Homophobie : deux couples affirment avoir été aspergés de Javel et de peinture à la braderie de Lille
Au moins deux couples homosexuels ont été aspergés de peinture noire et d'eau de Javel, dimanche 2 septembre à la braderie de Lille, dénonce Stop Homophobie.
Au beau milieu de la frénésie de la braderie de Lille (Nord), dimanche vers 17 heures, Aurélie Merlo a d'abord pensé qu'on lui avait jeté de l'eau. "C'est en sentant l'odeur sur mes vêtements que j'ai compris que c'était de la Javel", raconte la jeune femme à franceinfo. Terrence Katchadourian, secrétaire général de Stop Homophobie, y voit une agression homophobe. Et ce cas ne serait pas isolé, puisqu'il affirme avoir reçu un autre signalement d'une agression semblable pendant la braderie, visant cette fois un couple de garçons. Eux aussi se sont fait asperger "d'un liquide qui a décoloré [leurs] vêtements" dans la soirée du dimanche 2 septembre, selon le message qu'ils ont envoyé à l'association. Et sur Twitter, une autre jeune femme, qui n'a pas répondu aux sollicitations de franceinfo, décrit les mêmes faits.
#braderiedelille, aspergées de #javel et de peinture noire. On est un couple de filles et c’est arrivé à d’autres couples gays. Aujourd’hui c’est de la javel, demain c’est ?... #homophobie #lgbt @SOShomophobie @stop_homophobie pic.twitter.com/tkA7YzLlBb
— Aurélie Merlo (@Aurelie_Merlo) 2 septembre 2018
Aurélie souligne qu'elle et sa compagne n'ont pas été arrosées qu'une fois, mais à trois reprises. "J'ai compris, en arrivant au niveau du boulevard de la Liberté, que c'était de la Javel que j'avais reçue sur la manche. On s'est arrêtées pour nettoyer et ma compagne a reçu de la peinture noire, raconte la jeune femme. Et moi j'ai remarqué que nos vêtements étaient complètement tachés par la Javel". Les jeunes femmes cherchent d'où proviennent les jets, mais au milieu de la foule, c'est peine perdue.
"On se tenait la main, quelqu'un a dû nous voir"
Le couple se remet en marche. Lorsqu'elles arrivent au métro, Aurélie découvre de nouvelles taches, sur son sac à dos notamment, dont elle jure qu'il était propre lors de leur premier arrêt. "Soit nous avons été suivies, soit les agresseurs étaient plusieurs", croit-elle. La jeune femme affirme avoir rapidement compris qu'il s'agissait d'une agression homophobe. "Il y a foule autour de nous et on est les seules à recevoir ça ?", s'interroge-t-elle, soulignant la lâcheté des agresseurs. "On a été touchées dans le dos, au milieu d'une foule... Je pense que ça devait venir d'un objet assez discret, comme un pistolet à eau, affirme Aurélie. En tout cas, on a bien été visées. On se tenait la main, quelqu'un a dû nous voir...". Le président de SOS Homophobie, Joël Deumier, abonde.
On est typiquement dans le cas d'une agression physique lesbophobe dans l'espace public. C'est leur visibilité qui a donné lieu à cette réaction de rejet. C’est très grave, parce que ça veut dire qu'en France en 2018, les personnes homosexuelles ne sont toujours pas en capacité de vivre et d'aimer librement.
Joël Deumier, président de SOS Homophobieà franceinfo
Des agressions qui sont loin d'étonner Terrence Katchadourian, de l'association Stop Homophobie. Il dit recevoir chaque année des signalements d'agressions homophobes pendant la braderie de Lille. "Mais en général, ce sont plutôt des injures que des agressions physiques", souligne-t-il. La crainte est partagée par Aurélie. "Ça aurait pu être bien pire, on aurait pu en avoir sur le visage, ou ça aurait pu être un produit encore plus corrosif", fait-elle valoir.
Déterminée à porter plainte, la jeune femme a rapidement contacté Stop Homophobie. Mais Terrence Katchadourian craint que la plainte soit classée sans suite, même si son association a interpellé Martine Aubry et la mairie de Lille. De quoi l'agacer. "Cette année, nous avons dû embaucher quelqu'un pour gérer le travail lié aux dépôts de plainte. On est obligé de porter plainte pour faire respecter la loi. Mais on est là pour aider les gens, pas pour devenir policier !", s'énerve-t-il, faisant référence aux cas où l'association accompagne les victimes dans leurs démarches ou se constitue partie civile. Rien que cette année, Stop Homophobie a reçu "9 000 sollicitations liées à des agressions ou injures homophobes". Quant à SOS Homophobie, leur rapport annuel souligne qu'"une femme est victime d'une agression lesbophobe tous les 10 jours", rappelle Joël Deumier.
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