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Promouvoir les femmes premières de cordée : le combat de Marion Poitevin, l'une des rares femmes guides de haute-montagne

Marion Poitevin milite pour plus de mixité dans le milieu professionnel de la montagne, encore très masculin.

Article rédigé par Jérôme Val
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Marion Poitevin à Chamonix, en juin 2016. (GR?GORY YETCHMENIZA / MAXPPP)

"L'année suivant ma grossesse, j'ai perdu 5 000 euros de dotation de matériel", raconte Marion Poitevin, l'une des rares femmes guides de haute montagne en France. Malgré ses diplômes et ses années d’expérience, ses sponsors de l’époque l’ont lâchée quand elle est tombée enceinte, il y a deux ans et demi. Une preuve supplémentaire qu'être sportive de très haut niveau est un chemin semé d’embûches. Première femme à intégrer les secours au sein des CRS de montagne, elle milite depuis pour plus de mixité dans ce milieu, encore largement dominé par les hommes. franceinfo dresse son portrait à l'occasion de la semaine de promotion du sport féminin.

Marion Poitevin se souvient avec amertume des conséquences de sa grossesse dans son métier : "J'ai perdu mes deux sponsors principaux. J'avais 2 500 euros de dotation matériel de chacun, je les ai perdus." La guide professionnelle se remémore les propos qu'on lui avait tenus à l'époque : "L'un de mes sponsors m'a annoncé que comme j'étais enceinte – c'est écrit noir sur blanc dans un mail – il voulait me donner seulement 1 000 euros de dotation, au lieu de 2 500 prévus initialement, parce que je n'allais pas faire grand-chose cette année. Je leur ai dit 'non'. Le team manager, contrarié, a décidé que je n'aurai pas ma dotation l'année suivante et que c'était fini."

Des premières de cordées trop rares

C'est en 2014 que Marion Poitevin décroche son diplôme de guide de haute montagne. Avec un constat : les femmes ne sont qu’une poignée à exercer. Elles sont surtout reléguées au second plan, quand les hommes, eux, occupent les meilleures places. "Il y a des femmes en montagne, il y a 40% d'adhérentes dans les fédérations de montagne, mais il y a 10% de femmes qui sont leaders des sorties, et 2% qui sont guides professionnelles. La place des femmes dans les cordées n'était pas devant", regrette la guide.

"De mon expérience d'alpiniste, quand je vais en montagne, je vois des femmes qui sont plutôt en seconde place et qui ont du mal à prendre le leadership."

Marion Poitevin

à franceinfo

Pour faire changer cette situation, Marion Poitevin a donc créé en 2018 une cordée 100% féminine. Lead the climb est un club qui propose des formations poussées pour les femmes. Une initiative qui lui a valu quelques remarques acerbes dans le milieu très masculin de la montagne. Même si, reconnaît-elle, les choses sont en train de bouger : "En 1983, il y a eu la première femme guide de haute montagne, et il a fallu 30 ans pour que les 15 suivantes soient formées au métier guide de haute montagne. Et là, il a fallu sept ans pour faire les 15 suivantes. Donc oui, ça bouge, même si ça ne bouge pas assez vite."

Preuve supplémentaire que les mentalités évoluent peu à peu : première femme chez les policiers secouristes en montagne en 2016, Marion Poitevin a désormais cinq collègues femmes à ses côtés.

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