 2015 par la Cour européenne de justice pour ne pas avoir fourni cette définition attendue au plus tard fin 2013. L'instance a d'ailleurs été tancée en mars par les 28 ministres de l'Environnement de l'Union Européenne. " Mais la Cour européenne de justice ne dispose pas de véritables mesures de rétorsion. Ce que nous craignons vraiment, c’est l’adoption d’une définition très complexe des perturbateurs endocriniens qui donnerait lieu à de nouvelles études scientifiques ", précise l’épidémiologiste à Allodocteurs.fr. 

Faux prétextes scientifiques, vraies pressions de lobbies

Ces études à n’en plus finir sont inutiles pour les scientifiques. La méthode de définition simple utilisée pour les substances cancérogènes suffirait pour établir la définition des perturbateurs endocriniens, assurent-ils, critiquant la Commission européenne pour ne pas avoir réussi à fournir cette définition depuis 2013, sous de mauvais prétextes. Les chercheurs retiennent la classification en trois catégories, comme pour les substances cancérogènes: perturbateurs endocriniens certains, suspectés et "substances endocrinement actives" qui peuvent modifier le système hormonal mais sans certitude qu'elles aient un effet nocif sur la santé.

"Cela suffit à définir le danger, et il n'est pas nécessaire, pour établir la définition, de faire au préalable des études d'impact [des études destinées à mesurer les conséquences en termes de nombre de cas de maladies occasionnés, et le retentissement économique de la réglementation]. Ce serait mettre la charrue avant les boeufs" continue Rémy Slama.

" Il est certain que ce  ne sont pas des préoccupations sanitaires qui expliquent le blocage de la situation », affirme le scientifique à Allodocteurs.fr. «Il est en revanche très probable que l’explication soit à chercher du côté de la menace des intérêts économiques de certains industriels par les projets de loi  sur les pesticides et les biocides. Ces lois sont plus protectrices pour la santé que les lois précédentes, et menacent la commercialisation de block-busters. Forcément, ils déplaisent  aux lobbies qui exercent des pressions directs et indirects sur les décisionnaires. "

Dans l'UE, les coûts qui résultent des effets sur la santé de l'exposition aux perturbateurs endocriniens (PE) sont estimés entre 100 et 200 milliards d'euros par an, selon une étude internationale de 2015.

La Commission a promis de publier cette définition d'ici l'été 2016, mais rien ne laisse espérer  que l'issue soit favorable au bon sens des scientifiques.

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