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"Manquements", "pratiques très contestables", disparition d'archives... Un rapport accable la gestion de la Fédération française des sports de glace

Les rapporteurs ont saisi la justice après avoir mené plus de 130 auditions sur la gestion fédérale.
Article rédigé par franceinfo, Aurélien Thirard
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La gestion de Didier Gaihaguet, à la tête de la FFSG jusqu'en février 2020, sévèrement critiquée dans un rapport commandée par la ministre des Sports. (PHILIPPE LOPEZ / AFP)

La gestion de la Fédération française des sports de glace (FFSG) est mise en cause dans un rapport définitif publié samedi 3 juin par le ministère de Sports, a appris franceinfo. Il s'agit d'un rapport de la mission d'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR) portant sur la FFSG, diligentée par la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra.

>> Sports de glace : la présidente de la Fédération, Gwenaëlle Noury, dénonce les "intimidations" et le "chantage" de Didier Gailhaguet

Dans leurs conclusions, les rapporteurs accablent la gestion de la Fédération, en particulier avant l'arrivée à sa tête en mars 2020 de Nathalie Péchalat (restée jusqu'en juillet 2022), soit du temps de la présidence de Didier Gailhaguet, contraint à la démission en 2020 après les scandales sexuels dans le patinage, qu'a dénoncé la patineuse Sarah Abitbol.

Des transformations profondes à réaliser


Les rapporteurs annoncent également avoir saisi la justice après avoir constaté la disparition d'archives de la FFSG "antérieures à 2020", et à cause de "manquements" et de "pratiques très contestables" concernant la gestion fédérale de la Fédération. Ils indiquent avoir réalisé plus de 130 auditions, contrôlé de nombreuses pièces au siège de la Fédération et s'être déplacés dans les différentes structures de la Fédération. 

Pour la ministre des Sports, "le rapport met en lumière les transformations profondes qu'il reste à réaliser au sein de la fédération, malgré une démarche de remise en ordre opérée par les gouvernances successives depuis 2020, qu'il convient de souligner". Sur Twitter, Amélie Oudéa-Castéra affirme que "la mise en oeuvre des préconisations de ce rapport sera suivie de manière précise et dans la durée par le ministère des Sports, pour que la fédération puisse sortir durablement de la situation actuelle".

Le poids des anciens dirigeants

Le rapport met en cause "un fonctionnement fédéral qui a connu une succession de crises et marqué par l'omniprésence d'anciens dirigeants au détriment de la mise en place d'une nouvelle gouvernance". Pour les inspecteurs "la fédération n'est toujours pas parvenue à tourner la page d'une longue période de gouvernance par une même équipe", évoquant, sans la nommer; la présidence de Didier Gailhaguet jusqu'en 2020. Les inspecteurs se sont intéressés aux trois olympiades précédentes, soit depuis 2014.

Les auditions ont permis de montrer "documents à l'appui", "que l'élection de la nouvelle présidente, Gwenaëlle Noury a été influencée", écrivent les rapporteurs. Selon eux, "cette démarche visait clairement à permettre de reprendre la maîtrise de la gouvernance fédérale par dirigeants interposés". Un de ses anciens dirigeants a même "sollicité un statut de consultant auprès de la FFSG et a, à ce titre, réclamé un contrat (...) sans vote du bureau exécutif ni du conseil fédéral". Ce qui lui a été refusé par Gwenaëlle Noury en mars 2023. Les inspecteurs notent également que "les effets de la crise de 2020", sur la révélation de scandales sexuels "sont encore très présents. (...) La fédération est aujourd'hui en difficulté, ses effectifs en cadres techniques sont réduits et son image très dégradée".

Des soupçons de pratiques illégales

À ce constat, viennent s'ajouter des soupçons de pratiques illégales, comme des destructions d'archives. "Les investigations (...) ont rapidement mis en lumière l'existence d'une omerta", pointent les rapporteurs. "La présidente et la secrétaire générale de la fédération ont (...) précisé à la mission ne pas savoir où se trouvaient, pour les années antérieures à 2020", soit du temps de la présidence de Didier Gailhaguet, "les contrats de travail de certains salariés, des factures de fournisseurs, des conventions avec certains prestataires, en particulier ceux liés à l'activité événementielle de la FFSG".

Plus grave, "un témoignage recueilli par la mission a affirmé avoir vu des salariés fédéraux détruire de nombreux documents dans les locaux de la fédération à l'aide d'un déchiqueteuse, peu de temps avant la fin du mandat qui s'est achevé en février 2020". Ces archives étant considérées comme des archives publiques, leur porter atteinte "est susceptible d'une qualification pénale", ce qui a conduit les inspecteurs à "procéder à un signalement au procureur de la République au titre de l'article 40 du code de procédure pénale".

Une utilisation "inappropriée" de la carte bancaire de la Fédération

Un autre signalement a également été effectué à propos de la gestion de la FFSG caractérisée "jusqu'en février 2020 par de nombreux manquements et par des pratiques très contestables". Les inspecteurs ont relevé "plusieurs faits", pénalement répréhensibles selon eux : "l'utilisation de la carte bancaire de la fédération pour des dépenses inappropriées et parfois sans justificatifs", "l'absence de transparence dans la gestion de certains contrats", "une gestion opaque de la billetterie des manifestations sportives antérieures à 2020", ou encore "des menaces et tentatives d'intimidations des dirigeants actuels" et "des modalités non réglementaires de rémunération de sportifs de haut niveau et des activités d’agents sportifs non déclarés conformément aux dispositions prévues par le code du sport". 

Par ailleurs, même si la situation financière de la Fédération "demeure saine", "l'analyse des rémunérations depuis 2014, à partir du journal de paye, fait ressortir de gros écarts de rémunération avant 2020, avec deux salariés cadres qui représentaient près de 40% de la rémunération totale annuelle". 

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