Procès des attentats de janvier 2015 : "Ils voulaient tous nous avoir, ils voulaient tuer le journal", raconte Laurent Léger de "Charlie Hebdo"

Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Laurent Léger, journaliste de "Charlie Hebdo", survivant de l'attentat du 7 janvier 2015, témoigne à la barre, le 8 septembre 2020. (ELISABETH DE POURQUERY / FRANCE TELEVISIONS)

Des rescapés de l'attaque contre la rédaction de l'hebdomadaire satirique doivent témoigner mardi et mercredi.

Ce qu'il faut savoir

Au lendemain de la diffusion de photos et vidéos de la tuerie de Charlie Hebdo, la cour d'assises spéciale entend des rescapés et témoins de l'attentat commis par les frères Kouachi, aux cinquième et sixième jours du procès des attentats de janvier 2015. Après avoir abordé, mardi 8 septembre, l'assassinat de Frédéric Boisseau, responsable d'opérations de maintenance et première victime de la tuerie, la cour entend les survivants de la tuerie de la rédaction.

Sigolène Vinson, chroniqueuse judiciaire pour Charlie Hebdo, n'a pu contenir ses larmes en témoignant mardi. "J'avais accepté de mourir ce jour-là et je me suis dit 'C'est mon tour', je pensais qu'une balle dans la tête ce serait très rapide, j'avais tout lâché, je n'avais plus de peur, j'attentais qu'il me tue", a raconté cette rescapée de l'attentat qui a visé la rédaction de l'hedomadaire satirique.

"J'ai enjambé les corps, j'ai pris mon téléphone, j'ai appelé les pompiers". Sigolène Vinson a livré un témoignage bouleversant. "Il y avait des éclats d'os partout qui brillaient et de la matière que j'ai identifiée comme de la cervelle, a-t-elle relaté. Quelques instants avant, c'était de l’intelligence, de l'humanisme et tout ça, c'était par terre." Elle a également détaillé le moment où elle appelé les secours. "Je me suis reculée, j'ai enjambé les corps, j'ai pris mon téléphone, j'ai appelé les pompiers, j'ai dit 'Ils sont tous morts, ils sont tous morts'. J'ai vu un bras se lever 'Non, moi je suis pas mort', c'était Fabrice."

Le témoignage douloureux de la dessinatrice Corinne Rey, dite Coco. Le matin du 7 janvier 2015, les terroristes "ont surgi du couloir au moment où on arrivait dans la cage d'escalier", raconte-t-elle, mardi. "Nous avons monté l'escalier, en moi une détresse absolue d'avoir ces deux hommes qui me menacent de leurs armes, une menace de mort permanente dès le début", confie Coco. "J'étais comme dépossédée de moi, j'arrivais plus à rien. J'ai avancé vers le code et je l'ai tapé et je sentais que les terroristes approchaient de leur but, je sentais une excitation à côté de moi".

 Les images terrifiantes de la tuerie de Charlie Hebdo projetées à l'audience. La cour a commencé à aborder les faits, lundi, et a projeté et diffusé des images de la scène de crime à l'intérieur du journal et des films de vidéosurveillance où l'on voit les frères Kouachi pénétrer dans les locaux, tirer sur les premières personnes à l'entrée puis assassiner le policier Ahmed Merabet une fois sortis des lieux. "Il va falloir mettre de l'humanité dans ce procès, car ce qu'on vient de voir c'est inhumain. On a vu des machines de guerre", a résumé Me Caty Richard, avocate de partie civile, lors d'une suspension d'audience.

 Un enquêteur de la Brigade criminelle retrace les trois jours de traque. Le responsable de l'enquête au sein de la section antiterroriste de la Bridage criminelle est revenu dans la matinée sur les trois jours d'attentats et la traque des frères Kouachi et d'Amedy Coulibaly. Il a ensuite commenté les terribles images diffusés sur les écrans des salles d'audience. 

Le masque obligatoire pendant les prises de parole. Après avoir essuyé dès mercredi les critiques des avocats sur le port obligatoire du masque pendant l'audience, le président de la cour d'assises spéciales a annoncé lundi que le masque sanitaire était bien obligatoire à l'audience, "y compris pendant les prises de parole""Vous allez juger des hommes dont vous ne voyez pas le visage. Les règles sanitaires sont contraires aux droits de la défense", s'était émue mercredi l'avocate Beryl Brown, qui défend le Belge Michel Catino.