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ENTRETIEN. "Ce livre a été comme une thérapie et une reconstruction", confie le skieur Alexis Pinturault au sujet de son autobiographie

Le vainqueur du gros globe de cristal en 2021 publie son premier livre, une autobiographie intitulée De l'or au cristal, mercredi.

Article rédigé par Apolline Merle, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
Le Français Alexis Pinturault à l'arrivée du slalom géant, lors de la Coupe du monde de ski alpin à Kranjska Gora, en Slovénie, le 13 mars 2021. (MARCO TROVATI / AP)

Un premier livre "comme une thérapie". Après une saison décevante l'hiver dernier, Alexis Pinturault entame sa saison 2023 avec la sortie de son livre autobiographique De l'or au cristal (Ed. Marabout), en librairie le 19 octobre. Le vainqueur du classement général 2021 de la Coupe du monde publie un ouvrage intime, qui l'a aidé à se reconstruire après ses déceptions et ses doutes de la saison passée. Ce chapitre de sa vie désormais clos, il a retrouvé l'envie de gagner et la motivation pour y arriver. 

franceinfo: sport : Quelle est la genèse de ce livre autobiographique ?

Alexis Pinturault : J'étais dans une période où il était important pour moi de clore un chapitre de ma vie, et d'en attaquer un nouveau. Dans cette autobiographie, je parle de tout ce qui me tient à cœur. Ce livre a été comme une thérapie, et une reconstruction. En 2021, je sors d'une magnifique saison, suivie d'une autre beaucoup plus compliquée en 2022, où j'ai senti que j'avais besoin de prendre du temps pour moi, de récupérer, de prendre du recul et de laisser décanter tout cela pour repartir de plus belle pour l'avenir.

Vous faites plusieurs fois référence au fait que vous n'êtes pas spécialiste d'une discipline et que vous ne le serez jamais. Pourquoi avez-vous autant insisté sur cet aspect ?

J'ai eu toute une réflexion sur mon avenir, surtout après cette année que je viens de passer. Ayant gagné le gros globe en 2021, je me suis demandé : est-ce que l'objectif ne peut pas être différent à présent, et ne pas se concentrer uniquement sur le gros globe, mais sur des choses plus simples avec moins de déplacements, moins de courses, et donc se concentrer sur une seule discipline ?

Mais ce n'est pas un système où je m'épanouis. J'ai besoin de cette variété pour pouvoir me sentir bien et de ne pas entrer dans une routine, qui m'a toujours fait beaucoup de mal. J'ai toujours été attentif à cela. Le bilan de cette réflexion est que je ne pouvais pas me contenter d'une seule discipline.   

Vous racontez aussi votre rapport à la presse, qui a été compliqué à vos débuts...

Je suis arrivé sur le circuit très jeune et très vite. Ça a été un peu on-off. Je me suis très bien adapté sur le plan sportif, mais le côté relation avec les médias a en effet pris un peu plus de temps. Du jour au lendemain, je me suis retrouvé à multiplier les interviews avec les journalistes.

"J'ai eu des difficultés car je suis quelqu'un de très honnête et donc, de spontané. Quand on me pose une question je réponds sans chercher de détour à ma réponse. Et cela m'a un peu joué des tours."

Alexis Pinturault

à franceinfo: sport

A l'époque par exemple, je me fixais des ambitions assez élevées sur le plan sportif, que je voulais gagner un jour le gros globe et on m'a tout de suite dit que j'avais la grosse tête. Certes, l'objectif était élevé, mais il était magnifique. J'avais eu des résultats très jeune en super G, en géant, en combiné, en slalom. Bien sûr, il fallait assembler beaucoup de choses pour y arriver, mais je m'en sentais capable.

Et c'est très important pour un athlète de définir des objectifs, même trop élevés, parce qu'ils nous poussent à nous surpasser. Donc, je me suis mis dans une position défensive, où je me méfiais des médias. Avec le temps, j'ai évolué, les journalistes ont appris à me comprendre, et se sont rendu compte que je n'étais peut-être pas qu'un rêveur. Aujourd'hui, il n'y a plus de souci.

Au-delà de votre ressenti, vous prenez aussi franchement position sur certains sujets d'actualité comme l'accueil de grands événements sportifs internationaux dans des pays où le climat ne s'y prête pas. Vous citez notamment les exemples des JO d'hiver et de la Coupe du monde de football au Qatar.

Nous, skieurs et gens de la montagne, nous percevons les effets du réchauffement climatique depuis des décennies. On a déjà dit beaucoup de choses, mais depuis quelques années, les conséquences frappent de plus en plus de gens, partout. On a eu très chaud cet été, on a connu des problématiques d'eau. Aujourd'hui, il est clair qu'on ne peut plus faire certains choix, car il y a des enjeux environnementaux qui doivent être la priorité avant même des choix économiques ou sportifs.

Cela signifierait donc que certains pays ne pourraient plus accueillir ces événements, créant ainsi des inégalités...

Des pays n'accueillent jamais de courses de voile car ils n'ont pas de mer ou de lacs suffisamment grands. C'est déjà le cas pour certains sports, et cela doit le rester. C'est ce qui fait la beauté de certaines disciplines. Si on pratique un sport, c'est qu'il y a les conditions réunies pour le pratiquer à cet endroit. Il ne faut pas tout dénaturer et faire en sorte que tout soit identique afin que l'on puisse faire la même chose partout. Au contraire, la richesse du monde est que chaque endroit est différent.

Vous avez pensé raccrocher les skis après les Mondiaux 2023, avant de vous donner comme horizon les Jeux olympiques de Milan-Cortina en 2026. Terminer en Europe, aux JO, à 35 ans, n'est-ce pas le meilleur endroit et le moment idéal pour s'arrêter ?

Je ne sais pas (rires). En effet, j'ai pensé arrêter après les Mondiaux 2023 à Courchevel. Mais à la suite de la saison 2021, j'ai eu beaucoup de mal à me projeter, à définir des nouveaux objectifs, et à trouver une nouvelle motivation. Je n'ai pas pris assez de temps pour me reposer et faire retomber toute cette euphorie autour de cette saison 2021. J'ai donc recommencé une saison en étant relativement fatigué. 

"J'étais dans le flou et j'avais du mal à me dire que j'allais continuer longtemps. Je n'avais plus cette niaque."

Alexis Pinturault

à franceinfo: sport

Puis, au fur et à mesure, il y a eu cette saison 2022, plus compliquée, où j'ai tout de suite senti tous ces problèmes qui apparaissaient très vite. Les Jeux de Pékin et la fin de saison m'ont permis de prendre du recul et de savoir enfin ce que je voulais faire à plus long terme. Aujourd'hui, j'arrive à me projeter, j'ai retrouvé une nouvelle motivation. Ce chapitre de ma vie est clos, le livre m'y a aidé et j'en ouvre un nouveau.

Une nouvelle motivation que l'on ressent d'ailleurs jusqu'au dernier mot du livre : "gagner". 

Oui, l'objectif de la saison est justement de retrouver le chemin de la victoire et je veux continuer à me faire plaisir. Maintenant, il faut que je puisse reconstruire cette possibilité-là tout au long de la saison.

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