Serie A : Rudi Garcia limogé par Naples, chronique d'une mission presque impossible pour le dernier coach français dans un grand championnat étranger
Son idylle napolitaine a tourné court. Quatre mois après sa nomination surprise sur le banc du champion d'Italie, le Français Rudi Garcia a été démis de ses fonctions, mardi 14 novembre, deux jours après une nouvelle défaite contre l'avant-dernier, Empoli (0-1). Cette éviction prématurée paraissait inéluctable pour l'ancien entraîneur de Marseille et Lyon, en proie à des résultats décevants et à des difficultés dans la gestion de son groupe. Après seulement 12 matchs de Serie A, il laisse le Napoli à la quatrième place, à 10 points du leader, l'Inter.
La greffe n'a jamais pris entre le champion d'Italie en titre et Garcia, dont la désignation avait largement surpris. L'ex-Manceau restait sur une expérience mitigée à Lyon (2019-2021) et sur dix mois sans éclat à Al-Nassr (Arabie saoudite), mais jouissait d'une bonne cote en Italie, héritée d'un passage plutôt fructueux à l'AS Roma (2013-2016). "Je n'ai peur de rien", déclarait-il lors d'une conférence de presse de présentation en grande pompe sous les dorures du prestigieux musée du Capodimonte, sur les hauteurs de Naples.
Mais le technicien français de 59 ans n'a pas su capitaliser sur le travail de son prédécesseur Luciano Spalletti, artisan du premier titre du Napoli depuis 33 ans avec un jeu audacieux. "C'est toujours très compliqué d'arriver derrière un entraîneur à succès, indiquait en octobre dernier Fabio Cannavaro, Ballon d'or 2006 et ex-icône locale, sur TV Play. Mais je ne m'attendais quand même pas à autant de difficultés..."
Sans éclat dans le jeu, tendu dans le vestiaire
Cette saison, le Napoli de Garcia, n'a gagné que deux fois sur sept dans son stade Maradona, où les Partenopei collectionnaient pourtant les succès l'an dernier. Il n'a gagné aucun match contre des grandes équipes (nul contre Milan, défaites contre le Real Madrid, la Lazio et la Fiorentina), des torts déjà reprochés lorsqu'il entraînait l'OL ou l'OM. En Ligue des champions, Naples est dans les clous (deuxième du groupe C derrière le Real avec sept points), mais un nul récent contre l'Union Berlin (1-1), jusque-là sur une série de 12 défaites, ternit le bilan.
Au-delà de ces résultats poussifs à défaut d'être alarmants, Rudi Garcia a surtout été fustigé pour un jeu souvent insuffisant par rapport à l'équipe qui avait inscrit 77 buts en 38 matchs la saison dernière. "Le Napoli ne trouve pas de continuité, il a perdu l'identité qui lui avait permis de remporter le Scudetto", alertait à la mi-octobre l'ancien défenseur emblématique Ciro Ferrara.
Surtout, Garcia a rapidement paru dépassé dans la gestion de son groupe. Dès le début de saison, son choix de sortir la star Khvicha Kvaratskhelia alors que son équipe était tenue en échec par le Genoa, un promu (2-2), avait été critiqué dans la presse transalpine. Le remplacement de l'autre joyau Victor Osimhen dans des circonstances analogues (0-0 à Bologne) un mois plus tard avait valu à Garcia de vives remontrances de la part de l'attaquant nigérian.
"Il n'a plus aucune autorité sur son vestiaire", jugeait alors le fantasque ex-attaquant Antonio Cassano. Dans un contexte napolitain explosif, où les moindres faits et gestes sont surinterprétés par les innombrables médias locaux, ces péripéties ont pollué le court mandat de Garcia. Il n'en fallait, en tout cas, pas plus pour que son départ ne soit évoqué quotidiennement, même si son prédécesseur n'a pas souhaité hurler avec la meute de ses détracteurs. "J'ai beaucoup de respect pour Rudi Garcia, il a montré qu'il était une personne décente, équilibrée. Ce n'était pas juste dès le premier match de le comparer avec ce qui avait été fait avec cette équipe avant", a regretté Luciano Spalletti, désormais sélectionneur de l'Italie.
Une planche savonnée
Même si son échec est difficilement contestable, le Français n'a pas non plus été aidé par son président Aurelio De Laurentiis. Ce producteur de cinéma très charismatique, propriétaire du Napoli depuis 2004 et souvent raillé par les tifosi pour son attentisme sur le marché des transferts, n'a pas vraiment renforcé l'équipe. Celle-ci a toutefois enregistré le départ de Min-jae Kim, la pierre angulaire de sa défense l'an passé, sans réellement le remplacer. En conséquence, Naples a déjà perdu trois fois, soit quasiment autant que sur l'ensemble de la saison passée (quatre revers).
Rudi Garcia pouvait difficilement survivre à un tel bilan. Après des fins de bail tourmentées à Marseille puis Lyon, l'entraîneur champion de France en 2011 avec Lille a échoué à se relancer, à bientôt 60 ans – il les aura en février 2024. Avec son renvoi, il n'y a plus d'entraîneur français évoluant dans un club étranger parmi les cinq grands championnats. Et ils ne sont que huit en Ligue 1.
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