"Des règles différentes selon les joueurs" : le monde du tennis réagit à l'affaire de dopage impliquant Jannik Sinner

De nombreux joueurs du circuit et des personnalités du monde du tennis n'ont pas tardé à réagir après les révélations impliquant le numéro un mondial dans une affaire de dopage, mardi.
Article rédigé par Apolline Merle
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
L'Italien Jannik Sinner a remporté le Masters 1000 de Cincinnati (Ohio), le 19 août 2024, face à l'Américain Frances Tiafoe. (SAM GREENE / THE CINCINNATI ENQUIRER / SIPA)

"Faut peut-être arrêter de nous prendre pour des cons non... ?" L'indignation est signée de l'ex-numéro 10 mondial français Lucas Pouille sur les réseaux sociaux. Quelques heures plus tôt, un communiqué de l'Agence internationale pour l'intégrité du tennis (ITIA), révélait des tests positifs du joueur italien Jannik Sinner au clostébol, un stéroïde anabolisant synthétique dérivé de la testostérone lors du Masters 1000 d'Indian Wells, en mars. S'il a été innocenté par un tribunal indépendant, de nombreux joueurs du circuit ont tenu à exprimer, leur stupéfaction pour les uns, de la colère pour les autres. 

Le joueur canadien Denis Shapovalov (105e mondial) a, de son côté, publié deux tweets coup sur coup. "Je ne peux pas imaginer ce que ressentent actuellement tous les autres joueurs bannis pour des substances", a-t-il commencé, avant de pointer dans une seconde publication, "des règles différentes selon les joueurs".

L'ancien 13e mondial et finaliste de Wimbledon en 2022, Nick Kyrgios, a lui mis en doute la parole du numéro un mondial, qui nie toute volonté de dopage, et qui prône la contamination involontaire. "Ridicule – que ce soit accidentel ou planifié. Vous vous faites tester deux fois avec une substance (stéroïde) interdite... vous devriez être absent pendant deux ans. Votre performance a été améliorée. Une crème de massage.... Ouais sympa", a-t-il réagi.

L'Australien a même poursuivi la conversation dans les commentaires en mettant en cause une nouvelle fois la version de l'Italien. "Accidentel ? Vous croyez vraiment que le kiné a appliqué une crème sur une coupure qui lui a fait échouer deux tests aux stéroïdes anabolisants ?", a-t-il encore écrit.

Petar Popovic, actuel entraîneur de Corentin Moutet, interpelle quant à lui les instances mondiales face à ce cas de dopage. "Hey l'ATP, la WTA et l'ITF, tout ce que nous demandons (joueurs, coachs), c'est de l'égalité et de la transparence. Ni plus, ni moins", a-t-il publié sur X. La question de l'équité est également soulevée par Tara Moore.

La joueuse britannique avait été contrôlée positive aux métabolites de nandrolone, un stéroïde anabolisant (comme dans l'affaire de Jannik Sinner), en avril 2022 et avait été suspendue dix-huit mois avant d'être blanchie par un tribunal indépendant plus d'un an après. "Je suppose que seule l'image des meilleurs joueurs compte. Je suppose que seule l'opinion du tribunal indépendant sur les meilleurs joueurs est considérée comme solide et juste. Pourtant, ils les remettent en question dans mon cas. Cela n'a aucun sens", écrit-elle aussi sur X.

"Les règles sont différentes pour des joueurs différents"

L'ancienne numéro un mondiale, Simona Halep, avait cependant elle aussi été contrôlée positive à un médicament stimulant la production de globules rouges en 2022, suspendue quatre ans en 2023 avant de voir sa condamnation réduite à neuf mois un an plus tard, les autorités antidopage retenant l'argument de la Roumaine d'une ingestion d'un complément alimentaire contaminé.

"Je crois comprendre que Simona Halep ne savait pas d'où provenait sa contamination, cela lui a pris un peu de temps avant d'y parvenir. Dans le cas de Jannik, ils ont su exactement d'où cela venait en cinq minutes" s'est défendu Darren Cahill, entraîneur de Jannik Sinner (et ancien coach de Halep quelques années avant son contrôle positif) dans une interview donnée à ESPN, alors que son protégé n'a lui fait l'objet d'aucune suspension. "Ils ont été assez rapides pour joindre les autorités antidopage pour faire lever la suspension temporaire" a-t-il insisté.

Une colère et de la rancœur partagée par Benjamin Lock, un joueur zimbabwéen pointant à la 393e place mondiale. "Les règles sont différentes pour des joueurs différents. L'argent parle. Si vous voulez qu'une institution perde son respect et sa crédibilité du jour au lendemain, c'est ainsi qu'il faut procéder. Je compatis avec tous les joueurs dont la carrière et la réputation ont été détruites parce que des 'règles' ont été appliquées. Un sport 'propre' ? Bien joué", argue-t-il.

"C'est un peu plus facile pour quelqu'un de mieux classé d'affronter une situation pareille, a admis l'entraîneur de Sinner, Darren Cahill. Un joueur 300e, 500e ou 1000e au classement, dans ce genre de situation, n'en aurait pas les fonds. Cela demande beaucoup d'argent d'employer des experts. Mais je pense que concernant l'intégrité avec laquelle ces affaires sont réglées, le classement n'importe pas."

Si le numéro un mondial a été innocenté par un tribunal indépendant, l'affaire n'est pas terminée pour autant. L'Agence mondiale antidopage peut encore faire appel et se saisir de l'affaire.

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