Harcèlement de rue : "On a une génération de jeunes femmes qui ne veulent plus subir"
La secrétaire d'État Marlène Schiappa estime que la période est peut-être en train de changer à propos du harcèlement de rue. Elle a réagi lundi à la vidéo qu'une jeune femme a diffusée sur les réseaux sociaux, pour dénoncer l'agression qu'elle a subie.
"J'ai l'impression qu'on a une génération de jeunes femmes qui ne veulent plus subir et qui subissent depuis trop longtemps", a estimé lundi 30 juillet sur franceinfo Marlène Schiappa, la secrétaire d'État à l'Égalité entre les femmes et les hommes. Elle a réagi à la vidéo qu'une jeune femme de 22 ans a diffusée sur les réseaux sociaux, où l'on voit un homme l'agresser en pleine rue, dans le 19e arrondissement de Paris.
franceinfo : Comment avez-vous réagi en voyant cette vidéo ?
Marlène Schiappa : Cette vidéo est extrêmement violente parce qu'elle montre, au-delà de la violence symbolique et orale, un coup assez fort pour faire chanceler et trébucher la jeune femme. D'abord, cette jeune femme est très courageuse d'être allée déposer plainte et de s'être procurée les images afin d'interpeller le grand public sur la réalité de ce que vivent les femmes quand elles sont dans l'espace public. Comme tout le monde, je suis extrêmement choquée. Ça fait longtemps maintenant que nous travaillons contre le harcèlement de rue et l'ironie du calendrier veut que la loi que je porte pour verbaliser le harcèlement de rue est votée cette semaine à l'Assemblée nationale.
Le fait que cette étudiante ait osé répondre à son agresseur, ait parlé et diffusé la vidéo sur les réseaux sociaux est-il pour vous une conséquence de la libération de la parole des femmes qu'on a connu, notamment après le scandale Harvey Weinstein ?
Ça lui appartient de le dire mais j'ai l'impression qu'effectivement on a une génération de jeunes femmes qui ne veulent plus subir et qui subissent depuis trop longtemps. La question du harcèlement de rue existe de longue date. Quand j'étais adolescente, je faisais face au harcèlement de rue, tout comme les adolescentes de notre époque. Ça veut dire que c'est un sujet qui était sous les radars des politiques publiques depuis des générations, qui n'était pas considéré comme important. Peut-être que nous sommes enfin dans une période où les femmes, collectivement, disent "Ça suffit, nous ne voulons plus accepter des choses qui, jusque-là, étaient acceptables". C'est tout notre enjeu, de faire en sorte d'abaisser le seuil de tolérance de notre société à ces violences sexistes et sexuelles.
Dans votre projet de loi, vous proposez une amende pour sanctionner le harcèlement de rue. Elle irait de 90 à 750 euros, voire même plusieurs milliers d'euros en cas de récidive ou de circonstances aggravantes. Est-ce que cela pourrait suffire ?
Une amende, en soi, ne suffit pas. En soi, rien ne suffit. Si on avait une baguette magique pour faire disparaître le harcèlement de rue, j'imagine que les gens qui étaient là avant nous l'auraient sans doute agitée. Ce que nous faisons, c'est d'abord effectivement de proposer des amendes de classe 4, ce qui est nouveau. Cela veut dire que les lois de la République vont désormais clairement interdire de suivre, d'invectiver, d'humilier, d'intimider des femmes dans l'espace public. En plus de cela, il y aura des condamnations à des stages aux frais du harceleur qui seront prononcées. Enfin, nous lançons une grande campagne avec un montant de 4 millions d'euros investis à destination des témoins. (...) Trop souvent, quand ça se produit, les gens n'interviennent pas. Nous devons opérer un changement de société, passer à une société de la vigilance où l'on considère que le harcèlement de rue, les violences conjugales ou intrafamiliales ne sont pas des affaires privées. Ce sont des scènes de société et la responsabilité incombe à tous les citoyens d'intervenir pour empêcher cela. C'est le message que fera passer notre campagne de communication.
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