: Vidéo Fréquentation des sites pornographiques par les mineurs : l'Arcom n'avait pas imaginé "un phénomène d'une telle ampleur"
"Si on a sorti cette étude, c'est pour sensibiliser, mais nous ne pensions pas que c'était un phénomène d'une telle ampleur", a reconnu jeudi 25 mai sur franceinfo Laurence Pécaut-Rivolier, membre du collège de l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel et du numérique, chargée de la protection des publics et de la diversité dans les médias. Un mineur sur deux, âgé de 12-13 ans, consulte chaque mois des sites pornographiques, révèle une étude publiée par l'Arcom. Elle revient sur franceinfo sur ces "chiffres terribles".
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franceinfo : Que montre l'étude que vous avez réalisée ?
Laurence Pécaut-Rivolier : C'est la première étude vraiment chiffrée que nous avons pu mener grâce aux données de Médiamétrie qui a un panel représentatif, comme pour les audiences de télévision. Il y a trois enseignements majeurs. Le premier, c'est qu'on a une fréquentation en masse des sites pornographiques par les mineurs, 30% contre 37% chez les adultes. Le deuxième enseignement, c'est que ça n'arrête pas d'accélérer, on a une hausse constante depuis 2017. Le troisième, c'est que ce sont des mineurs de plus en plus jeunes qui fréquentent les sites pornographiques. Les chiffres sont terribles.
Quelles sont les conséquences de ces images sur l'apprentissage de la vie sexuelle des adolescents ?
On a un comité d'experts de jeunes publics au sein de l'Arcom qui travaille sur ces questions-là. Il est évident que les images pornographiques sont inappropriées à un certain âge et force est de constater que sur ces sites, il y a des catégories d'images qui sont encore plus inadaptées. Elles sont dégradantes, violentes, elles en appellent à des fantasmes d'inceste. Tout cela est de nature traumatisante.
Aborder la sexualité avec ses enfants est souvent compliqué. Que conseillez-vous ?
Si on a sorti cette étude, c'est pour sensibiliser, mais nous ne pensions pas que c'était un phénomène d'une telle ampleur.
"On espère qu'avec ce que vont relayer les médias, il y aura des conversations dans les familles. C'est fondamental."
Laurence Pécaut-Rivolier, membre du collège de l’Arcomà franceinfo
Les sites pornographiques doivent vérifier l'âge des utilisateurs. Mais la loi n'est pas respectée. Comment l'expliquez-vous ?
Il y a une infraction dans le code pénal qui sanctionne l'exposition des mineurs aux images pornographiques depuis 1992. Donc, ces textes existent depuis très longtemps, mais ne sont pas respectés. La loi de 2020 est venue renforcer les outils pour essayer de mettre en œuvre un arsenal pour se battre contre cette exposition illicite et a confié à l'Arcom la possibilité d'agir. Cela fait 30 ans qu'on essaye d'avoir un véritable système qui empêche les mineurs d'accéder à ces sites. En décembre 2021, on a mis en demeure les plus gros sites, ceux qui ont la plus grosse audience. On a fait le constat qu'il n'y avait pas de système de filtrage et que rien n'avait changé après les mises en demeure. On a saisi le juge en demandant un blocage des sites. À ce moment-là, les sites sont venus nous dire que c'était compliqué parce qu'il n'y avait pas de système efficace. Donc, pour le moment, rien n'a bougé.
Quelles sont les pistes envisagées ?
On travaille avec la CNIL pour trouver les meilleurs systèmes. On se dit qu'un filtrage par carte bancaire serait pas mal. Tout outil est bon à prendre à partir du moment où ce n'est pas une simple déclaration de majorité. Tout est possible à partir du moment où cela respecte la protection des données, le double anonymat. On est à l'écoute de tous les systèmes qui permettraient de filtrer, mais pour l'instant, il n'y a pas eu de proposition.
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