Open d'Australie : les nouveaux box des joueurs, situés sur le court, doivent encore se faire une place

Le Grand Chelem australien a instauré un nouveau box pour accueillir le staff des joueurs, situé directement sur le court. Mais cette innovation ne fait pas l'unanimité auprès des joueurs.
Article rédigé par Apolline Merle - envoyée spéciale à Melbourne (Australie)
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
Andy Murray, le nouveau coach de Novak Djokovic, présent dans le box du Serbe lors de son 1er tour à l'Open d'Australie, le 13 janvier 2025 à Melbourne (Australie). (ASANKA BRENDON RATNAYAKE / SIPA)

Être au plus près des joueurs pour les conseiller et les encourager. Pour cette nouvelle édition, les organisateurs de l'Open d'Australie ont ajouté un nouveau box des joueurs, situé à même le court sur les trois principaux stades que sont la Rod Laver Arena, le Margaret court Arena et le John Cain Arena. Ce nouvel emplacement, non obligatoire et composé de quatre places, est réservé à l'équipe sportive. Cette dernière peut ainsi échanger avec son joueur entre les points. Les entraîneurs ont aussi un accès facilité à des statistiques détaillées sur des tablettes mises à leur disposition (suivi des mouvements du joueur et des trajectoires de balle notamment).

L'ambition du tournoi est de faire de 2025 "l'année de l'entraîneur", afin de "promouvoir l'importance de l'accompagnement auprès d'un public mondial", ont expliqué les organisateurs à franceinfo: sport. "Les entraîneurs jouent un rôle essentiel dans notre sport et, depuis plusieurs années, nous cherchons des moyens de multiplier les opportunités en termes de promotion, d'avantages et d'accès", a ajouté Craig Tiley, directeur de l'Open d'Australie, dans un communiqué.

"Nous l'avons testé cette semaine, et certains entraîneurs étaient un peu sceptiques au début, mais ensuite ils se sont assis et ont dit : 'C'est génial'."

Craig Tiley, directeur de l'Open d'Australie

au média australien The Age

"Vous avez une excellente vue sur votre joueur. Quand ils viennent chercher leur serviette, vous pouvez leur parler, donc vous êtes presque en mesure de coacher votre joueur après chaque point, si vous le souhaitez", avait déclaré Craig Tiley le 11 janvier au média australien The Age(Nouvelle fenêtre), tout en admettant qu'il existait "des points de vue différents dans notre sport" sur le sujet. L'initiative rappelle les bancs mis à disposition des coachs lors de l'United Cup, compétition mixte par nation organisée début janvier en Australie.

Un temps d'adaptation nécessaire

Cette mesure s'inscrit dans la continuité de l'autorisation officielle du coaching depuis les tribunes à partir du 1er janvier 2025. La pratique était déjà expérimentée sur le circuit depuis plusieurs années. Inaugurée depuis dimanche 12 janvier par les joueurs, l'idée divise. Le Français, 14e mondial, Ugo Humbert est, lui, déjà convaincu. "J'avais déjà joué sur ce court [sur le John Cain], et c'est vrai que le box était plus haut avec une petite vitre devant, et je me rappelle que j'avais du mal à les entendre et à les voir [ses coachs], se souvient le Français, qui s'est qualifié pour le deuxième tour À présent, si tu as envie de les chercher du regard, d'avoir un conseil, c'est beaucoup plus facile", assure-t-il.

Le Grec Stefanos Tsitsipas, qui a plusieurs fois créé la polémique pour le coaching sur le court avant que celui-ci ne soit accepté, a expliqué "avoir ri" quand il a vu les nouveaux box pour la première fois, lors de son entraînement avec le numéro 1 mondial, Jannik Sinner, la semaine dernière. "C'est un peu bizarre, parce que je vois mes entraîneurs et d'autres membres de l'équipe dans une loge particulière et le reste d'entre eux à l'étage, ce à quoi je ne suis pas habitué. Je suppose que je m'acclimaterai à un moment donné. (...) C'est vraiment quelque chose qui va être intéressant pour le tennis [et qui apportera] quelque chose de nouveau et d'innovant", a-t-il estimé en conférence de presse samedi 11 janvier. Cela ne lui a pas été d'un grand secours, puisque le Grec a été éliminé dès son entrée en lice, lundi 13 janvier.

Une séparation du clan peu appréciée

En revanche, le numéro 1 français regrette que ce nouvel espace de quatre places soit réservé seulement aux coachs. "Avoir mes proches, ma copine au même endroit, est un soutien tout aussi important que celui de mon entraîneur", estime Ugo Humbert, qui a d'ailleurs exceptionnellement réussi à faire intégrer ce box à sa compagne pour son premier match.

Également vainqueur de son premier tour à Melbourne, Arthur Fils ne l'a pas utilisé. "Avoir tout le monde au même endroit permet d'avoir un esprit d'équipe. [Dans cette configuration], mes coachs auraient été en bas et mon père en haut... On en a parlé et je me sens plus à l'aise avec toute mon équipe au même endroit. Je les entends très bien depuis les tribunes", a justifié la tête de série numéro 20.

Un atout pour les matchs à enjeux

Un ressenti partagé par Lucas Pouille, éliminé dimanche par le numéro 2 mondial Alexander Zverev au terme d'un beau duel, et qui a, lui aussi, opté pour le box traditionnel. "Déjà, je n'ai pas besoin de parler à mon coach. C'est ce que j'aime dans ce sport : devoir trouver des solutions par moi-même, tranche le 103e mondial. J'aime bien regarder tout le monde au même endroit, et ne pas voir trois personnes en bas et 15 en haut. Ou alors tu mets tout le monde en bas", suggère-t-il. À l’inverse de Lucas Pouille, Alexander Zverev a choisi d'avoir son équipe sportive au plus près de lui, laissant ses proches, dont sa compagne, dans les tribunes.

"J'ai trouvé cela bizarre, tu ne vois pas le clan réuni... Je ne suis pas pour qu'il soit sur le court. Bientôt il sera sur le banc."

Lucas Pouille, 103e mondial

en conférence de presse

L'entraîneur de Lucas Pouille, Enzo Py, est lui plus nuancé. Bien qu'il n'ait pas eu l'occasion de tester ce nouvel espace de la Rod Laver Arena lors du match de son protégé, il y trouve des avantages. "Je pense que l'idée est bonne, notamment pour les matchs à enjeux, quand le joueur a besoin de communiquer avec son équipe. Et tu te rends compte de davantage de choses, qui sont un peu plus difficiles à voir dans les box traditionnels qui sont plus loin, comme les trajectoires, les vitesses de jeu, ou même l'intensité physique", observe-t-il.

Si le coaching est favorisé avec ce nouvel emplacement, la meilleure aide reste bien les propres ressources du joueur : "Avoir un petit soutien, un conseil, une énergie supplémentaire quand on en a besoin, je trouve cela bénéfique, admet Ugo Humbert, mais ce ne sont pas les coachs qui tiennent la raquette. Je dois pouvoir compter sur moi." 

La direction du tournoi souhaite aller encore plus loin : "Nous voulons raconter l'histoire des équipes qui sont derrière les athlètes sur le court et nous invitons les joueurs à amener leurs entraîneurs à toutes les conférences de presse pour les aider à le faire", a plaidé Craig Tiley. Pour l'heure, l'initiative peine à convaincre et les entraîneurs désertent encore les salles de conférence de presse.

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