#PrendsMaPlainte : des témoignages de femmes dénoncent la mauvaise prise en charge des plaintes pour violences sexuelles
Le ministère de l'Intérieur assurait le 5 mars dernier que, selon un audit conduit à son initiative, 90% des femmes ayant porté plainte en 2020 pour des violences sexuelles étaient satisfaites de l'accueil en commissariat et gendarmerie. Pourtant, les témoignages contraires, recueillis par les associations, affluent.
Il y a quelques semaines, le ministère de l’Intérieur annonçait qu'en 2020, 90% des femmes ayant porté plainte pour violences, étaient satisfaites de l'accueil en commissariat, et gendarmerie. Des chiffres présentés le 5 mars dernier selon une étude menée auprès de 2 000 victimes, et qui à l'époque avait laissé les associations perplexes. Pour vérifier, le collectif féministe #NousToutes a lancé un appel à témoignages, dans une enquête intitulée #PrendsMaPlainte, et a reçu 3 500 réponses en 15 jours.
66% des témoignages font état d'une mauvaise prise en charge
Selon le document, 66% des témoignages font état d'une mauvaise prise en charge : culpabilisation, refus de plainte... C'est ce que Patricia, 54 ans, a dû affronter après avoir dénoncé des viols conjugaux de la part de son compagnon : "À la fin du premier confinement, explique-t-elle, je n'arrivais plus à supporter tout ce qu'il me faisait subir. La gendarme qui m'a reçue, quand j'ai porté plainte, m'a dit : 'Mais moi, quand je dis non à mon homme, non c'est non. Pourquoi ne pas quitter le lit ? Pourquoi rester ?' En fait, justement parce qu'on est paralysée, parce qu'on a peur. C'était un interrogatoire, comme si c'était moi qui étais en faute."
Autre récit douloureux, celui de cette jeune étudiante violée dans un bar un soir : "La commissaire de police qui m'a reçue, témoigne-t-elle, m'a beaucoup posé de questions. Surtout sur mon état, sur l'alcool que j'avais bu, sur la tenue que je portais. Ce qui m'a énormément culpabilisée vis-à-vis de tout ça. Elle m'a demandé si c'était normal, un soir de semaine, d'aller s'alcooliser dans les bars, si cela m'étonnait de me faire violer."
"Elle s'est permis de dire que mon jean était très moulant, que j'étais ronde et qu'elle ne comprenait pas pourquoi je portais des vêtements comme cela. J'étais complètement effondrée et je lui ai dit que je ne voulais plus jamais la revoir de ma vie et que souhaitais retirer ma plainte."
Une victimeà franceinfo
Pour Caroline de Haas, co-fondatrice du collectif #Nous toutes, il fallait enquêter sur ces chiffres du ministère. "L'audit du ministère de l'Intérieur qui dit que 90% des femmes seraient satisfaites de l'accueil en commissariat ou en gendarmerie est tout simplement indécent, dénonce-t-elle. Il est indécent parce qu'il ne correspond en rien à la réalité de ce que vivent les victimes de violences sexuelles sur le terrain." "Par ailleurs, poursuit Caroline de Haas, c'est dangereux sur le plan politique puisque si le ministère de l'Intérieur dit aux gendarmes et aux policiers que dans 90% des cas, ils font bien leur travail, il n'y a aucune chance que les forces de l'ordre changent leurs pratiques."
Selon la militante, si le recueil des plaintes était plus exigeant, des progrès pourraient être réalisés dans la prise en charge judiciaire. À ce jour, 70% des plaintes pour viol sont classées sans suite.
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