Dépistage du Sida gratuit : "Tout le monde" devrait "faire au moins une fois dans sa vie un test de dépistage du VIH", selon la directrice de Sidaction
Une mesure du projet de Financement de la sécurité sociale, examiné ce lundi 11 octobre à l'Assemblée nationale, propose de rendre le test de dépistage du VIH gratuit, en laboratoire. Une expérimentation déjà menée à Paris et dans la région Paca.
"Faites un dépistage au moins une fois dans votre vie", martèle la directrice générale de Sidaction, Florence Thune, sur franceinfo ce lundi 11 octobre. "Tout le monde", hétérosexuels, homosexuels, jeunes ou seniors, devraient "faire un test de dépistage du VIH", insiste-t-elle alors que depuis deux ans un dispositif permettant de se tester gratuitement, est expérimenté à Paris et dans les Alpes-Maritimes. Le nom de ce dispositif : "Au labo sans ordo". L'idée du projet de loi est de le généraliser. C'est ce que prévoit l'une des mesures du projet de loi de Financement de la sécurité sociale qui arrive en commission à l'Assemblée nationale ce lundi. En 2019, six millions de tests VIH ont été réalisés en laboratoire.
franceinfo : Est-ce une bonne nouvelle cette généralisation prévue ?
Florence Thune : Oui, c’est une bonne nouvelle. Il ne faut pas oublier qu'à cause de la crise sanitaire, le dépistage a diminué de 14% en 2020. Donc, c'est vraiment une bonne nouvelle parce que ça va nous permettre de contribuer à augmenter cette couverture du dépistage du VIH, parce que c'est un vrai enjeu pour les personnes séropositives.
1,2 à 2 fois plus de découvertes de séropositivité que pour des tests qui étaient prescrits sur ordonnance
Florence Thune
Quel bilan dressez-vous après deux ans d'expérimentation à Paris et dans les Alpes-Maritimes ?
Ce qu'on a pu voir durant l'expérience qui a duré 18 mois, c'est notamment pour les hommes hétérosexuels, une façon de découvrir plus rapidement leur séropositivité, puisqu'on a pu voir que, pour cette population, on avait vraiment plus d'occasions de découvrir leur séropositivité sur les deux départements. On a eu globalement de 1,2 à 2 fois plus de découvertes de séropositivité que pour des tests qui étaient prescrits sur ordonnance. Donc, on voit que pour une certaine catégorie de la population qui ne va pas forcément passer par son médecin traitant, obtenir une ordonnance, on voit que c'est un accès plus facile à un test VIH et donc avoir des informations sur sa santé, avoir accès aux traitements et pouvoir éviter de transmettre le virus. Et c'est une initiative aussi intéressante pour des personnes qui vont être plus éloignées du soin. Et et là, il suffit d'aller dans un labo et avoir sa carte Vitale et demander un test.
Combien de personnes découvrent leur séropositivité en France chaque année ?
On avait un chiffre qui allait jusqu'à environ entre 5 000 et 6 000 personnes qui découvraient leur séropositivité. On a eu des chiffres plus récents sur 2020. On est passé en dessous de 5 000, mais vous savez à quel point l'année 2020 a été compliquée. Le dépistage lui-même a baissé. Donc, on prend vraiment cette baisse avec beaucoup de prudence parce qu'elle n'est pas forcément le reflet du nombre d'infections. Mais de manière générale, ce qu'il faut rappeler, c'est "faites au moins un dépistage une fois dans votre vie". Et là, on est loin du compte. Ce dispositif va permettre de toucher une population plus large, qu'on soit hétérosexuel ou homosexuel, qu'on soit jeune ou moins jeune. Et je voudrais rappeler à cette occasion que de nouveau sur ces découvertes de séropositivité on a plus de 20% de personnes de plus de 50 ans. Donc on parle souvent des jeunes sans parler des personnes plus âgées. Tout le monde est concerné aujourd'hui par le fait de se dire "et si j’allais faire un test de dépistage du VIH !"
On a un retard au diagnostic très élevé en France ? Il peut atteindre quatre ans ?
Oui, tout à fait, et ça concerne notamment les hommes hétérosexuels et les usagers de drogues qui ont un délai trop important entre le moment où ils sont affectés et le moment où ils apprennent leur séropositivité. Et on sait que durant ce laps de temps, ça veut dire qu'effectivement, leur santé est en danger même s'ils n'ont pas accès aux traitements et en plus, ils peuvent transmettre le virus. Ça, c'est vraiment un délai qu'on essaie de réduire et qu'on ne parvient pas à réduire, en tout cas pour ces populations là depuis plusieurs années. Donc, cette initiative pour "Aller au labo sans ordo" est une chance supplémentaire de réduire ce délai. On sait aujourd'hui à quel point les progrès médicaux ont permis d'avoir accès à des traitements qui permettent aux personnes de rester en bonne santé et de contrôler vraiment le virus pour qu’il ne se développe plus. Et en plus, il y a un effet préventif qui fait qu'une fois qu'on est sous traitement on ne peut plus transmettre le virus à ses partenaires sexuels. Et ça, c'est une telle avancée que c'est vraiment important de pouvoir faire en sorte que chacun puisse en bénéficier. Et c'est aussi de cette façon que, au fur à mesure des années, on arrivera à contrôler globalement l'épidémie au niveau national ou au niveau mondial.
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