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Coupe Davis : de la refonte à la chute de la nouvelle formule, retour sur le fiasco de l'association entre Kosmos et la Fédération internationale en cinq dates

Alors que l'entreprise d'événementiel Kosmos organisait le tournoi depuis 2019, la Fédération internationale de tennis a annoncé jeudi avoir mis fin à son partenariat.
Article rédigé par Apolline Merle, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
Le Canada a remporté la première Coupe Davis de son histoire, à Malaga (Espagne), le 27 novembre 2022. (THOMAS COEX / AFP)

"Un échec total." Ce constat a été dressé par Gilles Moretton, président de la Fédération française de tennis (FFT), après l'annonce jeudi 12 janvier de la rupture du contrat liant la Fédération internationale de tennis (ITF) et l'entreprise d'événementiel Kosmos, sur l'organisation de la Coupe Davis. Un échec financier mais aussi auprès des joueurs et des spectateurs, qui ne sont plus épris de la ferveur de la compétition. "L'ITF confirme que son partenariat avec Kosmos Tennis pour la Coupe Davis se termine dans sa cinquième année", a écrit l'ITF jeudi, en précisant qu'elle reprendra l'organisation de la compétition dès l'édition 2023. Cinq ans après avoir signé un contrat liant les deux protagonistes pour vingt-cinq ans, le mariage a vite pris fin. Retour sur une demi-décennie d'un format mouvementé. 

2018 : refonte de la compétition

Une réforme radicale. Le 16 août 2018, la Fédération internationale de tennis adopte à Orlando (Etats-Unis) le projet de réforme de la Coupe Davis. Souvent boudée par les meilleurs joueurs du monde, l'épreuve doit être relancée tant auprès des joueurs que sur le plan financier grâce à cette nouvelle formule. Cette refondation recueille l'approbation de près de 72 % des 120 délégués présents. L'accord est signé entre l'ITF et le groupe d'investissement Kosmos, présidé par l'ancien joueur du FC Barcelone Gerard Piqué. Il porte sur trois milliards de dollars (2,7 milliards d'euros environ) sur vingt-cinq ans et vingt millions de dollars (18,5 millions d'euros) annuels garantis aux joueurs. 

Créée en 1900, et organisée sur quatre week-ends de trois jours étalés sur l'année, avec des matchs en cinq sets à domicile et à l'extérieur, la compétition centenaire refait donc peau neuve. Dès 2019, la compétition est condensée sur deux semaines. Une première partie, disputée en douze premiers tours en début d'année. La seconde partie, la phase finale, est organisée en fin de saison sous la forme d'un tournoi d'une semaine opposant 18 équipes internationales, en trois matchs (deux simples, un double), en deux sets gagnants. 

Dès le départ, l'Australie, le Royaume-Uni et l'Allemagne expriment leur opposition à la nouvelle formule. Novak Djokovic doute également du format. "J'ai le sentiment que la date de la Coupe Davis est vraiment mauvaise, notamment pour les meilleurs joueurs", avance le Serbe, deux mois après l'annonce de la signature du projet. En France, Yannick Noah, victorieux de l'épreuve comme joueur puis capitaine, critique lui l'ITF pour avoir "vendu l'âme d'une épreuve historique".

2019 : une première édition mitigée

L'Espagne est choisie pour accueillir les deux premières éditions de la Coupe Davis façon Kosmos. L'édition remaniée est un succès relatif. Les meilleurs joueurs mondiaux répondent pour la plupart présents : Rafael Nadal (numéro 1, au moment de la phase finale), Novak Djokovic (numéro 2), Matteo Berrettini (numéro 8), Roberto Bautista-Agut (numéro 9) et Gaël Monfils (numéro 10). L'ancien numéro 1 mondial Andy Murray est aussi appelé pour jouer avec sa sélection britannique. 

En revanche, Daniil Medvedev (numéro 5) déclare forfait, Alexander Zverev (numéro 7) préfère jouer des exhibitions en Amérique du Sud. Quant à Roger Federer (numéro 3), Dominic Thiem (numéro 4) et Stefanos Tsitsipas (numéro 6), leur pays n'est pas qualifié. Rafael Nadal permet à l'Espagne de remporter son sixième saladier d'argent.

Les Espagnols Pablo Carreno Busta (à g.), Roberto Bautista Agut (au c.) et Rafael Nadal (à dr.) ont remporté la Coupe Davis, à Madrid, le 24 novembre 2019. (JAVIER SORIANO / AFP)

Toutefois, la compétition n'échappe pas aux polémiques. Plusieurs matchs se terminent au milieu de la nuit, du fait d'une programmation surchargée, et hormis pour les matchs de l'Espagne, les tribunes sont trop souvent clairsemées. De même que l'ambiance globale, froide et feutrée, reste bien loin de la ferveur des précédentes éditions. 

2020 : une année blanche marquée par le Covid-19

Pour sa deuxième année d'existence, la Coupe Davis nouvelle formule subit un coup d'arrêt, indépendant de sa volonté. Comme de nombreuses compétitions sportives, l'épreuve est annulée en raison de la pandémie mondiale de coronavirus. Une telle décision n'avait pas été prise depuis la Seconde Guerre mondiale. La compétition organisée en indoor n'est pas compatible avec les mesures sanitaires en vigueur à l'époque.

2021 et 2022 : des remaniements en pagaille

En 2021, l'épreuve revient modifiée. D'abord, les phases finales se déroulent désormais non plus dans une, mais dans trois villes hôtes : Madrid (Espagne), Innsbruck (Autriche) et Turin (Italie). En revanche, les demies et la finale se jouent à Madrid, sous la forme d'un "Final Four". Chaque ville organise l'évènement en fonction des réglementations sanitaires en vigueur dans chaque pays.

En 2022, la formule est similaire à l'année précédente, avec trois rendez-vous entre avril et novembre (une phase de qualifications, une phase de groupes et une phase finale). L'organisation complexifiée avec un calendrier surchargé, n'attire pas les joueurs alors qu'il s'agissait d'un objectif primordial de la refonte.  

Malgré une nouvelle formule, les salles restent vides. Matchs en pleine semaine, affiches sans les meilleurs joueurs, tarifs élevés expliquent en partie cet échec. Autant de raisons qui fragilisent la solidité financière du contrat.

2023 : la fin prématurée du contrat

L'annonce fait grand bruit. La Fédération internationale de tennis annonce jeudi 12 janvier mettre fin au contrat la liant au groupe d'investissement Kosmos, sans préciser les raisons de ce divorce précoce. Le partenariat, qui devait durer vingt-cinq ans, n'a en réalité tenu que cinq ans. 

"C'est un constat d'échec total d'un choix qui a été fait en 2018 par la Fédération internationale de vendre un actif. (...) C'est trois ans de perdus. Tout est à reconstruire", a déclaré à franceinfo, Gilles Moretton, président de la Fédération française de tennis. "Ce que je souhaite, c'est qu'on confie à des gens responsables cette compétition qui fait partie du patrimoine du tennis mondial, a-t-il poursuivi. Il faut qu'elle soit confiée à des gens qui ne sont pas seulement attirés par l'aspect financier". Si la formule prévue pour 2023 reste maintenue en l'état malgré la fin de partenariat, l'avenir reste incertain pour les années à venir. "L'ADN de la Coupe Davis était les matchs à domicile et à l'extérieur. C'est une ambiance qu'on a envie de retrouver", a conclu le président de la FFT.

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