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EDF : "Il est vraiment urgent" de "sortir de cette dépendance au parc nucléaire qui nous fragilise de plus en plus", alerte un expert

Yves Marignac plaide entre autres pour une diversification de notre système électrique et une maîtrise de notre consommation d'électricité, mais aussi le développement des énergies renouvelables.

Article rédigé par franceinfo
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Le siège d'EDF à La Défense. Illustration. (MAXIME GRUSS / HANS LUCAS / AFP)

"Il est vraiment urgent" de "sortir de cette dépendance au parc nucléaire qui nous fragilise de plus en plus", a alerté jeudi 25 août sur franceinfo Yves Marignac, consultant sur le nucléaire et la transition énergétique au sein du groupe négaWatt. EDF a annoncé le prolongement de l'arrêt de quatre réacteurs, affectés par des problèmes de corrosion, pendant plusieurs semaines cet automne.

franceinfo : En quoi consistent les problèmes de corrosion dont parle EDF ?

Yves Marignac : Il s'agit de problèmes touchant l'intérieur de circuits essentiels pour la sûreté, notamment celui qui sert à refroidir un réacteur en cas d'urgence. Ce sont donc des équipements dont la défaillance n'est pas envisageable. Et la capacité d'EDF à redémarrer les réacteurs suppose deux choses : la première, c'est de réparer, c'est-à-dire de disposer des pièces et des opérateurs pour refaire les soudures. La deuxième, c'est de pouvoir garantir, comme le demande l'Autorité de sûreté nucléaire, qu'une surveillance pourra être menée afin de détecter toute réapparition éventuelle de ces corrosions. Pour le moment, EDF ne dispose pas d'un procédé qualifié pour le faire.

32 réacteurs français sur 56 sont aujourd'hui à l'arrêt. Cela a-t-il un impact sur la production d'électricité ?

Oui, cela a un impact majeur. EDF indique que la production d'électricité sur l'année sera probablement de 280 térawatt-heure, alors que la production attendue d'un parc nucléaire français fonctionnant normalement est de 430 térawatt-heure. Il va donc pratiquemment tomber à 50%, ce qui est extrêmement bas et historiquement inédit. Cela pose d'énormes problèmes pour l'approvisionnement électrique à court terme, et surtout de grandes inquiétudes pour l'approvisionnement cet hiver.

Risque-t-on des coupures d'électricité cet hiver ?

Tout dépendra d'éventuelles vagues de froid, puisqu'il y a une très grande sensibilité du système électrique français aux besoins de chauffage. Le moindre degré en moins l'hiver tire tout de suite sur les besoins de production. Donc il n'y aura probalement pas de risque de coupure au sens d'un black out total, mais des situations de coupures organisées, pour faire face à une situation de pénurie temporaire d'électricité, sont tout à fait possible.

Quelles conclusions faut-il tirer de cette situation, selon vous ?

La première conclusion est la dépendance croissante de notre sécurité électrique à un parc nucléaire qui connaît un niveau historiquement inédit de défaillance, mais qui au fil des années voit ses performances se dégrader. Il est donc nécessaire de diversifier notre système électrique, de travailler avant tout à la maîtrise de notre consommation d'électricité, d'améliorer l'efficacité de nos équipements et surtout de notre parc de bâtiments. Il faut aussi développer les énergies renouvelables, puisqu'il ne s'agit pas de dépendre davantage des énergies fossiles. Tous ces sujets sont connus depuis longtemps, et les gouvernements successifs ont accumulé du retard. Il est vraiment urgent d'accéler la mise en oeuvre de cette transition et de sortir de cette dépendance au parc nucléaire, qui nous fragilise de plus en plus.

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