Coupe du monde de rugby : puissants, durs au mal et aussi dangereux qu'en 2019... Les Springboks restent des poids lourds
Si le destin voulait envoyer des signes, il ne s'y prendrait pas autrement. Dimanche 10 septembre à Marseille, l'Afrique du Sud va disputer son neuvième match de Coupe du monde sur le sol français, contre l'Ecosse (à 17h45 en direct sur France 2 et france.tv). Les Springboks sont les seuls à ne s'y être jamais inclinés et, mieux, à avoir remporté la seule finale disputée dans l'Hexagone, contre l'Angleterre il y a seize ans. Ces données brutes, étalées entre 1999 et 2007, relèvent aujourd'hui de l'anecdote mais sont de bons souvenirs sur lesquels s'appuyer.
Il n'est pas dit que les Sud-Africains, tenants du titre et forts d'un succès mémorable contre les All Blacks il y a deux semaines (35-7), aient besoin de puiser dedans. Et ce même s'il est peu probable que le Vélodrome soit acquis à leur cause, si l'on s'en réfère à la profusion de maillots, kilts ou cornemuses écossais aperçus près du Vieux-Port. Rallier Marseille en provenance d'Edimbourg est évidemment plus aisé que depuis Pretoria. Les Boks s'adapteront. Après tout, il n'a suffi que d'un stage de préparation sur l'île de Beauté pour que le capitaine Siya Kolisi s'y sente chez lui, au point de se sentir investi d'une mission de "représenter le peuple corse".
Le trait d'esprit dit quelque chose de la légèreté autour du groupe sud-africain. "Nous ne ressentons jamais la pression, nous sommes transparents à ce sujet", a assuré le même Kolisi en conférence de presse. Le flegme devrait durer si l'idylle avec la France s'étend jusqu'en finale, où les Sud-africains pourraient doublement marquer l'histoire. D'abord en réalisant la passe de deux titres consécutifs, une performance seulement réalisée par les All Blacks en 2011 et 2015. Et, en cas de sacre, leur sélection deviendrait la plus titrée de l'histoire avec quatre couronnes, en plus de celles de 1995, 2007 et 2019. Le tout en seulement huit participations, pour une nation exclue des deux premières éditions, lorsque l'Apartheid était encore en vigueur.
L'ossature de 2019 est la même
Avant de se projeter vers ces sommets, il faudra s'extirper d'une poule B coriace, composée de trois des cinq meilleures nations mondiales avec l'Ecosse et l'Irlande. Si le XV du Chardon paraît légèrement en retrait, on le sait imprévisible et capable de fulgurances dévastatrices. Pour les enrayer, les Sud-africains ont l'atout de l'expérience : 15 des 23 joueurs sur la feuille de match étaient déjà là en 2019, pour une moyenne d'âge de 31 ans. Ce quota aurait d'ailleurs été plus important si l'ouvreur Handré Pollard et le centre Lukhanyo Am n'avaient pas déclaré forfait.
Sur le terrain, ne comptez pas non plus sur les Springboks pour renier leurs valeurs. "Pour nous, le rugby ne changera jamais, a froidement indiqué le sélectionneur Jacques Nienaber. Il faut dominer la possession [...], une bonne conquête et du rythme en attaque." Autrement dit, le défi physique dans les rucks, symbolisé par le colosse Eben Etzebeth (2,03 m, 117 kg), reste de mise. La dernière venue des Boks à Marseille pour une courte défaite contre les Bleus en novembre 2022 (26-30), avait d'ailleurs viré à la caricature de ce jeu frontal. "Le rugby, c’est une affaire de domination, de dimension physique", maintient l'adjoint Deon Davids.
Du jeu frontal, mais "plus de variation"
Ce travail de sape sert à lessiver l'adversaire et ouvrir la voie à Cheslin Kolbe (ex-Toulouse et Toulon), Kurt-Lee Arendse ou Damian Willemse, les funambules du triangle arrière. Mais la recette doit être remise au goût du jour, dans un sport en perpétuelle évolution. "Il faut être capable de marquer des points alors qu’en 2019, on pouvait l’emporter avec une bonne défense, un bon jeu au pied, une bonne touche et une bonne mêlée", a schématisé le sélectionneur Nienaber. Parfois moqué pour son usage incessant des coups de pied dans la boîte il y a quatre ans, le demi de mêlée Faf de Klerk a ainsi promis d'apporter "plus de variations" dans son jeu.
De fait, les Springboks se sont "adaptés" et tournent en 2023 à 4,5 essais inscrits en moyenne par match, dont plusieurs cartons contre le Pays de Galles (52-16) ou l'Australie (43-12), en plus de leur victoire historique contre la Nouvelle-Zélande. Les bases sont solides, même si Jacques Nienaber juge que son équipe n'est "pas encore au point".
Si tel est vraiment le cas, le calendrier ne lui accorde qu'une faible marge. Avec l'opposition de style contre l'Ecosse en apéritif, suivie du choc au sommet face à l'Irlande – victorieuse des deux dernières confrontations – deux semaines plus tard, puis un éventuel quart contre la France ou la Nouvelle-Zélande, les Sud-africains ne peuvent pas se permettre une entame piano. Et si leur match contre le Chardon tourne au vinaigre, ils convoqueront à nouveau leur destin en rappelant que leur revers inaugural il y a quatre ans contre les All Blacks (13-23) ne les avait pas empêchés de remporter la Coupe du monde à Tokyo.
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