Match PSG-Basaksehir interrompu : "Pendant longtemps celui qui était victime de racisme était tout seul", se souvient Joseph-Antoine Bell
L'ancien gardien de but se réjouit que les joueurs aient quitté le terrain à la suite d'accusations de propos racistes et prédit une généralisation de ce rejet. "Dans le public, on ne va plus l'accepter", assure-t-il. "Lorsqu'il y a un geste déplacé, les autres se désolidarisent".
"Pourquoi il a dit 'négro' ?" La question a été répétée plusieurs fois mardi soir sur le terrain du Parc des Pinces par Pierre Achille Webo, entraîneur adjoint noir du club turc de Basaksehir. Ces propos racistes auraient été tenus à son encontre par le quatrième arbitre. Le match a rapidement été interrompu, les joueurs ayant décidé de quitter le terrain. "Pendant longtemps celui qui était victime de racisme était tout seul", a expliqué mercredi 9 décembre sur franceinfo Joseph-Antoine Bell, Franco-Camerounais, ancien gardien de but notamment à l'OM et aux Girondins de Bordeaux.
franceinfo : Que pensez-vous de ce qu'il s'est passé ?
Joseph-Antoine Bell : Il y a longtemps que cela aurait dû arriver. Pendant longtemps celui qui était victime de racisme était tout seul. C'était mon cas.
"Je résistais tout seul, je me battais tout seul."
Joseph-Antoine Bell, ancien gardien de but franco-camerounaisà franceinfo
Peut-être que les autres admiraient mon mental mais ils ne se montraient pas solidaires, il n'y avait pas d'actes concrets.
Comment l'expliquez-vous ?
Ces actes-là c'est ce qu'on appelle du racisme ordinaire. Ce sont des gens qui ont été éduqués avec une façon de parler, de se comporter, qui est dans les mœurs et on ne se rend pas compte que c'est du racisme. Noël Le Graët disait il y a quelques temps qu'il n'y avait pas de racisme dans le football. C'est très bien qu'en quelques mois, il ait progressé comme ça.
Que pensez-vous des explications de l'arbitre ?
L'arbitre s'est défendu hier en disant que 'negro' en roumain c'est juste pour désigner le noir, mais il ne se rend pas compte qu'il se condamne. En même temps, on va lui opposer une réponse aussi ordinaire. Est-ce que pour désigner un joueur blanc, il n'aurait pas dit le numéro 8 du Basaksehir ou le numéro 10 du PSG ? Il n'aurait pas dit le joueur blanc. Il y a deux poids, deux mesures qui ne vont pas. Mais il ne s'en aperçoit pas, c'est comme ça pour la plupart des gens. Avant, les joueurs avaient l'impression qu'il fallait être concentré et qu'on ne s'occupait pas de ça. Aujourd'hui, on se rend compte qu'on ne peut plus et qu'il faudrait que le football joue son rôle. Le vrai rôle du foot n'est pas de gagner le match mais d'apporter au public quelque chose et en particulier cette éducation qui apprend à vivre avec les autres, à respecter les règlements, la hiérarchie.
Qu'en est-il des supporters racistes ?
C'est compliqué. Ce qui s'est passé hier ne fait pas avancer la lutte dans le sport mais cela fait avancer la lutte dans le monde. Bientôt, il sera à la mode de pouvoir réagir contre cela. Dans le public, on ne va plus l'accepter. Avant, en Angleterre le hooliganisme était à la mode, maintenant il a quasiment disparu. Lorsqu'il y a un geste déplacé, les autres se désolidarisent. Avec les caméras, on va l'isoler et le sortir du stade.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.