Lille-Chelsea : on vous explique pourquoi le club anglais est au bord du gouffre à cause de la guerre en Ukraine
Favoris face à Lille en huitième de finale retour de la Ligue des champions, mercredi, les Blues pourraient être entraînés dans l'abîme par leur propriétaire russe, Roman Abramovitch.
Quand tout se passe bien sur le plan sportif, la sérénité d'un club n'est pas forcément garantie, même à court terme. En ballotage très favorable après sa victoire 2-0 à l'aller, Chelsea se déplace à Lille en huitième de finale retour de Ligue des champions, mercredi 16 mars, dans un contexte critique. Le club londonien se trouve sous la menace d'une faillite à cause de son propriétaire, Roman Abramovitch.
Epinglé pour ses relations avec le Kremlin, l'oligarque russe a été visé par de lourdes sanctions, au moment où les instances internationales tentent d'isoler au maximum le régime de Vladimir Poutine, qui a déclenché un conflit armé en envahissant l'Ukraine le 24 février. Dans un premier temps, le gouvernement britannique a gelé tous les avoirs d'Abramovitch le 10 mars, l'interdisant également d'entrer sur le territoire. Le milliardaire (dont la fortune est estimée à plus de 12 milliards de dollars) a été destitué de son statut de dirigeant de Chelsea par la Premier League deux jours plus tard.
Un propriétaire embarrassant
Or les Blues vivent depuis 2003 grâce à l'argent d'Abramovitch. Ce dernier leur a permis de changer de dimension sur les scènes nationale et continentale. Depuis l'arrivée du Russe, le club a remporté deux Ligues des champions (2012, 2021) et cinq titres de champion d'Angleterre (2005, 2006, 2010, 2015, 2017), alors qu'il ne faisait pas partie du gratin du football londonien jusqu'alors.
Les sanctions touchant Roman Abramovich ont entraîné de lourdes répercussions sur l'entité Chelsea. La billetterie a été fermée, rendant les seuls abonnés autorisés à se rendre à Stamford Bridge, mais cela ne vaut que pour les matchs sur la scène nationale. La vente des produits à l'effigie du club a été suspendue, comme le précise le club sur son site (contenu en anglais). De plus, selon le journaliste du Times, Martyn Ziegler (contenu en anglais), Chelsea n'a plus le droit à toucher à son effectif en faisant signer de nouveaux contrats aux joueurs, même à ceux dont le bail expire à la fin de la saison.
Les joueurs et le staff sont toujours payés, mais toutes les dépenses de jour de match sont également strictement encadrées, à hauteur d'un million d'euros lors des rencontres à domicile et à seulement 23 000 euros pour les déplacements, comme à Lille mercredi. La situation a inspiré un trait d'humour à l'entraîneur des Blues, Thomas Tuchel, en conférence de presse lundi, à propos du voyage à Lille : "Nous avons un avion. Nous pouvons faire l'aller-retour, mais si l'on ne peut pas on prendra le bus. Je suis prêt aussi à conduire une voiture à sept places s'il le faut".
"We can go by plane. If not, we go by train. If not, we go by bus. If not, I drive a seven-seater!"
— Sky Sports Premier League (@SkySportsPL) March 13, 2022
Thomas Tuchel is letting nothing stop him from getting to Lille for Chelsea's midweek Champions League fixture... pic.twitter.com/IetZn2GRNT
Le technicien allemand peut encore se le permettre dans la mesure où son équipe n'a pour l'heure pas subi de contrecoup sur le plan sportif. Les Blues restent même sur quatre succès de rang, à Luton (3-2), Burnley (4-0), Norwich (3-1), puis à domicile contre Newcastle (1-0) dimanche. Mais les joueurs eux-mêmes savent que l'essentiel n'est plus sur le pré. "J'espère que nous avons pu mettre quelques sourires sur le visage de fans aujourd'hui", a écrit sur Twitter Kai Havertz, unique buteur en tout fin de match contre les Magpies.
Hope we put a few smiles on the fans faces today! #COYB pic.twitter.com/al97ntKiYW
— Kai Havertz (@kaihavertz29) March 13, 2022
Chelsea peut encore disputer ses matchs jusqu'à la fin de la saison grâce à une licence spéciale accordée par le gouvernement britannique, qui expirera le 30 mai. Cependant, le vainqueur de la dernière Ligue des champions, sacré champion du monde des clubs en janvier, pourrait ne pas tenir jusqu'à cette date. Le Times (article en anglais) expliquait vendredi que Chelsea était en proie à une paralysie financière, alors que les cartes de crédit du club ont été gelées.
"Il faut admettre que nous avançons au jour le jour parce que tout cela n'est pas entre nos mains", a confirmé samedi le directeur technique et de la performance de Chelsea, Petr Cech à Sky Sports, cité par l'AFP.
Lâché également par deux de ses sponsors principaux, Three et Hyundai, qui figurent sur son maillot, le club londonien semble déboussolé. Il a émis la requête que son match de Cup à Middlesbrough samedi soit joué à huis clos pour "préserver l'équité sportive" parce qu'il n'a plus le droit de vendre ses 4 500 billets à l'extérieur. Les Blues n'ont pas obtenu ce qu'il reclamait, ont-ils annoncé sur leur site (contenu en anglais), mardi.
Une vente urgente
Le salut de Chelsea ne viendra que par un rachat. Roman Abramovich a mis le club en vente le 2 mars au prix de 3,6 milliards d'euros, selon l'AFP, lui qui l'avait acheté 170 millions. Cependant, les sanctions sont tombées sur l'homme d'affaires russes, et la vente a été suspendue par le gouvernement britannique, qui a désormais un droit de regard sur les offres des potentiels repreneurs.
En attendant, l'étau se resserre autour d'Abramovich, toujours techniquement propriétaire du club. L'Union européenne a l'homme d'affaires dans son viseur. Son nom apparaît dans une liste noire publiée mardi au Journal officiel du Conseil de l'UE, qui estime que sa "connexion avec le leader russe [Vladimir Poutine] lui a permis de maintenir sa fortune considérable", même si l'intéressé s'est toujours défendu d'être un proche du maître du Kremlin.
En outre, la BBC a affirmé mardi avoir pu consulter un document de cinq pages, extrait des archives de la police russe, qui met en évidence le rôle important du Russe dans plusieurs affaires de corruption. Ce dernier serait devenu milliardaire grâce à l'achat truqué de la compagnie pétrolière Sibneft, qu'il aurait achetée en 1995 moyennant 250 millions de dollars, avant de la revendre à hauteur de 13 milliards de dollars au gouvernement russe.
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