"Tu casses, tu répares" : à quoi vont ressembler les "travaux d'intérêt éducatif" pour les mineurs délinquants de moins de 16 ans ?

Gabriel Attal en a fait l'annonce lors de sa déclaration de politique générale, mardi. Pour l'instant, seuls les mineurs âgés de plus de 16 ans peuvent écoper de travaux d'intérêt général.
Article rédigé par David Di Giacomo
Radio France
Publié Mis à jour
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Le Premier ministre Gabriel Attal prononce sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale, le 30 janvier 2024. (EMMANUEL DUNAND / AFP)

C'est, selon lui, un "principe clair". Le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé mardi 30 janvier la mise en place de "travaux d'intérêt éducatif" pour les mineurs délinquants de moins de 16 ans, une mesure proche des peines d'intérêt général, mais qui soulève des interrogations, notamment juridiques.

"Je ne me résoudrai pas à ce qu'on préfère attendre avant de donner une lourde peine, alors que bien souvent, c'est très tôt qu'il aurait fallu agir", a estimé le chef du gouvernement lors de sa déclaration de politique générale devant les députés. Et pour le Premier ministre, il est essentiel d'agir très tôt : "Dès le plus jeune âge, il faut revenir à un principe clair : tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter".

Dès 13 ans au lieu de 16

Concrètement, ces travaux d'intérêt éducatif ne seront pas des peines mais des mesures éducatives qui pourront être prononcées par un parquet ou un juge pour enfants comme alternatives à des poursuites, a appris ce mercredi franceinfo auprès du ministère de la Justice. 

Ces travaux d'intérêt éducatif, qui concerneront les enfants âgés de 13 à 16 ans, feront l'objet d'un projet de loi "Justice des mineurs" présenté au Parlement par le gouvernement lors du premier semestre de cette année 2024. Ils auront pour contenu "le civisme". Selon la Chancellerie, ce ne sera pas du travail à proprement parlé, mais par exemple de l'aide au monde associatif ou de l'aide au bénéfice des collectivités locales. Un nombre d'heures à réaliser sera déterminé au moment de la prise de la mesure.

"Certains mineurs ayant entre 13 et 16 ans, déjà en décrochage scolaire et ayant commis des infractions peuvent avoir besoin de s’investir dans des actes concrets", explique Matignon à franceinfo, mercredi. "La mesure envisagée consiste en un suivi éducatif pendant trois mois assorti d’une obligation de suivre un enseignement, la participation à des activités de sensibilisation aux questions de justice ainsi qu’une participation à une activité civique au profit d’une association ou une collectivité locale pendant un nombre d’heures limité sur la période des 3 mois du suivi éducatif".

Avec cette mesure, il ne sera donc plus nécessaire d'attendre qu'un mineur soit âgé de 16 ans pour prononcer une peine de travaux d'intérêt général. Dès 13 ans, des travaux d'intérêt éducatif pourront désormais être décidés. 

Mercredi 31 janvier, Eric Dupond-Moretti a apporté quelques précisions sur franceinfo : "Le travail d’intérêt général, c'est un travail. Or, les conventions internationales nous interdisent de faire travailler les enfants. Alors que fallait-il faire ? Soit rien, soit prendre la situation en charge et faire en sorte que des mineurs soient pris en charge avant l’âge de la responsabilité pénale", a expliqué le garde des Sceaux, estimant qu'"Il faut aider les parents dépassés". 

En 2022, un peu plus de 2 000 peines de travaux d'intérêt général ont été prononcées à l'encontre de mineurs de plus de 16 ans. Depuis la semaine d’émeutes qui a suivi la mort de Nahel le 27 juin dernier, tué à 17 ans par un policier après un refus d'obtempérer, le ministre de la justice Éric Dupond-Moretti répète qu'il faut pouvoir punir les jeunes auteurs de dégradations, tout comme les parents défaillants. En octobre dernier, la Première ministre Élisabeth Borne avait notamment indiqué vouloir corriger la "démission" de certains parents devant la "dérive" de leurs enfants en instituant des peines de travaux d'intérêt général à ceux "qui se soustraient à leurs devoirs éducatifs". 

La cheffe du gouvernement avait alors également marqué sa volonté d'être plus sévère avec les jeunes délinquants, notamment en les faisant encadrer par des militaires. Au total, 1 180 mineurs avaient été identifiés par la justice comme auteurs d'infractions lors des émeutes, avait indiqué la Chancellerie. Parmi eux, 40% étaient âgés de 13 à 15 ans, en écrasante majorité des garçons (96%).  

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