Cet article date de plus d'un an.

Mineurs et porno : "ll serait temps que la justice condamne les sites" qui ne vérifient pas les âges, estime la directrice de l’association e-Enfance

À "l'âge où la sexualité est un sujet central", les ados "cherchent des informations et ne trouvent que la pornographie" pour y répondre. "Il faut faire tomber ce tabou", appelle Justine Atlan.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Les sites pornographiques sont tenus de contrôler l'âge de leurs visiteurs (illustration). (LE PARISIEN / ARNAUD JOURNOIS / MAXPPP)

"C'est très important de faire prendre conscience à la société" que la fréquentation massive de sites pornographiques par les mineurs "n'est pas un fantasme mais une réalité", a expliqué jeudi 25 mai sur franceinfo Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance. Un mineur sur deux, âgé de 12-13 ans, consulte chaque mois des sites pornographiques, révèle une étude publiée par l'Arcom. "ll serait temps que la justice condamne les sites" qui ne vérifient pas les âges, estime Justine Atlan.

>> Fréquentation des sites pornographiques par les mineurs : l'Arcom n'avait pas imaginé "un phénomène d'une telle ampleur"

franceinfo : Ces chiffres vous étonnent-ils ?

Justine Atlan : Malheureusement, non, mais c'est parce qu'on travaille tous les jours auprès des enfants et des adolescents. On sait ce qu'ils ont comme pratique. C'est très important de faire prendre conscience à la société, aux parents, aux entreprises responsables de ces outils et aux pouvoirs publics, que ce n'est pas un fantasme mais une réalité. Les jeunes se retrouvent seuls face à la pornographie. Quand on rencontre des jeunes qui ont la vingtaine, qui ont commencé à regarder de la pornographie vers 10 ou 11 ans, ils nous disent qu'ils auraient bien aimé que cela n'arrive pas.

"Ils se rendent compte que c'était beaucoup trop, qu'ils en ont vu trop et que cela les a fortement influencés, garçons comme filles, vers des comportements qu'ils regrettent."

Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance

à franceinfo

On peut aussi s'appuyer sur leurs témoignages pour ne pas avoir l'air d'être de vieux censeurs.

Faut-il mieux sensibiliser ?

On est face à une défaillance de l'éducation à la vie affective et sexuelle. Pourtant, c'est obligatoire à l'école mais c'est très peu fait. Les adolescents, à l'âge où la sexualité est un sujet central, cherchent des informations et ne trouvent que la pornographie en pensant que cela en est. Donc, il y a un travail à faire auprès des adolescents, il faut aider les parents à parler de ces sujets-là. Il faut que les parents acceptent que cela se passe à l'école car certains sont réticents. Il faut faire tomber ce tabou.

Les smartphones sont très utilisés pour aller sur ces sites pornographiques, notamment pour éviter que les parents s'en rendent compte. Qu'en pensez-vous ?

Les parents sont un peu coincés aujourd'hui parce que quand ils veulent acheter un téléphone à leurs enfants, on ne leur propose que des smartphones. Ce qu'ils ne veulent pas forcément contrairement à leurs enfants. Un smartphone c'est un outil qui permet d'aller sur internet où les enfants et les adolescents ne sont pas reconnus comme mineurs. Ils ne sont pas protégés et on leur propose exactement la même chose qu'à un adulte. Les parents ne sont pas inconscients mais ils se sentent impuissants. Donc, il y a besoin d'agir très rapidement pour leur proposer des solutions qui les aident.

Comment faire respecter l'interdiction de ces sites aux mineurs ?

En appliquant la loi, tout simplement. Il y a une loi qui impose aux sites pornographiques de vérifier l'âge de leurs consommateurs, puisque c'est réservé aux majeurs. Ils ne la respectent pas en ayant des arguments un peu fallacieux. Ils disent qu'il n'y a pas d'outils techniques suffisamment fiables pour le faire. On n'a peut-être pas trouvé la solution parfaite, mais il y en a plein qui existent et qui peuvent réduire la fréquentation. Il y a la carte d'identité, la carte bancaire, d'autres systèmes de double anonymat qui permettent de valider l'âge sans pour autant fournir son identité. La justice va rendre une décision le 7 juillet à la suite de procédure mise en place par l'Arcom et il serait temps que la justice prenne ses responsabilités et condamne ces sites qui ne mettent pas en place les systèmes imposés par la loi.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.