Quintuple homicide à Meaux : "On ne va pas assez loin et assez vite" contre les violences intrafamiliales, déplore le collectif Osez le féminisme

Une femme et ses quatre enfants ont été retrouvés morts lundi dans leur appartement à Meaux. Le principal suspect, le mari de la victime et père des enfants, a été interpellé et placé en garde-à-vue.
Article rédigé par franceinfo
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L'extérieur de l'appartement où ont été découverts les corps d'une femme et de ses quatre enfants, à Meaux, le 26 décembre 2023. (ALAIN JOCARD / AFP)

"Ce qui est mis en place ne suffit pas. On ne va pas assez loin, pas assez vite. En attendant des femmes et des enfants continuent de mourir", réagit Violaine De Filippis-Abate, avocate et porte-parole d'Osez le fémininisme ! sur franceinfo mardi 26 décembre, après le quintuple homicide à Meaux (Seine-et-Marne) d'une mère de famille et de ses quatre enfants, âgés de 9 mois à 10 ans.

Le mari de la victime, père des enfants, est considéré comme le principal suspect. Hospitalisé, il a été placé en garde à vue mardi matin. Il s'agit du 102e féminicide de l'année, selon le décompte du Collectif féminicides par compagnons ou ex. Violaine De Filippis-Abate appelle à "une vraie volonté politique et donc budgétaire", avec notamment la création de "juridictions spécialisées pour les violences intrafamiliales" comme en Espagne.

franceifno : Plus de 100 féminicides cette année en France. Avec tout ce qui est mis en place ces dernières années, comment en arrive-t-on là ?

Violaine De Filippis-Abate : Cela montre que ce qui est mis en place ne suffit pas. On ne va pas assez loin, pas assez vite. En attendant, des femmes et des enfants continuent de mourir. Je prends souvent l'exemple de l'Espagne, qui a mis en place des juridictions spécialisées pour les violences intrafamiliales en 2004. Depuis, le nombre de féminicides a baissé de 24%, c'est un quart de vies sauvées. Le rapport officiel de l'Inspection générale de la justice de 2019 spécifiait que les femmes tuées sous les coups de leur conjoint, alors qu'elles avaient signalé les violences à la police, avaient vu leur plainte classée sans suite essentiellement pour manque d'investigations... C'est-à-dire qu'on aurait pu sauver ces femmes.

Dans cette affaire à Meaux, le père de famille avait déjà porté un coup de couteau en 2019 à sa femme. Elle n'avait pas porté plainte. L'abolition du discernement avait été retenue par la justice. Il était suivi pour troubles dépressifs et psychiatriques. Est-ce que ce drame aurait pu être évité ?

Je pense que oui. On attend de nombreux éléments du dossier, bien-sûr. Mais je me pose la question : pourquoi cette femme ne bénéficiait-elle pas d'un téléphone grave danger qui lui aurait permis de contacter la police ? Il n'y a pas assez de téléphones grave danger sur le territoire.

Près de 3 000 téléphones grave danger ont été développés en septembre 2021. Il y avait également des bracelets anti-rapprochement, ou encore la création d'un fichier des auteurs de violences conjugales. Est-ce que ces mesures, tout de même, portent leurs fruits?

C'est mieux que rien, bien sûr. Mais on voit tout ce qu'il reste à faire. Il en faut beaucoup plus. Il faut former nos forces de police beaucoup plus. Il faut des juridictions spécialisées pour les violences faites aux femmes. Je dirais même que pour les enquêtes, il faut obliger les parquets à ne pas classer les dossiers sans un minimum d'actes d'investigation. On pourrait fixer une liste, dans le cadre d'un débat parlementaire. Aujourd'hui, c'est terrible, la situation est vraiment alarmante. Il faut de nouvelles mesures, une vraie volonté politique et donc budgétaire.

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