Daenerys, Kendji, Neymar... Quand les stars et les personnages de fiction influencent les prénoms des petits Français
Dix-huit petites Daenerys, autant de Pharrell, sept Neymar et soixante-six Kendji : l'état civil français en 2016 a parfois eu des allures de programme télé.
"Khaleesi, Pharrell et Kendji, vous êtes présents ?" Voilà à quoi pourrait ressembler l'appel dans certaines classes françaises d'ici quelques années. Les tendances des prénoms donnés aux enfants évoluent parfois en fonction des héros et des stars préférés des parents. Néanmoins, ce phénomène, qui existe "depuis qu'on ne transmet plus un prénom de famille mais que l'on crée un prénom nouveau à la naissance", ne concerne "qu'une petite partie des gens", décrypte pour franceinfo le sociologue Baptiste Coulmont, auteur de plusieurs livres sur le sujet.
Pour tenter de mesurer cet effet, nous nous sommes plongés dans la base de données des prénoms publiée par l'Insee, lundi 5 février, qui recense tous les prénoms déclarés entre 1900 et 2016 en mairie.
Comme un air de trône de fer
En 2016, la série Game of Thrones semble avoir été une source d'inspiration pour certains parents. Dix-huit fillettes ont été nommées Daenerys, comme le personnage de reine interprété par Emilia Clarke dans la série à succès. Ce prénom est apparu pour la première fois dans les registres de l'état civil en 2012, soit l'année qui a suivi la diffusion de la première saison de la série en France. Et l'hommage rendu au personnage ne s'arrête pas là : le prénom Khaleesi, qui est l'un des nombreux titres portés par Daenerys Targaryen, a été donné 13 fois en 2016. Il est apparu pour la première fois en 2013, avec 10 naissances.
Autre personnage phare de la série, la jeune Arya Stark obtient les faveurs d'un nombre croissant de parents français. Ainsi, 179 petites Arya sont nées en 2016, contre seulement 5 en 2008 lorsque le prénom a été donné pour la première fois. Le fait qu'une œuvre de fiction influe sur le choix des jeunes parents n'est pas inédit : Baptiste Coulmont rappelle ainsi que de nombreux petits Anakin avaient vu le jour dans la foulée de la diffusion de la saga Star Wars.
L'aura des pop stars
Les noms de chanteurs ou chanteuses connus semblent donner des idées à certains parents. Ainsi, les années 2000 puis 2010 ont vu naître plusieurs Britney, Beyoncé et Rihanna. Si cette dernière a connu un certain succès en 2007 et en 2008 (avec respectivement 147 et 164 petites filles nommées comme elle), elle suscite de moins en moins de vocations. En 2016, seules 39 Rihanna ont été déclarées à l'état civil. La chute est encore plus rude pour les Beyoncé, prénom qui n'a plus été choisi par les parents depuis 2012 (3 naissances à l'époque). Le record avait été atteint en 2007 avec 13 naissances.
Côté prénoms masculins, on retrouve Pharrell avec 18 naissances en 2016... Difficile de ne pas y voir un clin d'œil au chanteur américain Pharrell Williams. La tendance semble toutefois à la baisse depuis 2014, année qui a suivi la sortie de son tube Happy : 45 petits garçons avaient alors été prénommés comme lui.
Chez les Français, c'est le chanteur Kendji Girac qui semble faire le bonheur des parents. En 2014, après sa victoire à la troisième saison de The Voice, il avait rencontré un certain succès en mairie, avec 246 naissances. L'effet semble s'être rapidement essoufflé, Kendji tombant à 197 naissances en 2015 et seulement 66 en 2016. Quant à Jul, le rappeur marseillais, le succès rencontré par sa musique ne se traduit pas encore par son équivalent en mairie : on dénombre seulement 13 petits Jul en 2016.
L'appel des dieux du stade
Il faudra attendre l'édition 2017 du fichier des prénoms pour mesurer l'impact du recrutement de Neymar au PSG, mais les fans de foot semblaient déjà rendre hommage à la star brésilienne et son prénom peu commun avant son arrivée. Seize petits garçons ont reçu ce prénom en 2014, vingt en 2015 et 7 en 2016. Autre star du foot mondial, le Suédois Zlatan Ibrahimovic avait suscité un certain engouement après son arrivée à Paris en 2012 : 33 petits Zlatan sont nés en 2013, contre 14 en 2012 et seulement 8 en 2011.
Mais ces stars internationales sont encore loin du phénomène Zidane qui avait parcouru la France dans la foulée de la victoire à la Coupe du monde de 1998. A l'époque, on était passé de 47 jeunes Zinedine avant la victoire à 184 l'année suivante. Son succès se fait plus discret aujourd'hui, avec seulement 51 naissances en 2016.
Les répercussions de l'actualité
Les parents sont-ils aussi influencés par l'actualité, même lorsqu'elle est tragique ? C'est ce que semble montrer les données du prénom Charlie. Alors qu'il était sur une tendance à la hausse depuis quelques années, chez les filles comme chez les garçons, on remarque un coup d'arrêt depuis 2015... et l'attaque meurtrière contre la rédaction de Charlie Hebdo, en janvier, à Paris. On passe ainsi de 741 petits Charlie en 2014 à 338 en 2015, puis à 369 en 2016. Même tendance du côté des fillettes portant ce prénom : il y en a eu 1027 en 2014 puis 618 en 2015 et 786 en 2016.
Pour Baptiste Coulmont, les parents "veulent raconter une histoire qui peut avoir diverses explications" en donnant un prénom à leur enfant. Or, "dans l'exemple de Charlie, il n'y a plus qu'une seule explication hégémonique [l'attentat et la référence à Charlie Hebdo] qui 'pollue' le prénom", avance le sociologue pour expliquer la baisse constatée. Pour chercher un éventuel hommage rendu par les parents, il faudrait, selon lui, étudier les prénoms secondaires, donnés en deuxième position, "qui est un espace utilisé pour raconter l'histoire du couple ou de la famille et qui peut être le lieu où l'on rend hommage".
De la même manière, la mort du petit Aylan, un bébé syrien retrouvé sans vie en septembre 2015 sur une plage turque et dont la photo avait fait le tour du monde, a-t-elle provoqué une onde d'hommages chez certains parents ? Si la tendance était plutôt à la hausse ces dernières années, l'attribution de ce prénom a quasiment doublé entre 2015 (251 naissances) et 2016 (418 naissances). Encore une fois, Baptiste Coulmont appelle à la prudence. Pour en avoir le cœur net, il faudrait des "données plus précises sur les jours et les semaines qui suivent un événement d'actualité".
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