Vendée Globe 2024 : "Ce qui intéresse les gens, c'est avant tout les histoires que l'on raconte", tranche le skippeur Jean Le Cam
Un palmarès et des records. À 65 ans, Jean Le Cam rempile pour une sixième participation au Vendée Globe, un record, dont le départ sera donné dimanche 10 novembre depuis les Sables d'Olonne. Vingt ans après son premier tour du monde à la voile, en solitaire, sans escale ni assistance, Jean Le Cam s'est fait plus qu'un nom dans le milieu de la course au large avec quatre Vendée Globe bouclés sur cinq, et ce toujours dans le top 10. Sa meilleure performance remonte à l'édition 2004-2005, où il termine deuxième après 87 jours de course, derrière Vincent Riou, pour sept petites heures d'écart. Un CV connu de tous, à tel point qu'aux Sables d'Olonne, le skippeur ne peut pas faire 10 mètres sans être arrêté par la foule.
Il n'en tire pourtant aucune satisfaction : "Ça ne fait pas grand-chose, répond-il humblement à quelques jours du départ. C'est une édition de plus", sourit le skippeur de l'Imoca Tout commence en Finistère-Armor-Lux. Pour son sixième départ consécutif, Jean Le Cam a d'abord pour objectif de "terminer" cette course au large avant de penser au classement. Dans cette optique, il a donc fait le choix de miser sur un bateau à dérives, et non à foil (qui vont plus vite), conçu à sa main. Un choix fort, alors que plus de la moitié de la flotte a misé sur le foil.
L'aventure humaine avant la compétition
Mais surtout, cette décision reste fidèle aux valeurs du skippeur. Alors que la recherche de performance va toujours plus loin, grâce à des avancées technologiques qui permettent d'augmenter la vitesse des bateaux, Jean Le Cam prône, lui, l'aventure humaine, l'essence même du Vendée Globe, avant la compétition. "Ce qui intéresse les gens, ce sont avant tout les histoires que l'on raconte, cette chose un peu inaccessible d'un skippeur tout seul autour du monde. Que les bateaux fassent 35 ou 25 nœuds, le public s'en fiche", tranche le "roi Jean", fière de sa quatrième place il y a quatre ans avec son monocoque déjà à dérives, Yes We Cam.
"D'ailleurs, poursuit-il, le record du Vendée Globe date de l'avant-dernière édition [Armel Le Cléac’h détenteur du record de l'épreuve en 74 jours en 2017], avec un delta de six jours. On peut l'expliquer de différentes manières, mais quand je dis : 'est-ce ça le progrès ?', cela ne plaît pas à tout le monde", s'amuse-t-il. L'évolution des bateaux portée par la recherche de vitesse met les skippeurs de plus en plus en danger, selon lui. Les chocs sont "au carré de la vitesse, ce qui veut dire qu'à un moment, c'est l'être humain qui va être le fusible", expose le navigateur.
"L'évolution est énorme, en technologie et en maîtrise du bateau. On va vers de l'élitisme complet", approfondit encore Jean Le Cam, qui voit la grande révolution technologique intervenir pour la prochaine édition en 2028. "Sur les 40 places au départ, il y a déjà huit bateaux en construction. On peut estimer qu'il y aura dix bateaux neufs, donc il ne va rester que 30 places. Rentrer dans le système du Vendée Globe n'est pas chose facile si tu n'y es pas déjà. Trouver des financements, construire un bateau, se qualifier, tout cela va devenir des étapes quasi impossibles", regrette-t-il.
Lui-même a bien déjà failli manquer le départ 2024 pour ces raisons. Sans l'aide du skippeur Eric Bellion, qui avait les fonds pour commencer les études autour d'un nouveau bateau, Jean Le Cam serait resté à quai. Bien au départ de cette dixième édition, le doyen de la course ne sait pas encore si cette participation sera sa dernière. En attendant, il veut savourer ce sixième départ au goût d'aventure.
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