France - Irlande : Yoram Moefana, "un détonateur précieux au centre du terrain" pour battre l’Irlande selon Vincent Clerc
Le centre originaire de Futuna vivra la deuxième titularisation de sa carrière en équipe de France face l’Irlande, samedi.
Vous l’avez peut-être découvert dimanche lors du succès face à l’Italie pour l'entrée en lice des Bleus dans le Tournoi des six nations. Prise d’intervalle pour fixer les défenseurs, ouverture dans le couloir pour l’essai de Damian Penaud ; puis timing de course parfait et passe lobée pour l’essai de Gabin Villière, le tout en moins de vingt minutes. Yoram Moefana a donné un aperçu de sa formidable palette, suffisamment complète pour offrir des deux derniers essais du XV de France et participer pleinement à sa victoire (37-10).
Samedi 12 février face à l’Irlande (17h45 en direct sur France 2 et france.tv), le joueur de 21 ans constituera la paire de centres des Bleus avec Gaël Fickou. Premier sélectionné tricolore né dans les années 2000, il vivra sa deuxième titularisation - la première remontant à la finale perdue contre l’Angleterre en décembre 2020 - pour un choc que beaucoup considèrent déjà comme le match le plus important du Tournoi. "Il est prêt à répondre à toutes les exigences de ce match, physiquement, techniquement, psychologiquement. L'équipe va faire en sorte qu'il soit lui-même et qu'il apporte tout son talent, car il en a beaucoup", justifiait le sélectionneur des Bleus Fabien Galthié jeudi lors de l’annonce du groupe.
Le jeu des absences et la forme du moment
Ce n’est pas nier son talent de dire que le Bordelo-béglais bénéficie notamment d’un alignement des planètes. Comme Jonathan Danty a su le faire avant lui en se montrant particulièrement à son avantage lors de la tournée d’automne après les forfaits d’Arthur Vincent et de Virimi Vakatawa - alors doublette titulaire indiscutable -, le natif de Futuna a saisi l’occasion de s'affirmer comme une option possible. Il profite du forfait de Danty, touché à la cheville contre l’Italie, et d’un Vakatawa "pas encore revenu à son meilleur niveau", selon le consultant de France Télévisions, Vincent Clerc. "Le staff fait aussi ses choix à la forme du moment", poursuit l’ancien ailier international.
Bien sûr, le trois-quart centre, capable d’évoluer à l’aile, voit avant tout ses efforts récompensés. "C’est un joueur qui a du potentiel, qui attendait un peu sa chance dans l'ombre. Au vu de ses prestations bordelaises et des qualités qu’il a, de son état de forme, c’est assez logique et mérité qu’il soit titulaire", ajoute l'ancien Toulousain.
Débarqué à 13 ans en métropole dans les valises de son oncle, Tapu Falatea, pilier actuel du SU Agen, poussé par une mère espérant lui offrir un meilleur avenir scolaire, Moefana ne misait alors pas encore sur le rugby. Ce dernier a d’ailleurs lutté un temps contre le déracinement et aurait pu rentrer auprès de ses proches aussi vite qu’il était arrivé, apprend-on dans un article de l’Equipe du jour qui lui est consacré. "J’ai eu la chance que ma grand-mère maternelle, Malesiana, me rejoigne après seulement quelques mois pour m’aider. Elle est restée un an à mes côtés", relate-t-il.
Une pièce maîtresse de l’UBB
Après un passage à Colomiers en Pro D2, ce dernier rejoint l’UBB où il marque autant par sa discrétion que par son talent. Titulaire douze fois en quatorze matchs de Top 14 depuis le début de l'année avec le leader girondin, Yoram Moefana est le joueur qui porte le plus le ballon de son équipe. Il est aussi le centre qui réussit le plus de passes après contact depuis le début de la saison, preuve de sa capacité à faire vivre le ballon : une qualité particulièrement recherchée par le staff des Bleus.
"Tao", de son surnom, a d'abord fait le bonheur des Bleuets. Le joueur, alors surclassé, a laissé le souvenir d'un jeune "bosseur et respectueux" à David Darricarrère, alors entraîneur des arrières des moins de 20 ans. "C'était le petit jeune de la bande, un peu timide hors terrain et plus du tout dessus. Un bosseur avec beaucoup de qualités. Il a une progression fulgurante, quand il se retrouve entouré de joueurs de classe sur le terrain, de suite, il cherche à élever son niveau de jeu et il y arrive. Contre l'Irlande, ce sera un vrai test pour lui."
Un profil qui n'avait pas non plus échappé à Fabien Galthié et son staff, attentifs à l'évolution des jeunes pousses. "On l'a ensuite vu progresser à Bordeaux et quand il a fallu élargir le groupe lors de l'Autumn Nations Cup en novembre 2020, on n'a pas hésité à le titulariser car aux entraînements, il en imposait déjà, malgré sa timidité. Son potentiel sautait déjà aux yeux", atteste le patron des Bleus.
Un dévoreur d’intervalles
Privé de tournée australienne en raison d’une blessure, le voici donc logiquement de retour. Pour Vincent Clerc, il sera l’une des clés de la rencontre face à l’Irlande. "Il a d’énormes qualités physiques, d’explosivité, de vitesse, il est très puissant, il est un peu dans la continuité de Jonathan Danty, mais encore plus explosif. C’est quelqu’un qui impressionne les préparateurs physiques de l’équipe de France. C’est un très bon défenseur et un détonateur au centre du terrain qui va pouvoir permettre de franchir, de fixer la défense."
"Avant son premier match avec nous, il avait explosé ses crampons. On avait été obligés de faire ouvrir un magasin à Pau le samedi pour en racheter. Il est tellement puissant, véloce, il plante ses appuis très fort dans le sol, et c'est le pauvre crampon qui souffre."
David Darricarrère, ancien entraîneur des trois quart des moins de 20 ansà franceinfo : sport
Un profil particulièrement précieux face à une équipe puissante, habituée à étouffer les attaques adverses en étant particulièrement efficace dans les plaquages et les phases au sol.
"Les Irlandais sont très physiques, ce sont des défenseurs très forts sur le haut du corps capables de coffrer les ballons et précis dans les zones de grattage. Avoir des joueurs comme Moefana permet d’avoir un temps d’avance pour constamment mettre les Irlandais sur le reculoir et les empêcher de venir nous prendre les ballons."
Vincent Clerc, ancien ailier international du XV de France et du Stade Toulousainà franceinfo : sport
Pour Vincent Clerc, tenter une telle association dans ce match à enjeu est d'autant plus important pour les Bleus à un peu plus d'un an du Mondial en France. "Ça permet aussi peut-être une dernière fois de tester une formule différente, on n'est jamais à l'abri d'un forfait ou d'une blessure." L'opportunité est donc tout aussi belle pour Moefana et le XV de France, dont les performances seront forcément scrutées de près.
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