"On n'a pas décidé de tout ça" : les footballeurs réticents à discuter de baisses de salaires
Les représentants des joueurs et les présidents de clubs se retrouvent mardi pour négocier des baisses de salaires, au moment où les clubs doivent faire face à la crise du Covid-19 et à la faillite de Mediapro.
Des négociations s’ouvrent mardi 12 janvier entre Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP), le syndicat des joueurs en France, et des présidents de clubs sur le sujet de la baisse des rémunérations des joueurs dans les championnats de Ligue 1 et Ligue 2. Après des reports de salaires négociés au printemps, il s'agit cette fois-ci de franchir un palier, en négociant de réelles diminutions des rémunérations sur du long terme, au moins jusqu’en 2024, et de faire face à une situation économique compliquée.
Au printemps dernier, au moment des premières négociations sur ce sujet sensible, la grogne s’était installée dans de nombreux clubs. Les joueurs tiennent à leur rémunération intégrale. Pour la plupart d’entre eux, même s’ils sont conscients du péril qui menace leur club avec la crise sanitaire et la défection du principal diffuseur, Mediapro, il est délicat de subir une situation dont ils ne sont pas responsables. "On sait qu'il y a des difficultés liées au Covid et aux droits télé, ce n'est pas nous qui avons décidé tout ça, explique Clément Grenier, milieu de terrain du Stade Rennais. On est simplement des acteurs. On est là simplement pour gagner des matchs, donner du plaisir et essayer d'en prendre."
"Les décisions des instances, cela nous dépasse parce que l'on n'est pas dans ces sphères. On verra quand ce sera le moment d'échanger et de discuter. Il faut évidemment que le foot continue d'avancer et de grandir mais on n'a pas décidé de tout ça."
Clément Grenier, joueur du Stade Rennaisà franceinfo
Car la situation financière des clubs s'est aussi jouée avant la crise sanitaire, estiment les acteurs du foot français comme André Villas-Boas, l'entraîneur de l'Olympique de Marseille : "Ils ont perdu la tête. Ils ont perdu totalement le contrôle du marché des transferts. On a fait des conneries avec les transferts de 300 millions, etc. Évidemment cela va toucher les employés du jeu, comme nous, mais c'est peut-être une bonne opportunité historique pour changer la face du foot."
La baisse des salaires des joueurs est bien "une solution", estime Pierre Rondeau, professeur d’économie à la Sport Management School de Paris, directeur de l’observatoire du sport de la Fondation Jean-Jaurès. "C'est une solution, mais il y en a d'autres, comme la régulation des transferts, la régulation du nombre de joueurs sous contrat", assure-t-il, trouvant "illusoire et même hypocrite de vouloir imposer une baisse généralisée pour des footballeurs qui sont effectivement tous différents".
Des négociations au cas par cas
L’UNFP est prête à discuter avec plusieurs présidents pour trouver un accord. L’enjeu est de taille, la masse salariale représente entre 40 et 70% des dépenses des clubs. Le président de Reims, Jean-Pierre Caillot, espère que le soutien du syndicat fera infléchir la position de la majorité des joueurs, sachant, précise-t-il, que les négociations se feront au cas par cas. "On va essayer de trouver quelque chose qui puisse s'appliquer au maximum de clubs, explique le président de Reims. C'est le droit français : les négociations se font club par club et individu par individu. On a tendance à faire du bashing, mais les joueurs aiment leurs clubs, même s'ils sont de passage pour six mois à un an. Ils aiment les institutions dans lesquelles ils sont."
"Je ne doute pas que si les joueurs doivent faire un effort, on arrivera à obtenir quelque chose. Quand il y a une directive qui est donnée par le syndicat des joueurs, c'est un peu plus simple de le faire entendre à la majorité."
Jean-Pierre Caillot, président du Stade de Reimsà franceinfo
L’UNFP n’a cependant aucun pouvoir d’imposer quoi que ce soit en matière de salaires. Le syndicat des joueurs souligne que tout accord ne sera "qu'indicatif et incitatif".
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