Abrogation de la loi Taubira : la position de Nicolas Sarkozy critiquée au sein de l'UMP
La proposition de l'ancien chef de l'Etat, favorable a un mariage différent pour les couples hétérosexuels et homosexuels, n'a pas rencontré l'adhésion de certains poids lourds du parti.
Après être longtemps resté discret ou hésitant sur la question, Nicolas Sarkozy s'est finalement prononcé, samedi 15 novembre, pour "l'abrogation" de la loi Taubira autorisant le mariage des couples de personnes de même sexe. L'ancien président a été appelé à clarifier sa position dans le cadre de la campagne pour la présidence de l'UMP. Mais la proposition de Nicolas Sarkozy, favorable à un mariage différent pour les couples hétérosexuels et homosexuels, n'a pas rencontré l'adhésion de certains poids lourds du parti.
Lundi matin, ils ont fait part de leurs désaccords avec l'ancien président de la République.
Ceux pour qui l'abrogation est une erreur
Alain Juppé, candidat à la primaire UMP pour la présidentielle 2017, a estimé, lundi, qu'abroger la loi Taubira n'était "pas une bonne idée". "On ne reviendra pas dessus", a-t-il tranché. Néanmoins, le maire de Bordeaux estime que la loi mériterait d'être clarifiée sur le recours à la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples de même sexe. Des fidèles de Nicolas Sarkozy ont également estimé que l'abrogation de la loi Taubira serait une erreur. "Je ne suis pas du tout d'accord avec cette orientation", a par exemple fait savoir Nathalie Kosciusko-Morizet. "Je crois que l'abrogation de la loi Taubira n'est ni souhaitable, ni possible", a déclaré l'ancienne porte-parole de Nicolas Sarkozy. Elle qui s'était abstenue sur ce texte, a évoqué la jurisprudence "constante" du Conseil constitutionnel, n'estimant pas possible une abrogation. Elle a dit par ailleurs rencontrer "beaucoup de Français (...) qui disent : on ne va pas rouvrir cette plaie-là, il y a d'autres urgences'".
Pour le sénateur UMP des Hauts-de-Seine Roger Karoutchi, qui s'était lui aussi abstenu sur ce projet de loi, revenir sur ce texte serait "difficile et à [son] sens inconstitutionnel", a-t-il estimé. "Faisons un texte pour interdire complètement la GPA [gestation pour autrui], la PMA [procréation médicalement assistée], pour revoir l'ensemble de la filiation et de l'adoption, mais ne commençons pas à dire 'abrogation' de la loi", a poursuivi ce soutien à Nicolas Sarkozy. Même son de cloche du côté de l'eurodéputée Nadine Morano. Ce week-end, elle a jugé sur Twitter que "les Français [attendaient] d'autres priorités que la réécriture de la loi Taubira" et que "le nouveau président de l'UMP devra faire voter sur ce sujet".
Le député-maire de Nice, Christian Estrosi, a aussi tenu à rappeler ses déclarations antérieures sur le sujet : le mariage homosexuel est "une avancée", et "je fais partie de ceux qui disent que nous ne reviendrons pas sur le mariage pour tous".
Ceux qui ironisent
Les concurrents de Nicolas Sarkozy pour la présidence de l'UMP ont oscillé entre ironie et désaccord. Hervé Mariton, opposant de la première heure à la loi sur le mariage pour tous, s'est ainsi félicité d'avoir "amené à bouger" l'ancien chef de l'Etat. Cependant, il a vu "une certaine confusion" dans ses déclarations. "Quand Nicolas Sarkozy dit : 'vous pouvez entendre abrogation si ça vous fait plaisir, ça ne coûte pas cher', je trouve que ce n'est pas une manière très heureuse et très honorable de répondre à un public certes exigeant, mais plein de conviction", a fait savoir le député de la Drôme sur RTL. Enfin, il a déploré que l'utilisation du mot "mariage" pour une union homosexuelle fasse "porter un risque important sur le mariage hétérosexuel."
Quid des partisans de Bruno Le Maire, lequel a d'ores et déjà annoncé qu'il ne souhaite pas revenir sur la loi ? L'un de ses soutiens, le député Thierry Solère, a évoqué une "maladresse". Nicolas Sarkozy "s'est sûrement laissé un peu déporter par la salle qui hurlait 'abrogation, abrogation'", a-t-il estimé sur France Inter. Dimanche, Bruno Le Maire avait plaidé le "courage" des "convictions". Le député de l'Eure, qui s'était lui aussi abstenu lors du vote de la loi Taubira, a appelé à ne pas "traiter les Français comme des clientèles".
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