Paris 2024 : Kevin Mayer vise la qualification olympique à San Diego et "tous les voyants sont au vert", affirme son coach
Une longue course contre la montre jusqu'au Stade de France. Après avoir dû déclarer forfait pour le décathlon de Brisbane (Australie) en décembre, Kevin Mayer sera au départ de celui de San Diego (Californie), à partir de jeudi 21 mars, afin de décrocher les minimas pour se qualifier aux Jeux olympiques de Paris. Arrivé le 5 mars à l'université de San Diego State en compagnie de son staff, le double vice-champion olympique (2016, 2021) est "confiant" selon son entraîneur, Alexandre Bonacorsi. "Tous les voyants sont au vert, tout va plutôt bien. Il n'y a pas de signe qui nous alerte gravement. Il est confiant au vu de sa préparation, car on a enchaîné plusieurs mois d'entraînement sans gros frein ou gros pépin physique. Il s'est senti progresser constamment depuis 3-4 mois."
L'aboutissement d'une longue préparation depuis les Mondiaux de Budapest, en août 2023, où il avait abandonné pour une blessure à la hanche. A un an des Jeux, le décathlonien avait préféré ne prendre aucun risque dans une discipline très éprouvante physiquement. "C'est quelque chose qu'on avait anticipé : ne jamais revivre Doha, ne jamais se créer une dette physique. C'est pour ça que la décision était si simple à prendre, on l'avait anticipée", dévoilait alors son entraîneur au micro d'Eurosport. "Le but, c'est de ne rien laisser au hasard, j'essaierai de maîtriser tout ce que je peux maîtriser. Je sais ce qu'il faut faire. La frustration d'aujourd'hui va bien me servir", enchaînait son poulain.
Une préparation tronquée
S'en est suivi un faux-départ à Brisbane, ou il avait préféré renoncer en raison d'un manque de repères sur les haies malgré l'absence de gêne. Kevin Mayer avait estimé que c'était "le choix de la raison". Lors des championnats de France en salle à Miramas en février, il avait stoppé son effort à cause d'une douleur à l'ischio lors de la première épreuve, le 60 mètres, avant de participer au concours du poids, où il avait volontairement mordu ses essais.
Il avait conclu avec un bon concours de la perche, et une barre à 5,15 m. "Mon retour ne s'est pas passé comme prévu. Mercredi, j'ai mis le pied dans un trou et je me suis fait une entorse à la cheville en marchant. Je suis arrivé explosé. J'ai passé des bonnes perches, mais il n'y avait vraiment pas de jus", regrettait-il à l'arrivée. "On sortait d'une grosse période de travail au moment des France élite, nous savions tous les deux qu'il était fatigué, mais il avait quand même l'envie d'aller se confronter", a développé mardi son coach. "C'était frustrant pour lui, car les France élite c'est 2-3 semaines avant le grand championnat, et là en l'occurrence un décathlon de qualification. C'est la période où il est dans le creux de la vague. Ensuite, il remonte la pente pour être performant et atteindre son objectif."
Le voici un mois plus tard sous le soleil californien afin de se préparer à une échéance qui n'est pas encore décisive, mais qui lui faciliterait bien la vie, à quatre mois des Jeux. "Faire un décathlon afin de se qualifier pour les JO, ce n'est pas ce qu'il aime le plus, mais c'est un passage obligatoire. Il l'a déjà fait par le passé, il sait ce que c'est", a confirmé son entraîneur.
Quinzième pour ses premiers Jeux à Londres en 2012, Kevin Mayer avait quatre ans plus tard obtenu les minimas juste avant les Jeux de Rio. C'était fin mai 2016, en Autriche, et cela ne l'avait pas empêché de décrocher la première de ses deux médailles d'argent olympiques. A Tokyo, il s'était facilité la vie en décrochant les minimas dès décembre, à plus de six mois de l'échéance, pour le même résultat.
Depuis, il alterne les sommets et les coups d'arrêt : un titre mondial à Eugene (Oregon) en 2022 et un sacre européen en salle à Istanbul en 2023, mais aussi trois abandons (Mondiaux en salle de Belgrade 2022, Championnats d'Europe de Munich 2022 et donc les Mondiaux de Budapest en 2023), pour un tendon d'Achille récalcitrant et cette hanche qui grince. Lui qui termine en moyenne un décathlon par an depuis 2016 devra en disputer deux cette année s'il se qualifie, et peut-être un troisième s'il en venait à rater le coche à San Diego.
Du repos avant San Diego
"San Diego, c'est dans un mois", expliquait-il à Miramas mi-février. On va aller se reposer, je suis un très gros travailleur et parfois, j'en fais un peu trop. Il faut vraiment que je mette un gros frein sur l'entraînement et que je commence à faire du jus." Le jus, justement, a été fait pendant deux semaines avant cette compétition de niveau universitaire qui débutera jeudi à 18h30 (heure française) par le 100 mètres et se finira vendredi à 22h30 (heure française) par le 1500 mètres. "Il n'y aura pas de gros risques qui seront pris ici, on analysera en temps réel", a prévenu son coach.
L'heure n'est donc pas à l'urgence pour le décathlonien français, mais passer les 8460 points requis (son record personnel, et du monde, est à 9126) lancerait pleinement son aventure olympique, avec un repos de plusieurs semaines bienvenu. "J'aimerais bien faire les minimas pour avoir une ligne droite tracée avant les Jeux. Même si j'ai jusqu'à juin, je ne suis pas pressé, il n'y a pas de pression", prévenait-il aux championnats de France en salle en février.
Jusqu'au 30 juin pour se qualifier
S'il échoue, il lui restera jusqu'au 30 juin, dates des championnats de France en plein air, pour se qualifier. "Dans l'idéal, il faudra être qualifié avant, car ça ne laisserait que quatre semaines avant les JO. Mais dans la tête de Kevin, s'il faut se qualifier aux Elite pour être serein avec son corps et ne prendre aucun risque avant les Jeux, il sera capable de le faire. Il y aura des plans B, C, D, E, F s'il faut, et ils existent déjà", a confirmé son coach.
S'il termine son premier décathlon depuis les Mondiaux 2022, il y a de fortes chances qu'il s'ouvre la voie vers Paris. L'objectif d'une vie à 32 ans, pour lui qui cherche toujours l'or olympique. Mais à entendre son coach, Kevin Mayer gère parfaitement cette pression immense qui pèse sur ses épaules, alors que l'athlétisme français traverse une période de turbulences au niveau des résultats. "Je le trouve beaucoup plus serein que les années précédentes. Il arrive à avoir du recul plus rapidement et facilement sur les petites gênes qu'il a pu avoir. J'ai l'impression qu'il sait où il va, alors qu'on pourrait penser que ce serait le contraire, avec une pression panique en cette année olympique. Je trouve qu'il a une bonne approche", conclut Alexandre Bonacorsi.
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