Le planchiste Antoine Albeau vise le record du monde de vitesse à la voile : "On recherche la glisse absolue"
Le record de vitesse à la voile est détenu depuis 2012 par un skipper australien qui a atteint 121 km/h sur un petit multicoque. Antoine Albeau souhaite aller plus vite en utilisant une planche à voile. Les tests ont démarré cette semaine dans le sud de la France.
Le Zéphyr, ce puissant vent de la mythologie grecque est le nom choisi par les initiateurs de ce projet assez fou : dépasser les 120 km/h sur une planche à voile. Il est piloté notamment par Antoine Albeau, 25 fois champion du monde de windsurf. Sportif français le plus titré de l'histoire, Antoine Albeau est la référence dans cette discipline. Il est aussi le plus rapide sur une planche en ayant frôlé il y a six ans les 100 km/h. Le problème aujourd’hui, c’est que la planche à voile a atteint ses limites. "Notre défi, c’est de comprendre pourquoi la planche depuis quinze ans va toujours à la même vitesse, explique le Rochelais de 49 ans. Il faut qu’on recherche pourquoi on n’arrive pas à avoir ce petit plus pour accélérer."
Celui qui réside et qui possède une école de voile sur l'île de Ré s'est donc mis en tête de révolutionner son sport avec de nouvelles planches, de nouvelles voiles et une nouvelle façon de travailler. "J’ai l’habitude de faire de la recherche et développement avec mes partenaires depuis 25 ans, raconte Antoine Albeau. On travaille au feeling et à tâtons mais sans avoir aucune donnée informatique. Là, avec ce projet, nous avons des données incroyables qui ressortent de tous nos tests et qui partent dans des ordinateurs."
Imaginer la planche du futur
C'est tout le sens du projet Zéphir lancé il y a plus d'un an. Quatre-vingts personnes sont mobilisées, des ingénieurs en aéronautique, des techniciens et des informaticiens, pour imaginer la planche à voile du futur. La démarche s'approche de ce qui se fait en Formule 1. "Comme en Formule 1, on a beaucoup de données embarquées, on a de l’intelligence artificielle, on a des capteurs un petit peu partout sur la planche", détaille Marc Amerigo. Ce spécialiste de l’ultra-performance est à l'origine du projet. "Ce que l’on recherche, c’est la glisse absolue, poursuit-il. Il faut donc un engin qui traîne très peu, qui puisse aller très vite naturellement sans résistance. Aujourd’hui, on est obligés d’inventer quelque chose qui n’existe pas encore."
Dans cette quête de la planche idéale, rien n'est négligé. Des tests en soufflerie ont été réalisés. Le corps d'Antoine Albeau a été modélisé en 3D pour lui permettre d'avoir une combinaison high-tech. Car à de telles vitesses, la chute peut être dramatique. "On travaille sur une combinaison avec des protections, on aura peut-être un airbag, sourit Antoine Albeau. Mais si on part sur un projet comme ça en se disant qu’une chute peut faire mal, il ne faut pas y aller. Quand je suis sur un run à une vitesse de 100 km/h, je ne suis pas en train de me dire : ouh là, là, ça va vite !"
Se rapprocher des 140 km/h
Avec ces premiers tests sur les prototypes de planche réalisés fin novembre sur le plan d’eau de la Palme dans l’Aude, les perspectives sont grandes, se félicite aujourd'hui Marc Amerigo. "On a une estimation, c’est d’aller vers les 140 km/h avec certains types d’angles et de conditions. Quand on voit les évolutions de la Coupe de l’America qui sont capables de se déplacer à 100 km/h avec très peu de vent, c’est quelque chose qui paraissait inconcevable il y a une vingtaine d’années. On repousse les limites."
La tentative de record du monde est programmée pour la fin 2022, début 2023 sur le site de la Palme dans l’Aude, un site homologué par le WSSRC, l’organisme international chargé de valider tous les records à la voile. À condition que le budget du projet Zéphir le permette : il manque encore des partenaires à démarcher pour le boucler (il est estimé à presque 3 millions d’euros). Mais déjà, avec sa planche du futur, Antoine Albeau rêve en grand. "On construit une Formule 1 que je vais piloter mais on espère que le planchiste moyen puisse monter dessus. On aimerait faire un dérivé de cette planche qui soit pilotable par un planchiste qui va naviguer le week-end. Et comme ça, tout le monde pourrait aller à des vitesses de 40, voire 50 nœuds (entre 70 et 90 km/h)."
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