Un joueur homosexuel de Premier League avoue avoir peur de faire son coming-out
L'homosexualité reste un tabou dans le football mondial et l'Angleterre ne fait pas exception. Dans une lettre ouverte, relayée vendredi soir par le Mirror, un joueur anonyme de Premier League explique avoir peur de faire son coming-out.
"Cela peut être un cauchemar"
"Rien que de l'écrire dans cette lettre est un grand pas pour moi, explique-t-il. Seulement ma famille et un petit groupe d'amis sont au courant de ma sexualité. Je ne me sens pas prêt pour le partager avec mon équipe ou mon entraîneur. C'est dur. J'ai passé la plus grande partie de ma vie avec ces gars et quand nous sommes sur le terrain, nous sommes une équipe. Mais quelque chose au fond de moi rend impossible de leur dire ce que je ressens. J'espère pouvoir le faire un jour. Je sais depuis que j'ai 19 ans que je suis gay. Comment est-ce de vivre comme ça ? Au quotidien, cela peut être un cauchemar. Et cela affecte de plus en plus ma santé mentale. Je me sens piégé et j'ai peur que dire la vérité ne fasse qu'empirer les choses."
Encore trop de préjugés
Pour lui, les mentalités dans le milieu footballistique, des supporters aux propriétaires des clubs, ne permettent pas aux joueurs homosexuels de révéler leur sexualité. "La vérité, c'est que je pense que le football n'est pas encore prêt pour qu'un joueur le dise, souligne-t-il. Il faudrait des changements radicaux pour que je me sente prêt. Ce dont le football a besoin, c'est d'éduquer les fans, les joueurs, les entraîneurs, les agents, les propriétaires, tout simplement tout le monde impliqué dans le milieu. Pour franchir cette marche, je dois sentir que je serai supporté à chaque étape. Aujourd'hui, ce n'est pas le cas. J'aimerais ne pas avoir à vivre ma vie comme ça. Mais la réalité c'est qu'il y a encore beaucoup de préjugés. J'entends sans cesse des chants et des commentaires homophobes des supporters, sans qu'ils visent quelqu'un en particulier. Pendant le match, je n'y pense pas. Je suis trop concentré. Mais c'est après que ça me touche."
Un mensonge quotidien qui l'empêche de construire sa vie en-dehors des terrains. "Je suis à un âge où j'aimerais être dans une relation, explique-t-il. Mais à cause de mon boulot, j'ai besoin d'un très haut niveau de confiance dans mon partenaire. Donc, pour le moment, j'évite tout simplement. J'espère un jour rencontrer quelqu'un en qui j'aurai assez confiance." En juin, l'ancien footballeur anglais Thomas Beattie, formé à Hull City avant d'évoluer en Amérique du Nord et en Asie, a avoué publiquement son homosexualité à ESPN. "Le fait qu'il ait dû attendre sa retraite veut tout dire, souligne le joueur anonyme dans sa lettre. Les footballeurs ont encore trop peur de gravir cette marche pendant qu'ils jouent."
Vers une retraite prématurée ?
Troy Deeney, l'attaquant de Watford, s'était exprimé sur le sujet une semaine avant. "Je dirais qu'il y a probablement une personne gay ou bi dans chaque équipe, avait-il déclaré dans un podcast de la BBC. Ils sont là, ils sont à 100% là. Je pense que les joueurs homosexuels sont vraiment très inquiets de devoir assumer la responsabilité d'être les premiers."
Le joueur bénéficie du soutien de la fondation Justin Fashanu, du nom de l'ancien joueur anglais qui s'est suicidé en 1998, après avoir fait son coming-out huit ans plus tôt. La fondation, créée par sa nièce en 2019, lutte contre les discriminations dans le football. "Peut-être que j'arriverai au point où je ne peux pas continuer à vivre ce mensonge. Dans ce cas, je prendrai ma retraite et ferai mon coming-out, affirme le joueur. Ce serait sans doute mettre à la poubelle des années très lucratives. Mais la tranquillité d'esprit n'a pas de prix. Et je ne veux pas vivre comme ça pour toujours."
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