Italie : une fresque représentant la volleyeuse star Paola Egonu dégradée, le gouvernement dénonce un "racisme vulgaire"

Une fresque, inaugurée lundi à Rome en l’honneur de la toute récente championne olympique de volley, a été vandalisée quelques heures plus tard. Cet acte raciste visant la joueuse star de 25 ans est loin d’être le premier.
Article rédigé par franceinfo - Aurore Richard et Bruno Duvic
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L'Italienne Paola Egonu lors de la finale de volley-ball féminin aux Jeux olympiques de Paris 2024, le 11 août 2024. (PATRICIA DE MELO MOREIRA / AFP)

L’équipe féminine italienne de volley a décroché l’or, pour la toute première fois de son histoire, aux Jeux olympiques de Paris, dimanche 11 août. L’Italie n’aurait pas pu obtenir ce titre sans Paola Egonu, meilleure marqueuse du match avec 22 points. Une artiste italienne, Laika, a donc décidé de rendre hommage à la star de la Nazionale alors que celle-ci est régulièrement visée par des attaques racistes. Elle a réalisé une fresque, intitulée "Italianità" (italinaité) devant le siège du Comité olympique italien (le Coni) à Rome, où Paola Egonu était représentée avec le maillot de l’équipe nationale et sa médaille d’or.

Et dans un ballon de volley, on pouvait lire "Stop au racisme, à la haine, à la xénophobie". L’artiste a déclaré dans La Gazzetta dello Sport que cette victoire aux JO "est une gifle à tous les soi-disant patriotes qui n’acceptent pas une Italie multi-ethnique". Inaugurée lundi 12 août, cette fresque a été vandalisée la nuit suivante. La peau noire de la joueuse a été recouverte d’un spray rose et l’inscription anti-raciste sur le ballon a été effacée.

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Cet acte de vandalisme a provoqué un torrent de réactions. L’artiste Laika a dénoncé sur les réseaux sociaux "le racisme", "un cancer dont l’Italie doit guérir". De nombreux politiques italiens ont également réagi, à l’image du ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani qui a dénoncé un "geste sérieux de racisme vulgaire". De son côté, la ministre du Tourisme Daniela Santanchè a rappelé que "toute forme de racisme doit être dénoncée et combattue"

Une sportive engagée de longue date contre le racisme

Paola Egonu, 25 ans, a fait de la lutte contre le racisme, l’un de ses combats. Née dans le nord de l’Italie, près de Venise, de parents originaires du Nigeria, elle a été naturalisée à l’âge de 15 ans. Elle a été sélectionnée pour la première fois dans l’équipe d’Italie alors qu’elle n’avait pas 18 ans. La volleuse permet ensuite à la Nazionale de devenir vice-championne du monde en 2018 et championne d’Europe trois ans plus tard. Et pourtant, en 2021, lorsqu’elle est choisie pour être la porte-drapeau de l’Italie aux JO de Tokyo, elle est la cible d’attaques racistes. 

Cela se poursuit l’année suivante, à tel point qu’à l’automne 2022, après une troisième place aux championnats du monde, elle fait une pause dans sa carrière en équipe nationale. Après avoir fait une faute de service en demi-finale de ces Mondiaux, elle reçoit des messages racistes sur les réseaux sociaux. "On me demande sans cesse si je suis italienne", confie celle qui se dit "fatiguée" de cette situation et qui songe à arrêter de jouer pour l’Italie.

Finalement, elle reste et début 2023, dans une Italie qui vient d’élire Giorgia Meloni, elle co-anime même le festival hyper-populaire de la chanson à San Remo, un honneur réservé aux grandes stars italiennes. Elle prononce alors un monologue dans lequel elle raconte le racisme latent qu’elle a subi : "À la question du racisme, je réponds de la manière suivante : prenez des verres de différentes couleurs et mettez-y de l’eau. Vous verrez que la plupart des gens choisiront le verre transparent simplement parce qu’il a le contenu le plus clair. Mais si vous essayez de boire dans l’un de ces verres colorés, vous découvrirez que l’eau a toujours le même goût, frais et vivant, car nous sommes tous les mêmes au-delà des apparences [… ] J’aime l’Italie. Je porte fièrement le maillot bleu qui, pour moi, est le plus beau au monde. J’ai un sens profond des responsabilités envers ce pays dans lequel je place tous mes espoirs pour demain."

Quelques mois plus tard, à l’été 2023, dans un livre qui rencontre un énorme succès en librairie et suscite la polémique, une personnalité de l’armée italienne, le général Vannaci fait son entrée en politique. Dans cet ouvrage, où il s’élève contre ce qu’il considère comme l’idéologie multiculturaliste et dénoncé par beaucoup comme ouvertement raciste, il estime, au sujet de Paola Egonu, que "même si elle a la nationalité italienne, ses traits ne représentent pas l’italianité".

Le général Vannacci est désormais député européen, élu sur la liste du parti d’extrême-droite de Matteo Salvini, la Ligue. Il a d’ailleurs félicité les joueuses de l’équipe italienne après leur victoire olympique. Il s'est même dit prêt à lui demander un autographe, tout en répétant que ses traits ne sont pas ceux de la majorité des Italiens. Une phrase raciste parmi tant d'autres, à laquelle Paola Egonu n'a pour le moment pas répondu. "C'est un rêve, ne me réveillez pas", a posté la joueuse sur Instagram, mardi, avec des photos d'elle tout sourire, médaille d'or en main. 

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