Vaccin thérapeutique contre le cancer du poumon : cela "ouvre vraiment de grands espoirs", assure un cancérologue

Fabrice Barlesi, le directeur général de l'institut anti-cancer Gustave Roussy à Villejuif, estime que le vaccin thérapeutique pourrait être efficace sur d'autres cancers.
Article rédigé par franceinfo
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Un laboratoire français, en Alsace, travaillant au développement d'un vaccin contre le cancer, en novembre 2021. Photo d'illustration. (PATRICK HERTZOG / AFP)

Cela "ouvre vraiment de grandes portes et de grands espoirs pour l'ensemble de nos patients vivant avec le cancer", a estimé mardi 12 septembre sur franceinfo Fabrice Barlesi, directeur général de l'institut Gustave Roussy et spécialiste du cancer du poumon alors qu’un vaccin thérapeutique a prouvé son efficacité pour lutter contre cette forme de cancer. Plus de 44% des patients étaient toujours en vie après avoir pris ce traitement proposé par la société française Ose Immunotherapeutics, selon les résultats d'un essai clinique publiés dans la revue Annals of Oncology. Cette thérapie pourrait être efficace sur d’autres cancers, notamment celui de la peau et du pancréas. "Il y a fort à parier que nous aurons des résultats dans ces maladies dans les mois à venir et les années à venir", dit-il.

franceinfo : Ces résultats très encourageants sont une bonne nouvelle pour les patients ?

Fabrice Barlesi : On peut déjà se féliciter du fait qu'on ait aujourd'hui une solution thérapeutique nouvelle, innovante, qui sorte d'une biotech française dans un essai conduit par de grands leaders français, dans un centre qui est le premier centre français et européen et le troisième centre mondial. Les patients ont besoin d'innovation. Les patients ont besoin qu'on trouve de nouvelles solutions et c'est exactement ce qui a été fait dans le contexte de cet essai où la manipulation du système immunitaire est difficile. Ce sont des patients qui ont déjà résisté à une première immunothérapie, et cet essai a donné des résultats vraiment encourageants chez un sous-type de patients particulier.

N’y a-t-il pas un risque d’emballement ?

Non, il faut juste être conscient qu'on parle aujourd'hui d'une partie de patients porteurs d'un cancer du poumon, malheureusement, avec une maladie avancée métastatique. D'une partie de patients qui a déjà reçu une chimiothérapie et une immunothérapie et dont la maladie évolue, malgré ces traitements. Chez ces patients, une partie a répondu temporairement à l'immunothérapie et c'est chez eux qu'on a observés les meilleurs résultats. Par ailleurs, un peu comme quand on fait une greffe, on est obligé de regarder des niveaux de compatibilité entre le donneur et le receveur. Il faut identifier un sous-groupe de patients qui est porteur des bonnes caractéristiques biologiques pour répondre au vaccin, ce qu'on appelle le HLA (Human Leukocyte Antigen). C'est à peu près 20 % des patients qui sont porteurs de cette anomalie qui permet d'envisager la réponse au vaccin.

Pourquoi parle-t-on de vaccin ?

Le rôle de l'immunité dans la lutte contre les maladies cancéreuses est quelque chose qui a été évoqué et évalué déjà depuis plusieurs centaines d'années. La perception que le système immunitaire arrivera à éradiquer des maladies cancéreuses était déjà dans nos esprits. Mais la manière de le faire est évidemment extrêmement complexe. On va identifier dans la maladie des anomalies qui sont spécifiques de la maladie et le vaccin va permettre de générer des cellules du système immunitaire spécifiquement dirigées contre ces anomalies et permettre au propre système immunitaire du patient de venir éradiquer les cellules en rapport avec la maladie.

La recherche contre le Covid-19 a-t-elle permis cette avancée ?

Clairement, puisqu'aujourd'hui les vaccins de type ARN messagers sont popularisés par la lutte contre le Covid-19, mais une partie des recherches concernant les ARN messagers ont d'abord été menées dans l'idée que ces vaccins puissent servir dans la lutte contre les pathologies cancéreuses. On a des exemples aujourd'hui, en dehors du cancer du poumon, notamment de certains cancers du pancréas, où des résultats intéressants ont déjà été rapportés. Il y a des résultats extrêmement encourageants qui ont aussi été rapportés dans les mélanomes, une forme de cancer de la peau. De très nombreux essais sont aujourd'hui en cours, à la fois en France, mais aussi au niveau international. Et il y a fort à parier que nous aurons des résultats dans ces maladies dans les mois et les années à venir.

Ce type de thérapie pourrait être généralisé ?

C'est même relativement probable. Il faudra d'abord consolider ces résultats. Aujourd’hui, le nombre d'essais et le nombre de situations dans lesquelles ce type de thérapie a suggéré une efficacité ouvre vraiment de grandes portes et de grands espoirs pour l'ensemble de nos patients vivant avec le cancer.

Il ne s'agit pas de prévenir contre les risques des cancers du poumon, c’est juste un traitement pour l'instant. C’est bien cela ?

C'est un traitement exactement. C'est pour des malades qui sont déjà touchés par la maladie, malheureusement. Mais la prévention est aussi un champ qui est en cours d'exploration et il est possible qu'il y ait des avancées non-négligeables dans ce domaine également dans le futur.

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