Parcoursup : infirmières pour les filles, médecins pour les garçons… Les métiers préférés des jeunes sont classiques et genrés
Quel métier je ferai plus tard ? Cette question est dans de nombreux esprits alors que s'ouvre une nouvelle phase sur la plateforme Parcoursup. À partir de mercredi 15 janvier, les lycéens de terminale sont appelés à formuler leurs vœux d'orientation pour l'enseignement supérieur. À l'heure d'un choix loin d'être évident et pourtant déterminant, une étude s'intéresse aux métiers préférés des jeunes Français. Dans ce baromètre(Nouvelle fenêtre), Olecio, une structure qui accompagne entreprises et particuliers dans le champ de l'orientation, a interrogé plus de 800 Français âgés de 18 à 30 ans, en partenariat avec BVA People Consulting. Il en ressort que les jeunes ont une faible connaissance des métiers ainsi que des représentations très genrées.
"On a assez peu de données de référence sur les métiers et les secteurs qui attirent les jeunes, explique Sébastien Levy-Prudent, cofondateur d'Olecio, à l'origine de l'étude. Donc on souhaitait sonder des jeunes pour voir quels sont les métiers qui les attirent spontanément, avec l'intuition qu'on aurait une faible connaissance et un nombre ramassé de métiers." Une intuition confirmée par le témoignage de Pauline, 25 ans : "Moi, je connaissais les métiers que je voulais faire quand j'étais petite, donc vétérinaire, architecte, journaliste, etc. Chargée de projet ou chargée de communication, j'en avais vaguement entendu parler, mais je ne connaissais pas du tout, c'était abstrait", ajoute la jeune femme qui est, justement, chargée de projet aujourd'hui.
Des métiers très classiques…
Les cinq métiers qui arrivent en tête des réponses des jeunes interrogés sont : professeur, médecin, infirmier ou infirmière, avocat ou avocate et comptable. "Ce n'est pas très original, commente Sébastien Levy-Prudent. On observe que 55% des jeunes concentrent leurs réponses sur 25 métiers. 25 métiers, c'est extrêmement faible, car France Travail recense plus de 500 codes métiers pour 11 000 appellations de métiers. Cela ne signifie pas que ces métiers sont plus attractifs que d'autres, mais surtout que les jeunes n'en connaissent pas beaucoup." Mais bonne nouvelle, souligne le baromètre : professeurs, infirmiers ou encore vendeurs correspondent aux professions qui emploieront le plus d’ici 2030, selon l’étude Métiers 2030(Nouvelle fenêtre) de France Stratégie et de la Dares.
L'étude révèle un paradoxe : professeur ou médecin sont les métiers préférés des jeunes, alors que les domaines de l'enseignement et de la santé subissent actuellement une crise d'attractivité. "Cela veut dire qu'il n'y a pas une désaffection a priori sur ces métiers, décrypte Sébastien Levy-Prudent. Les jeunes s'en détournent a posteriori, "à cause de la réalité des conditions de travail, de la rémunération ou du fait de leur parcours d'orientation, de formation vont les encourager ou les décourager pour aller dans telle ou telle voie", ajoute-t-il.
… et différents selon les genres
Si pour les femmes comme pour les hommes, c’est un métier de la santé qui arrive en tête, le reste du classement montre des disparités importantes en fonction des genres. Les jeunes femmes sont attirées par les secteurs de l'éducation, de la formation, du social, de la solidarité, du handicap ou de la petite enfance. "C'est un constat qu'on peut déplorer mais, en effet, c'est extrêmement genré, souligne Sébastien Levy-Prudent. On ne retrouve aucun de ces trois secteurs chez les garçons, et on peut faire le même constat de l'autre côté : médecins, architectes, développeurs, policiers… Aucun de ces métiers n'est cité du côté des filles."
"On voit qu'il y a vraiment deux univers."
Sébastien Levy-Prudent, cofondateur d'Olecioà franceinfo
Les motivations sont aussi très différentes selon les genres. Les jeunes femmes comme les jeunes hommes choisissent leur futur métier avant tout en fonction de leurs centres d'intérêt. "C'est le premier critère qui est cité, ensuite ça change beaucoup", précise Sébastien Levy-Prudent. En effet, ce qui compte pour les jeunes femmes, c'est le sens des missions à réaliser, le sentiment de se sentir utile à la société, l'adéquation du métier avec la formation et les compétences et, enfin, la rémunération. Les priorités sont très différentes pour les jeunes hommes : au-delà de leur intérêt, leur motivation repose sur la rémunération, l'ambiance de travail et les responsabilités confiées. "Donc on voit qu'ils visent un rôle social, une rémunération, contrairement aux femmes pour qui l'intérêt pour la société et la légitimité sont importants", souligne Sébastien Levy-Prudent.
Le gros chantier de l'orientation
Pour relever ces défis immenses en termes d'orientation, le parcours est loin d'être simple, déplore Sébastien Levy-Prudent : "Aujourd'hui, dans les deux dernières années du lycée se pose cette question-là qui cristallise énormément d'anxiété chez les jeunes et chez leurs parents. Qui plus est dans un pays où le diplôme est hypervalorisé et dicte beaucoup ce qu'on pourra potentiellement faire. Des heures sont prévues au collège et au lycée sur la découverte des métiers et sur l'orientation, mais elles ne sont pas sanctuarisées dans les agendas. Donc c'est au bon vouloir de chaque établissement. Il y a également des biais sociaux qui sont importants, ainsi que des biais géographiques".
Il milite pour que la question de l'orientation soit abordée tout au long de la scolarité, et qu'elle devienne un domaine d'apprentissage à part entière : "C'est vraiment un gros chantier qu'il y a à entreprendre, parce que ça guidera beaucoup ce qu'on deviendra autant en tant que citoyen qu’en tant que futur salarié, travailleur, entrepreneur", conclut le cofondateur d'Olecio, dont l'une des missions est d'accompagner les acteurs publics et privés du champ de l’orientation, de l’emploi et de la formation.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.