Invictus games : ancien tireur de précision, le caporal-chef Thomas s'est reconstruit et rêve de briller aux Jeux paralympiques de Paris
L’athlète, qui participe à la compétition sportive militaire, a également intégré l’équipe de France de volley assis en 2020, dans l’optique des Jeux de Paris 2024.
Assis sur une petite estrade à côté de l’aire de lancer du Centre national des sports de la défense (CNSD) à Fontainebleau (Seine-et-Marne), Thomas a terminé son entraînement du jour. Crâne rasé et lunettes de soleil sur le nez, ce militaire de 33 ans, dont la bonne humeur est communicative, arbore fièrement son tee-shirt bleu marine floqué "Invictus Games 2022". Le 16 avril, il participera pour la première fois à cette compétition sportive internationale. Créée il y a huit ans par le prince Harry d’Angleterre, elle est réservée aux militaires, actuels ou anciens, en situation de handicap.
Le caporal-chef de 1re classe Thomas (CC1) fait ainsi partie des 500 athlètes, issus d’une vingtaine de pays, à concourir aux Invictus Games. Le militaire, aujourd’hui sportif de haut niveau, est engagé dans quatre disciplines : le lancer de disque, l’aviron en salle, le basket fauteuil et le rugby fauteuil, dont il est le capitaine pour ces deux équipes. Les Invictus encouragent en effet les sportifs à s’engager dans plusieurs disciplines. Si la compétition ressemble sur la forme aux Paralympiques (catégories, épreuves, événement à portée internationale), elle diffère en revanche sur le fond. Celle-ci prône avant tout, non pas la performance, mais la reconstruction physique et mentale par le sport.
Un accident de moto bouleverse sa vie
Ancien tireur de précision en compagnie de combat, au 3e régiment de parachutistes d'infanterie de marine, le caporal-chef de 1re classe Thomas (CC1) est victime d’un accident de moto en 2013. Il avait alors 25 ans. "C’était mon premier jour de permission avant un départ en mission à l’étranger. La seule chose dont je me souviens est que j’étais à moto, qu’il était tôt le matin, et que j’ai percuté un arbre", confie celui qui s'est engagé dans l'armée quatre ans plus tôt.
Pendant deux ans, les médecins de l’hôpital d'instruction des armées Percy à Clamart (Hauts-de-Seine) tentent tout afin de sauver sa jambe droite. Mais les infections s’enchaînent, la douleur persiste et les tentatives pour la sauver échouent les unes après les autres. Après une énième opération qui ne se déroule pas comme prévu, Thomas doit faire un choix. "Si je ne voulais plus me réveiller en réanimation tous les quatre matins et en finir avec cette douleur permanente, je devais choisir l’amputation, au-dessus du genou, ce que j’ai fait", se remémore-t-il.
Sa rééducation commence alors. Rapidement Thomas demande à y associer le sport. "Faire du sport était une évidence, affirme le militaire, très sportif depuis toujours. Il a été un élément essentiel dans mon processus de reconstruction. Mais la reprise a été un calvaire. J’avais perdu 20 kg. Je n’avais plus de force nulle part. Je ne me reconnaissais pas. Puis, c’est revenu, et ensuite je ne me suis plus mis aucune limite."
La déception de l’édition 2018
En 2017, il est apte à reprendre le travail au sein de l’armée et débute à un poste aux ressources humaines. Au même moment, il rejoint le dispositif d’accompagnement du Centre national des sports de la défense (CNSD) à Fontainebleau. Lors des pré-sélections des athlètes, Thomas montre des prédispositions pour le lancer, l’aviron et les sports collectifs. Ce sportif touche-à-tout possède de grandes facilités d’adaptation, et est à l’aise tant sur des disciplines collectives qu’individuelles. "Avant mon accident, je me disais déjà que tout était possible. Mais depuis que je vis avec mon handicap, je me le répète encore plus. Rien n'est impossible, il y a toujours un moyen d’arriver à nos objectifs", assure avec conviction Thomas.
Ces capacités sportives lui permettent ainsi d’intégrer le groupe d’athlètes préparant les Invictus Games. L’objectif est d’aller représenter la France en 2018 à Sydney (Australie). "Mais j’apprends au dernier moment que je ne pourrais finalement pas y participer car le règlement de l’époque n’autorisait que les militaires blessés en service à participer, ce qui n’était pas mon cas. La nouvelle a été très dure à accepter. J’ai été très déçu à tel point que j'ai tout lâché pendant deux mois", explique-t-il.
Quelques mois plus tard, l’horizon s’éclaircit. Cette particularité du règlement est supprimée. "Mon coach m’a recontacté et m’a annoncé que je pouvais participer à la prochaine édition, celle de 2020. Je n’en revenais pas", se remémore Thomas, tout sourire. Reportée de deux ans à cause de la pandémie mondiale de coronavirus, la cinquième édition aura finalement lieu du 16 au 22 avril 2022. Avec quelles ambitions pour Thomas ? "Donner le meilleur de moi-même et de profiter du moment", répond le militaire. Viser une médaille sera certes un objectif personnel, mais loin d’être le principal.
"A travers les Invictus Games, on veut montrer aux autres blessés qui sont encore à l’hôpital ou suivi par la Cellule d'aide aux blessés de l'armée de terre (CABAT) qu’on peut y arriver, que rien n’est impossible."
Le caporal-chef Thomasà franceinfo: sport
Les Invictus Games ne sont qu’une étape dans le parcours de ces militaires. Pour Thomas, l’histoire continue. Une fois les Invictus Games terminés, il se concentrera sur son nouvel objectif et non des moindres : celui des Jeux paralympiques de Paris 2024. Intégré en 2020 au sein de l'équipe de France de volley assis, Thomas souhaite profiter pleinement de cette nouvelle opportunité. "Les Jeux, en France, dans deux ans. Rien que d'y penser, cela me fait déjà rêver et avoir l’honneur et le privilège de représenter les couleurs de son pays sur son sol, ça n’arrive qu’une fois dans une vie d’athlète", glisse-t-il avec enthousiasme.
Un bel horizon qui donne à son parcours un autre relief : "Quand je me refais le film de ma vie depuis mon accident, je réalise d’où je viens et je me rappelle de toutes les étapes par lesquelles je suis passé et où cela m'a mené… Aujourd'hui, j’arrive à me rendre compte du chemin parcouru, depuis la réanimation jusqu'au haut niveau." Et celui du haut niveau ne fait, lui, que commencer.
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