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Féminicide en Gironde : l'Union syndicale des magistrats "ne voit pas l'intérêt de dénoncer des dysfonctionnements de la justice"

"Nous n'arriverons jamais à zéro féminicide, ça n'existe nulle part", déclare sur franceinfo Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistrats.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Les forces de l'ordre avenue Carnot à Mérignac (Gironde), le 4 mai 2021. (DAVID THIERRY / MAXPPP)

Une femme de 31 ans, mère de trois enfants, a été tuée mardi 4 mai à Mérignac (Gironde), par son mari violent. L'homme, dont elle était séparée, est accusé d'avoir tiré dans les jambes de sa femme avec un fusil de chasse, avant de l'asperger d'essence et de la brûler. Il venait de purger une peine de neuf mois de prison pour violences conjugales. "C'est vraiment quelque chose qui est tout à fait tragique et sordide", a déclaré mercredi 5 mai sur franceinfo Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistrats, qui assure qu'il n'y a "certainement pas que la justice qui doit se poser des questions en la matière, loin de là", car "l'intérêt pour éviter les féminicides, c'est d'abord de faire la prévention." La présidente de l'Union syndicale des magistrats ajoute que "nous n'arriverons jamais à zéro féminicide, ça n'existe nulle part."

franceinfo : Que vous inspire cette affaire ?

Céline Parisot : C'est vraiment quelque chose qui est tout à fait tragique et sordide. C'est assez terrible de voir qu'on n'arrive pas à mettre fin à ces féminicides, quels que soient les moyens déployés, puisque-là, on a une personne qui est déjà condamnée. Les bracelets anti-rapprochement sont mis en place, tout comme le téléphone grave danger qui est remis à un certain nombre de victimes de violences conjugales. Manifestement, cela ne suffit pas. De toute façon, nous n'arriverons jamais à zéro féminicide. Il ne faut malheureusement pas se faire d'illusions. Nous avons progressé, il y en a de moins en moins, même si la décrue n'est pas très rapide. Que faire de plus ? Ça paraît difficile d'avoir une réponse. Parfois, il y a des femmes qui s'en sortent rapidement et d'autres qui se retrouvent dans une situation en prise avec le mari violent qui, une, deux, trois fois condamné, revient quand même au domicile.

Cet homme, en sortant de prison, s'est procuré une arme. Osez le féminisme dénonçait sur l'antenne de franceinfo les dysfonctionnements de la justice en la matière. Qu'en pensez-vous ?

Je ne vois pas en quoi cette critique est fondée. Je ne vois pas l'intérêt de dénoncer des dysfonctionnements de la justice. Il n'y a certainement pas que la justice qui doit se poser des questions en la matière, loin de là.

"L'intérêt pour éviter les féminicides, c'est d'abord de faire la prévention, de traiter ces cas très en amont, pas uniquement au moment de la condamnation."

Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistrats

à franceinfo

C'est s'assurer qu'une victime qui veut porter plainte puisse effectivement porter plainte, que l'accueil se fait dans des conditions adaptées, qu'elle peut voir un médecin, qu'elle peut être orientée vers une association d'aide aux victimes. Les mesures à mettre en place sont celles-ci, ça ne dépend pas uniquement de la justice.

Comment mieux prévenir la récidive ? Est-ce que ça peut se faire en prison ?

Bien sûr. En prison, il y a un déficit d'accompagnement dans ce type de prise en charge. Faute de moyens pénitentiaires, tout simplement, afin de suivre les détenus. Faute également de nombreux psychologues et psychiatres suffisants pour faire un suivi adapté. Là-dessus, il y a des marges de progression qui sont absolument énormes. Là, on a un problème de moyens qui est endémique. Mais je le redis : nous n'arriverons jamais à zéro féminicide. Ça n'existe nulle part.

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